La vente de médicaments en ligne retardée par un avis de l'Autorité de la concurrence
L'Autorité juge trop restrictif le projet d'arrêté sur le sujet. Elle veut que le gouvernement aille plus loin.
Autorisée, la vente de médicaments sur internet n'a toujours pas décollé en France. Et l'avis, défavorable, rendu par l'Autorité de la concurrence mercredi 15 mai, ralentit la mise en place du dispositif. L'Autorité a émis cet avis en raison de "l'ensemble important d'interdictions et de restrictions" qu'il contient.
La ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, a rendu une ordonnance le 19 décembre 2012, pour transposer une directive européenne de 2011. Cette dernière autorise la vente de médicaments sur internet, mais laisse la possibilité aux Etats membres de l'encadrer. Le ministère a limité cette vente aux seuls médicaments dits "en accès direct", c'est-à-dire vendus devant le comptoir du pharmacien. Mais, via une décision rendue le 15 février, le Conseil d'Etat a autorisé la vente de tous les médicaments sans ordonnance.
Que dit l'avis de l'Autorité ?
Le ministère de la Santé prône un alignement des prix sur internet et en officine. L'Autorité considère que ces dispositions, "restrictives de concurrence", visent "à limiter le développement de la vente en ligne de médicaments par les pharmaciens français, voire même à dissuader ces derniers d'utiliser ce canal de vente".
En clair, l'Autorité juge que l'alignement des prix irait à l'encontre de l'intérêt du consommateur. En effet, celui-ci pourrait payer plus cher les produits achetés en ligne, à cause des frais de port pour la livraison.
"Il serait regrettable de marginaliser les officines françaises en les privant d'opportunités nouvelles de développement, alors que leurs concurrentes établies dans d'autres Etats membres en bénéficieraient, y compris en servant la demande française", ajoute l'Autorité. "Les Français n'hésitent pas à commander sur des sites hors de France", note Le Monde.
Que préconise-t-il ?
L'Autorité préconise que la "vente en ligne ne soit pas limitée aux seuls médicaments que le pharmacien est autorisé à présenter en accès direct au public, mais soit élargie à l'ensemble des médicaments non soumis à prescription". Selon elle, les pharmaciens devraient également pouvoir proposer médicaments et produits de parapharmacie sur un même site internet.
Quelles sont les réactions ?
L'UFC-Que Choisir a salué, mercredi, l'avis défavorable de l'Autorité de la concurrence. "Le projet d'arrêté a été très clairement piloté en sous-main par les pharmaciens. Sous des prétextes fallacieux de sécurité sanitaire, tout a été fait pour entraver la concurrence et ne pas permettre de baisse de prix", a expliqué Mathieu Escot, en charge des questions de santé pour l'association de consommateurs. Si "l'on y ajoute les frais de port, l'achat en ligne sera forcément plus cher. C'est un vrai coup porté à la concurrence qui ouvrira un boulevard à des ventes depuis des sites étrangers", a-t-il affirmé.
Cet avis va dans le sens de la décision du Conseil d'Etat, qui a permis d'ouvrir le commerce en ligne à environ 3 500 remèdes. Mais le gouvernement, tout comme la présidente du Conseil national de l'Ordre des pharmaciens, joue la prudence. Cette dernière avait jugé, en février, "préoccupant" du point de vue "sanitaire" l'élargissement de la liste des médicaments vendus sur internet.
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