USA : contre l'obésité, des médecins dans les supermarchés
Les clients de chez Ralphs, supermarché de la petite ville d'Irvine, dans le comté d’Orange (sud de la Californie) s’attendaient certainement à trouver, comme d'habitude, les bonnes affaires du jour en tête de gondole. Mais, ce lundi 28 novembre 2016, ce sont sur des blouses blanches qu'ils sont tombés.
Des médecins et des infimières du St Joseph Hoag Health, un système d’offre de soins californien, qui regroupe des hôpitaux et des cabinets médicaux de ville. Pour la troisième année consécutive, ils mènent le projet "Shop with your doc" ("Fais tes courses avec ton médecin"). Le but : venir à la rencontre des habitants et les inciter à faire de meilleurs choix alimentaires.
Le besoin de changement est criant : comme le reste du pays, la région est touchée de plein fouet par l'épidémie d'obésité. "Environ 20% de nos adolescents sont en surpoids ou obèses. Chez les adultes, ce chiffre atteint 60%, déplore le Dr Marina Sarwary, un des médecins nutritionnistes présents. Ce sont autant de risques d’hypertension, de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires."
Au cours de l’opération, commencée en octobre dernier et qui s’est achevée fin novembre, les soignants se sont rendus dans une dizaine de supermarchés du comté. "La prévention est la clé. La prescription de médicaments ne peut pas être la seule réponse", ajoute Monica Doherty, infirmière praticienne (habilitée à diagnostiquer et prescrire aux USA, ndlr).
"J'évite les médecins, d'habitude"
Jai est volontaire pour "Shop with your doc". Il aborde avec une jovialité toute californienne les clients à l’entrée du magasin et dans les rayons. Ce grand gaillard d'une quarantaine d'années n'est pas médecin, mais il a ses raisons pour être là.
"Avant je mangeais mal. Je sais, d’expérience, que des petits ajustements dans la façon de manger peuvent avoir de grands effets. Pendant des années, je ne buvais que du soda. J’ai ressenti les bienfaits immédiatement quand j’ai arrêté." Jai offre à tous les clients un sac en tissu contenant de la documentation et des verres doseurs. "Je leur dis que s’ils s’en servent, c’est bon signe : ça veut dire qu’ils cuisinent", s’amuse-t-il. Ils sont ensuite libres de parler aux professionnels de santé et de faire mesurer leur tension artérielle. Certains s’échappent le plus vite possible, alors que d’autres, sitôt la surprise passée, profitent de l’opportunité.
Joe, 51 ans, hésite un peu avant de relever sa manche. Il fréquente assez peu les médecins. "Je les évite à tout prix : ils me terrifient", lâche-t-il. "Aller dans les supermarchés de quartiers plus ou moins défavorisés, c’est l’occasion pour nous de toucher des personnes qui, pour des raisons financières ou autres, ne consultent pas assez souvent, voire jamais, et n’ont pas toujours de bonnes connaissances en matière de nutrition. Nous sommes souvent très bien accueillis", explique le Dr Marina Sarwary.
Tour du magasin et coups d'œil dans les caddies
Les médecins et infirmiers passent aussi dans les rayons pour proposer, sans imposer, des éclaircissements sur les produits. Notamment sur les étiquetages et labels, particulièrement trompeurs aux Etats-Unis, ou encore sur l'importance de choisir certains aliments bios. Quand elle repère des fruits et légumes dans les paniers, Monica Doherty n'est pas avare en compliments. "C’est ce qu’on appelle le renforcement positif. Féliciter et encourager les patients à continuer sur la bonne voie est très constructif", assure-t-elle.
Le caddie de Randy, 50 ans et en net surpoids, ne soulève pas le même enthousiasme. "J’ai pris 25 kilos en 5 mois", confie-t-elle au Dr Sarwary. Le médecin lui parle de la stratégie de l'alternative alimentaire : "Remplacer, petit à petit, le soda par de l'eau gazeuse, par exemple, peut tout changer". Randy se dirige vers la caisse avec la carte de la nutritionniste. Elle a promis de l’appeler, après avoir vérifié que son régime d'assurance pourrait couvrir la consultation. Le médecin, elle, se dirige déjà vers un autre client.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.