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Quatre questions sur les dangers méconnus des tampons hygiéniques

Le documentaire "Tampon, notre ennemi intime", diffusé mardi sur France 5, revient sur les risques liés à l'utilisation de ces protections périodiques.

Article rédigé par Elise Lambert
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7min
Des résidus potentiellement toxiques ont été retrouvés dans des tampons, selon une étude de "60 Millions de consommateurs" publiée en février 2016.  (MAXPPP)

"C'est un choc qui a bouleversé ma vie." Dans le documentaire Tampon, notre ennemi intime, diffusé mardi 25 avril sur France 5, plusieurs femmes témoignent de leur combat contre le syndrome du choc toxique (SCT), une infection liée à l'utilisation de tampons hygiéniques, pouvant provoquer la mort.

En France, le nombre de cas recensés de SCT augmente chaque année. Cinq cas ont été signalés en 2004, 19 en 2011 et 22 en 2014, sans qu'aucune réglementation plus stricte soit imposée aux fabricants de tampons, note Libération. En 2016, une étude de 60 Millions de consommateurs a pointé la présence de résidus "potentiellement toxiques" dans ces produits, comme des dioxines. De quoi se poser de sérieuses questions sur les tampons. Franceinfo fait le point. 

1Quel est le principal risque lié à l'utilisation des tampons ?

Epuisement brutal, forte fièvre, impression d'avoir la grippe ou une
gastro-entérite… Le principal risque lié au tampon est le syndrome du choc toxique. Il peut potentiellement toucher 1% des femmes, celles qui sont porteuses de la bactérie staphylocoque doré dans leur vagin, explique Le Monde.

Environ "20 à 30% des femmes sont porteuses de cette bactérie" à un moment de leur vie, sans que cela représente un danger particulier, explique la journaliste Audrey Gloaguen dans son documentaire Tampon, un ennemi intime. La plupart du temps, les individus porteurs de cette bactérie ne s'en aperçoivent pas car le staphylocoque est combattu naturellement par les anticorps, détaille L'Express.

Or, le tampon permet à une variété particulière du staphylocoque doré de se développer : "Le fluide menstruel est bloqué, il va rester au chaud, pointe le microbiologiste Gérard Lina, dans Le Monde. C’est donc un milieu de culture formidable, et s’il y a cette fameuse bactérie, elle va se mettre à produire une toxine (TSST-1) qui va passer dans le sang." Une fois dans le sang, la toxine peut provoquer un choc toxique et, en cas de traitement trop tardif, entraîner la mort ou l'amputation de certains membres.

2Leur composition est-elle aussi mise en cause ?

Si l'utilisation du tampon peut être dangereuse chez certaines femmes, la composition même de ce produit présente des risques. En février 2016, une étude du magazine 60 Millions de consommateurs a relevé la présence de substances toxiques dans les tampons et protections féminines. Sur trois types de tampons analysés, tous contiennent des résidus toxiques comme des dioxines et des dérivés halogénés (dérivés du brome, de l'iode ou du chlore). 

>> Quels produits toxiques trouve-t-on dans les tampons et serviettes hygiéniques ?

Les dioxines sont des composés chimiques issus de processus industriels. Elles sont définies par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) comme "des polluants organiques persistants dans l'environnement". Très toxiques, classées cancérigènes, elles font partie des perturbateurs endocriniens et peuvent provoquer des problèmes de procréation, des troubles du développement, léser le système immunitaire, interférer avec le système hormonal et causer des cancers, selon l'OMS. 

La toxicité des dérivés halogénés n'a pour l'instant pas été établie. Mais, étant irritants, "leur présence reste indésirable", note 60 Millions de consommateursMême si les niveaux sont faibles, "faut-il rappeler que les femmes portent ces articles en moyenne cinq jours par mois pendant environ quarante ans ?" s'interroge le magazine. Soit 2 400 jours, ou six ans et demi, dans la vie d'une femme.

D'autres perturbateurs endocriniens ont été retrouvés dans certains voiles et matières absorbantes du tampon : le DEHP, un cancérigène interdit en Europe dans les jouets et les cosmétiques, ou encore le glyphosate, une molécule utilisée dans le désherbant Roundup, détaille Le Monde.

Selon le toxicologue belge Dominique Lison, interviewé dans le documentaire d'Audrey Gloaguen, les dioxines pourraient aussi jouer un rôle dans l'apparition de l’endométriose, une maladie qui endommage le système reproducteur féminin.

3Qui encadre la production des tampons ?

Aujourd’hui, en Europe, aucune réglementation n’oblige les fabricants de tampons à communiquer les composants exacts de leurs produits. Ceux-ci entrent dans la catégorie des "produits de consommation classique". "Les règles étant un phénomène physiologique normal, les protections périodiques ne sont pas considérées comme des dispositifs médicaux", explique Libération. Dans le cas contraire, les fabricants seraient obligés de donner leur composition exhaustive.

En juin 1999, la Commission européenne a même laissé les fabricants établir leurs propres règles concernant la sécurité de ces protections hygiéniques, assure le documentaire Tampon, un ennemi intime. L'eurodéputée écologiste Michèle Rivasi a alerté la Commission européenne en février 2016, afin qu'une réglementation sur la sécurité de ces produits soit établie. "J'ai reçu une réponse du genre 'circulez y'a rien à voir'", témoigne-t-elle dans le documentaire.

4 Peut-on espérer des avancées ?

Quelques progrès ont été annoncés. En août 2016, en France, le secrétariat d'Etat à la Consommation a lancé des tests sur plusieurs marques de tampons. Ils ont révélé la présence de substances cancérigènes et de dioxines. Les données ont été transmises à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) afin d'évaluer les risques et d'établir des mesures de sécurité, attendues "à l'été" 2017, détaille le film.

Le géant américain Procter & Gamble, producteur de tampons sous la marque Tampax, avait aussi annoncé, en janvier 2016, qu’il dévoilerait au printemps la composition exacte de ses produits. En réalité, selon Libération, il "va juste afficher sur l’emballage les bribes d’informations déjà présentes dans la notice".

Mais certains spécialistes soulignent que les changements prennent du temps en raison d'un facteur culturel : "Les fabricants ont bâti leur stratégie sur une arme absolue : le tabou autour des règles, expose Chris Bobel, professeure en études féminines à l'université de Boston (Etats-Unis), à Audrey Gloaguen. Les femmes qui ont leurs règles sont si désireuses de cacher leurs menstruations qu'elles ne regardent même pas ce qu'il y a dans les produits qu'elles utilisent." Un silence que les industriels ne se priveraient pas d'exploiter.

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