Et si certains boulots ne servaient à rien ? C’est l'anthropologue britannique David Graeber qui a posé cette question, en appelant ces emplois les "bullshit jobs", que l'on peut traduire par "jobs à la con". Selon sa théorie, nous avons créé beaucoup d’emplois qui n’ont pas vraiment de sens, en tout cas qui n’apportent rien de positif à la société.Après le "burn-out", le "brown-out"Il y a désormais un terme pour qualifier cette absence de sens : après le "burn-out", trop de travail, et le "bore-out", trop peu de travail, on nomme ce phénomène "brown-out" : quand ce qu’on accomplit n’a aucune utilité. Ces bullshit jobs ont d’ailleurs colonisé quasiment tous les domaines, jusqu’aux ministères. Un ancien conseiller de la ministre du Travail Myriam El Khomri écrit : « Les tableaux Excel nous ont fait oublier l’essentiel : la mission de service public ».Pour le philosophe canadien Alain Deneault, c’est surtout l’organisation actuelle du monde du travail qui est en cause : «On dit à des salariés : 'voilà, vous allez vous conformer à une stratégie qui a pour visée de satisfaire des actionnaires avec des stratégies très dures', et on se retrouve à faire n’importe quoi, des taches tout à fait absurdes. Vous avez un ingénieur qui va confectionner un matériau qui est destiné à se briser, des pharmacologues qui vont concevoir des médicaments pour des maladies imaginaires, mais pas pour des vrais malades qui n’ont pas les moyens ».Que faire pour lutter contre ? D’après David Graeber, il faut donner aux gens la possibilité d’effectuer des taches qu’ils jugent socialement utiles. Il évoque deux pistes : l’instauration d’un revenu universel, versé chaque mois à tous et sans conditions, ou encore la diminution du temps de travail.