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Perturbateurs endocriniens : la Commission européenne vote sa définition pour mieux les encadrer

La Commission européenne vote, mardi, une définition des perturbateurs endocriniens. L'enjeu de ce vote porte sur le "niveau de preuve" de leur dangerosité pour Rémy Slama, épidémiologiste environnemental à l’INSERM, interrogé sur franceinfo.

Article rédigé par franceinfo
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La Commission européenne à Bruxelles, le 30 novembre 2011. (Photo d'illustration) (MAXPPP)

La Commission européenne vote à nouveau ce mardi 28 février une définition à donner aux perturbateurs endocriniens, ces substances chimiques présentes presque partout dans l’environnement (pesticides, cosmétiques, matières plastiques) et susceptibles de modifier notre système hormonal. Depuis quatre ans, les États membres et les scientifiques cherchent à définir ces additifs chimiques pour les encadrer.

Au cœur du débat, c’est le "niveau de preuve" exigé qui pose problème, a expliqué mardi sur franceinfo Rémy Slama, épidémiologiste environnemental à l’INSERM. Le Parlement et certains États membres dont la France sont dans une "logique d’exposition zéro" et donc une interdiction de ces produits chimiques, a-t-il indiqué.

franceinfo : Pourquoi est-ce-qu'il est si difficile de définir les perturbateurs endocriniens ?

Remy Slama : Tout le monde s'accorde sur la définition proposée depuis le milieu des années 90 et validée par l'OMS au début des années 2000.

Cette définition nous dit qu’un perturbateur endocrinien est une substance qui va altérer le fonctionnement de notre système hormonal, et par là, causer une maladie dans l’organisme ou la descendance

Rémy Slama, épidémiologiste environnemental à l'Inserm

à franceinfo

Mais, tout ce qui est autour de cette définition fait débat entre la Commission européenne et les Etats membres. Notamment le niveau de preuve qu’on va exiger avant de pouvoir reconnaître une substance comme un perturbateur endocrinien.

Quel est le niveau d’exigence demandé ?

Il faut qu’on démontre que la substance est un perturbateur endocrinien pour que le pesticide soit interdit. Alors que pour les autres dangers sanitaires, par exemple les cancérigènes, il suffit que la substance soit avérée ou présumée. Et c’est ce terme de "présumé" que certains Etats membres dont la France souhaitent voir introduit. Donc exiger un niveau de preuve qui ne soit pas l’absolue certitude. Une preuve présumée permettrait d’être plus rapide pour identifier les substances dangereuses dans notre environnement.

Faut-il interdire ces dangers ou peut-on les accepter jusqu'à une certaine dose ?

Pour les dangers les plus préoccupants, la logique réglementaire posée par le Parlement européen, c’est de ne prendre aucun risque. On préfère aller vers une logique d’exposition zéro. Une substance qui perturberait ce système endocrinien peut être active à de très faibles doses. Pour ces raisons-là, il est probable que le Parlement ait choisi de dire que pour les perturbateurs endocriniens dans les pesticides "on va vers une logique d’exposition zéro".

N’est-il pas trop tard, finalement, pour interdire ces substances chimiques?

Il est clair qu’on a tous dans notre organisme des centaines de substances exogènes, dont un certain nombre d’entre elles sont des perturbateurs endocriniens. Ce qui est préoccupant, c’est que certaines d’entre elles sont très persistantes, donc on va avoir du mal à s’en débarrasser. Les femmes enceintes vont les transmettre à leurs enfants pendant l’allaitement - ce qui ne veut pas dire que ce n’est pas bien d’allaiter.

On a tous ces produits chimiques en nous. Maintenant, tous ne sont pas persistants.

Rémy Salma, épidémiologiste environnemental à l'Inserm

à franceinfo

Il est clair que si on interdit une substance, on va réussir à baisser les niveaux. On a interdit le plomb dans l'essence, dans la peinture, et on voit baisser les taux de saturnisme de manière spectaculaire.

Remy Salma : "Ce qui est préoccupant, c’est que certaines d’entre elles sont très persistantes"

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