Suppression de l'Aide médicale d'État : la proposition de Bruno Retailleau divise jusqu'au sein de la majorité gouvernementale

Le ministre de l'Intérieur a fait part, lundi, de sa volonté de supprimer l'Aide médicale d'État pour la remplacer par une aide d'urgence pour les étrangers. Une proposition qui suscite la polémique.
Article rédigé par franceinfo
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Un formulaire d'Aide médicale d'Etat, le 11 février 2020. (GARO / PHANIE)

Réduire l'Aide médicale d'État à une aide d'urgence pour les étrangers, c'est la volonté du nouveau ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. Le locataire de Beauvau l'a dit lundi 23 septembre sur TF1 : il compte utiliser son pouvoir réglementaire pour limiter les soins gratuits envers les étrangers en situation irrégulière. Mais ce projet, qui suscite la polémique et qui revient dans le débat public depuis des années, est diversement accueilli à l'Assemblée nationale. Il est même contesté par des membres du camp présidentiel censés soutenir le gouvernement.

Laurent Marcangeli, président des députés Horizon, a fait valoir la position de son groupe dans la salle des quatre colonnes : "Nous sommes opposés à cela. Nous l'avions dit en examen de la loi asile et immigration. Majoritairement, mon groupe est opposé à la suppression, à la modification des dispositifs liés à l'Aide médicale d'État."

"Regarder ce qui se fait dans les autres pays"

Le Premier ministre veut-il faire ça par décret, sans passer par le Parlement ? "Je ne pense pas que ce soit la meilleure idée", commente Laurent Marcangeli. Mais d'autres députés du MoDem ou de Ensemble pour la République sont ouverts à une réduction de l'Aide médicale d'État. À commencer par Mathieu Lefèvre, membre de l'aile droite de Renaissance qui soutient le ministre de l'Intérieur. "Moi, je pense qu'il ne faut pas faire de procès d'intention à Bruno Retailleau. Toutes les questions migratoires doivent pouvoir être étudiées avec pragmatisme, justifie-t-il. Qu'on puisse regarder le panier de soins et regarder ce qui se fait dans les autres pays, à l'étranger... C'est ce qui avait été commandité par Gabriel Attal et Elisabeth Borne à travers le rapport Juvin-Stefanini, et ça me semble tout à fait légitime."

Mais plusieurs élus le concèdent, ce projet ne fait pas l'unanimité au sein du groupe de Gabriel Attal et pourrait même être un casus belli avec l'aile gauche.

"Les virus ne regardent pas les papiers des gens"

Ce projet de réduire l'AME provoque bien sûr une levée de boucliers à gauche. "C'est une absurdité. Les virus ne regardent pas les papiers des gens", s'agace l'insoumise Mathilde Panot, qui pointe les risques sanitaires. L'écologiste Benjamin Lucas dénonce, lui, "un racisme d'atmosphère et une mesure qui ne réglera pas les problèmes financiers."

Le socialiste Arthur Delaporte voit dans cette proposition la preuve que la droite "dure" est arrivée au pouvoir : "Si le gouvernement veut revenir là-dessus, malheureusement, ce sera le chemin du Rassemblement national. Mais c'est aussi ce que dit la droite dure depuis le début. Il faut rappeler quand même que Bruno Retailleau est l'un des grands responsables du vote, en décembre dernier, d'une loi qui a été censurée majoritairement par le Conseil constitutionnel."

La gauche crie aussi au détournement du débat public. Ce serait "incongru et scandaleux" que le Gouvernement réforme un tel sujet par décret, estime Arthur Delaporte, qui réclame donc un débat au Parlement.

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