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Alexandre Grothendieck, le plus grand mathématicien du XXe siècle, est mort

Il avait 86 ans, vivait reclus dans un village de l'Ariège, sans plus de contact avec l'extérieur depuis une vingtaine d'années. Alexandre Grothendieck laisse quelque 20.000 pages de notes et de courriers, qu'il a interdit de publication.
Article rédigé par Guillaume Gaven
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
  (Alexandre Grothendieck (au centre) en 1970 CC Konrad Jacobs, Erlangen)

Ses pairs le placent au même niveau qu'Albert Einstein ; il a obtenu la médaille Fields en 1966 - l'équivalent du Nobel des mathématiques, dit-on - ; la médaille Emile Picard en 1977, le Prix Crafoord en 1988, créé par l'Académie royale de Suède pour mettre en valeur les disciplines oubliées, justement, par Alfred Nobel.  Alexandre Grothendieck se moque des distinctions, vend au enchères sa première médaille pour financer le Nord-Vietnam en guerre contre les Etats-Unis ; et refuse le prix Crafoord. Comme il l'écrit à l'Académie, il attend le jugement du temps sur ses travaux, pas celui des hommes.

Alexandre Grothendieck s'est éteint hier jeudi, à l'hôpital de Saint-Girons, en Ariège, à l'âge de 86 ans. Pas très loin de Lasserre, le village où il vivait reclus depuis le début des années 1990. Un génie des maths, donc, un grand misanthrope aussi. Qui voulait se faire oublier. Il avait même émis le souhait que l'on ne publie pas les quelque 20.000 pages de notes et de courriers qu'il avait confiées à un ami... Celui-ci les a plutôt remises à l'université de Montpellier.

14 énigmes résolues en six mois

Alexandre Grothendieck naît à Berlin en 1928, d'un père juif anarchiste russe et d'une mère allemande. Ils fuient l'Allemagne en 1933, se réfugient en France, puis partent faire la guerre d'Espagne. Alexandre, pendant ce temps, grandit en France. Son père meurt à Auschwitz, il est interné avec sa mère au camp de Rieucros, près de Mende. Il le raconte dans son autobiographie-fleuve, Récoltes et semailles , consultable en ligne. A la fin de la guerre, il part étudier les maths à Montpellier puis à Paris.

Pour le tester, deux figures de l'époque, Laurent Schwartz et Jean Dieudonné lui confient 14 questions, sur lesquelles ils sèchent. Six mois plus tard, Grotendieck revient, avec les résultats. Et au passage, il a rédigé l'équivalent de six thèses de doctorat... Dix ans plus tard, il devient l'un des piliers de l'Institut des hautes études scientifiques, qui vient d'ouvrir à Bures-sur-Yvette.

Mai 68 passe par là. On le traite de "mandarin", il part en courant del'IHES. Arrive au Collège de France, en repart. Et rejoint la fac de ses débuts, à Montpellier. Il propose de tirer au sort les notes, ou de mettre 20 à tout le monde. Une fois la retraite arrivée, il disparaît aux yeux du monde. Le nom du village pyrénéen restera secret, sauf pour quelques rares amis. Jusqu'à sa mort.

Christophe Sorger, directeur de l'Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions (Insmi) du CNRS, rend hommage à Alexandre Grothendieck

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