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Sida : trente ans après, quelques raisons d'espérer

Alors que s'ouvre à Atlanta (Etats-Unis) la 20e Conférence sur les rétrovirus, Jean-Daniel Flaysakier, de France 2, fait le point sur l'avancée de la recherche sur le VIH.

Article rédigé par Jean-Daniel Flaysakier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Une particule virale du VIH, reconstituée par ordinateur. (SKU)

1983-2013. Trois décennies exactement après la découverte du virus du sida par l’équipe de Luc Montagnier, les chercheurs entrevoient quelques lueurs d’espoir pour arriver à juguler l’épidémie. Mais il reste de gros obstacles à franchir.

C’est le constat que dressent les 4 500 spécialistes réunis à Atlanta (Etats-Unis) pour la 20e édition de la CROI, la Conférence sur les rétrovirus.

Le vaccin est encore loin...

Cette réunion ne devrait pas, hélas, annoncer la mise au point d’un vaccin préventif contre le virus du sida. Ce vaccin, qui doit protéger de la contamination, ne verra pas le jour avant de longues années. Certains chercheurs évoquent une durée de vingt ans. Les difficultés de la mise au point d’un tel vaccin sont multiples. Elles sont notamment liées à l’extraordinaire capacité du virus à échapper aux pièges qu’on lui tend.

Il n'y a pas non plus de révélation fracassante à attendre concernant l’immunothérapie, c'est-à-dire les vaccins "thérapeutiques". Certes, la recherche dans ce domaine avance. Mais malgré les annonces tonitruantes de ces derniers mois, il semble difficile de dire aujourd’hui qu’on disposera bientôt d’un traitement qui permette de se passer du recours aux médicaments antirétroviraux, les ARV.

Des progrès sur la transmission mère-enfant

Au cours de cette conférence, des nouvelles plutôt encourageantes devraient néanmoins être annoncées.

La première concerne la transmission du virus de la mère à l’enfant, la TME. L'objectif de l’OMS est que, d'ici à 2015, aucun enfant ne naisse en étant contaminé par le VIH. Il ne sera pas tenuActuellement, près de 400 000 enfants naissent porteurs du virus du sidamajoritairement en Afrique subsaharienne, et quelques dizaines de milliers d’autres vont s’infecter pendant les deux ans de la période d’allaitement.

Pourtant, la situation s’améliore. Des travaux présentés par le Pr François Dabis et son équipe (université Bordeaux-II) montrent qu’en administrant une trithérapie aux femmes enceintes dès la séropositivité détectée, on diminue de façon considérable le risque de contamination sur son futur enfant. Le taux de contamination approche alors 3,5 %, parfois moins. La poursuite de cette trithérapie au cours de l’allaitement limite, là encore de manière considérable, les risques de transmission du virus de la mère à l’enfant. Arriver à cet objectif d’une génération zéro sida est envisageable dans un avenir proche. "Pas en 2015, mais sûrement quelques années plus tard", précise François Dabis.

La circoncision trop peu pratiquée

Le développement de la circoncision en Afrique représente également un progrès. Cette ablation du prépuce réduit en effet le risque pour un homme de contracter le virus du sida à partir d’une partenaire séropositive. Cette réduction atteint 70 % dans certaines études menées en Ouganda, au Kenya et en Afrique du Sud. La circoncision semble également réduire fortement la transmission homme-femme du virus de l’herpès génital en AfriqueIl semble, en revanche, que la partenaire d’un homme séropositif ne soit pas vraiment protégée de l’infection si celui-ci est circoncis.

Malgré tous les effets positifs de cette pratique, seuls 10 % des hommes qui auraient dû être circoncis en Afrique ces dernières années l'ont effectivement été. Un rapport de l'Onusida recommandait en effet la circoncision de 20 millions d'hommes dans l'Afrique du Sud et de l'Est.

Il existe un certain nombre d’obstacles culturels, sociaux et surtout économiques. Car même si la circoncision est une petite opération simple, pratiquée sans hospitalisation, qui pourrait générer 12 milliards d’euros d’économies grâce au nombre d’infections évitées, elle a néanmoins un coût, évalué à 1,2 milliard d'euros. Et par ces temps de crise planétaire, les bailleurs de fonds internationaux traînent des pieds pour respecter leurs engagements. Actuellement, on estime qu'il faudra encore vingt ans pour atteindre les objectifs fixés.

Deux points noirs : l'Europe de l'Est et l'Asie centrale

Si la situation en Afrique s'améliore, elle se dégrade en Europe de l'Est, notamment en Ukraine. La situation en Asie centrale devient également préoccupante. Ces régions sont aujourd’hui quasiment les seules dans lesquelles on constate, chaque année, une augmentation du nombre de contaminations. Cette progression est due en partie aux politiques de criminalisations de l’homosexualité et surtout de la toxicomanie.

En Ukraine, chez les femmes toxicomanes en âge de procréer, la proportion de personnes séropositives est passée de 31 % en 2001 à 60 % en 2009. Dans ce pays, les toxicomanes ont un accès difficile aux soins et aux échanges de seringues. Résultat : le nombre de contaminations augmente, tout comme les coinfections par le virus de l’hépatite C.

Par ailleurs, ces personnes fragiles peuvent également contracter le bacille de la tuberculose. Faute de soins adéquats et en raison de traitements mal conduits, elles développent des souches multirésistantes qui posent un énorme problème de santé publique, bien au-delà des frontières de ces Etats.

Aujourd’hui, on sait à peu près quels sont les obstacles à surmonter pour lutter contre la pandémie liée au virus du sida. Cela fait trente ans qu'il est formellement identifié. Il faudra sûrement encore trente ans pour arriver à s’en débarrasser.

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