Urgences : "La moitié des passages relève de la médecine de ville"
Avec plus de vingt millions de passages en 2015, les services d'urgence sont saturés. Selon la Fédération des Médecins de France, de nombreux patients pourraient être traités en ville. En effet, la majorité des passages aux urgences ont en effet lieu entre 8 heures et 20 heures et ne donnent pas lieu à une hospitalisation. Les explications du Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France.
- Pourquoi faut-il limiter l'accès aux urgences ?
Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF : "Au moins la moitié des passages aux urgences relève de la médecine de ville. J’ai monté une maison médicale intercommunale à Clamart. Pendant que la maison médicale de garde est en sous activité, les gens à l’hôpital Béclère à côté attendent 3, 4, 5 heures. Il y a un mode de fonctionnement qui est totalement anormal. Il faut réorganiser le système de soins, supprimer la concurrence entre la ville et l’hôpital… Ça coute 3 milliards à la collectivité. Cette somme serait utile pour réorganiser le système de soins."
- On manque de médecins généralistes dans certains territoires. Est-ce possible de leur demander de prendre en charge en plus certains patients, à la place des urgences ?
Dr JP Hamon : "C’est tout à fait antinomique. C’est pour cela qu’il faut réformer le système de soins. J’avais proposé qu’on supprime la concurrence entre la ville et l’hôpital, en supprimant la dette hospitalière qui est de 29 milliards d’euros. Nicolas Revel, le directeur de la caisse, m’a envoyé un SMS en me disant « zéro chance ». Sauf que trois jours plus tard, Emmanuel Macron disait qu’on allait annuler la dette de la SNCF de 49 milliards pour modifier les statuts. Ce n’est pas plus idiot de supprimer la dette hospitalière pour supprimer la concurrence et réorganiser le système de soins. Il faut faire en sorte que l’hôpital collabore réellement avec la ville, cesse de vouloir s’externaliser pour être rentable avec la fameuse tarification à l’acte. Il faut aussi donner aux libéraux les moyens d’exercer. Il y a en moyenne 0,3 salarié par médecin. Nous demandons d’avoir un secrétariat, des locaux corrects pour accueillir les patients. Il faut que les soins non programmés soient valorisés pour que les médecins soient encouragés à le faire. Il faut faire connaître la médecine libérale aux internes, à condition qu’on ne soit pas harcelé par la caisse pour des prescriptions d’arrêts de travail…"
- Les patients vont aussi aux urgences car ils n'ont rien à débourser, contrairement à une consultation chez le médecin généraliste. Comment les inciter à aller d'abord consulter en ville ?
Dr JP Hamon : "85% des passages aux urgences se font aux heures d’ouverture des cabinets médicaux. Quand j’ai entendu la ministre de la Santé dire que les urgences sont débordées car la permanence des soins des libéraux n’est pas organisée, je me suis dit qu’il faut qu’elle change de conseillers. Seuls 15% des passages aux urgences se font aux heures de garde. Ce n’est pas à ce moment-là que les urgences sont débordées, c’est en journée. Dans la maison médicale que j’ai montée il y a 14 ans, j’ai demandé tout de suite qu’il y ait le tiers payant pour les urgences pour que les patients n’aient pas peur de venir. Cela fait 14 ans que je le réclame, je n’ai jamais pu l’obtenir."
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