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Don du sang interdit aux homosexuels : "Pour nous, ce n'est pas un droit, c'est un acte civique"

Le Comité national consultatif d'éthique s'est prononcé, mardi, contre la levée de l'interdiction qui empêche les hommes homosexuels de donner leur sang en France. L'association SOS Homophobie explique pourquoi elle juge cette mesure discriminante.

Article rédigé par Ariane Nicolas - Recueilli par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
En France, le don du sang est interdit aux toxicomanes par injection, aux transfusés et aux hommes homosexuels. (WINFRIED ROTHERMEL / AFP)

Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) se positionne contre l'avis du gouvernement. Les homosexuels masculins devraient continuer à être exclus du don du sang en France en l'état actuel des connaissances, selon un avis rendu mardi 31 mars par le CCNE. "Le don du sang n'est pas un droit. Ce qui prime, c'est la santé et la protection du receveur", a résumé Jean-Claude Ameisen, président du CCNE. Le nombre de nouveaux cas d'infections par le VIH est 200 fois plus élevé chez les hommes qui ont eu, au cours des douze derniers mois, des relations sexuelles avec d'autres hommes, estime le Comité.

Cet avis, qui n'a rien de contraignant pour l'exécutif, va à l'encontre des engagements de François Hollande en 2012. Il scandalise les associations de défense des droits des homosexuels, parmi lesquelles SOS Homophobie. Francetv info a interrogé son président, Yohann Roszéwitch.

Francetv info : Le Comité d'éthique vient de rendre un avis négatif sur l'ouverture du don du sang aux homosexuels. Comment avez-vous accueilli la nouvelle ?

Yohann Roszéwitch : Nous sommes très déçus par cet avis, même s'il nous surprend assez peu de la part d'une institution habituellement conservatrice. Il y a quinze jours encore, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, s'exprimait en faveur de la levée de l'interdiction et laissait penser que l'avis serait positif. On espère que le gouvernement ne suivra pas les préconisations du CCNE, et qu'il tiendra plutôt les promesses effectuées par François Hollande pendant la campagne présidentielle.

Pourquoi êtes-vous autant attaché à ce droit ?

Pour nous, ce n'est pas un droit. C'est un acte civique et moral. L'Etablissement français du sang le présente d'ailleurs comme ça, quand il parle, par exemple, de pénurie de sang. C'est une humiliation pour les homosexuels qui se voient refuser de donner leur sang, alors qu'ils n'ont pas pris de risque. Si un homosexuel prend un risque, il ne va pas donner son sang.

L'infectiologue Jean-Louis Vildé, membre du CCNE, insiste sur le fait qu'aucune augmentation de risque n'est "acceptable". Que lui répondez-vous ?

Il y a effectivement un taux de prévalence supérieur chez les homosexuels, c'est indéniable. On ne veut pas nécessairement que tout le monde puisse donner son sang : une personne qui prend un risque ne doit pas pouvoir le faire. Mais celui qui n'en prend pas doit pouvoir donner son sang, quelle que soit son orientation sexuelle. Les homosexuels n'ont pas tous les mêmes pratiques. Si un homosexuel est abstinent ou en couple stable, il ne présente pas plus de risques qu'un hétérosexuel.  

Accepteriez-vous que l'autorisation de donner son sang pour les homosexuels soit assortie de conditions ?

C'est déjà le cas pour les hétérosexuels ! Il existe une période d'exclusion de quatre mois en cas de pratique à risque. N'oublions pas que tous les échantillons sont testés. La "fenêtre de risque" est de douze jours entre le prélèvement de sang et le test VIH. Nous souhaitons simplement que cette disposition soit ouverte aux homosexuels. Aujourd'hui, il suffit qu'un homme ait eu une relation avec un autre homme il y a vingt ans pour être exclu du dispositif. Or, si le risque a été pris il y a aussi longtemps, il est tout à fait détectable. 

Ce refus vous donne-t-il l'impression que la parole des homosexuels est davantage sujette à caution ?

L'interdiction de donner son sang les stigmatise et les assimile à la séropositivité. De même que tous les séropositifs ne sont pas homosexuels, tous les hétérosexuels ne sont pas à l'abri du virus. Certains gays ne savent pas qu'ils n'ont pas le droit de donner : ils y vont de bonne foi et se voient refuser cet acte, ce qui est d'autant plus humiliant. Dans un contexte de libération de la parole homophobe, cette interdiction ne fait que donner raison aux personnes qui affichent une homophobie décomplexée. L'homophobie est installée en France, d'où l'importance pour le pouvoir politique de tenir ses promesses.

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