"On ne peut pas en permanence se protéger": l’épidémie de dengue à la Réunion explose avec 900 cas par semaine
L'épidémie a démarré l'an dernier et a déjà touché plus de 40 000 personnes.
La Réunion est en proie à une nouvelle épidémie : après le chikungunya il y a presque 15 ans, c’est désormais la dengue qui frappe l’île. Les autorités sanitaires l'ont placée en alerte de niveau 4 sur 5 pour cette maladie surnommée la "grippe tropicale". Déjà plus de 40 000 cas ont été recensés depuis le début de cette épidémie l’an dernier. Ces dernières semaines, le nombre de malades explose avec 900 cas par semaines.
Fièvre, fatigue et transpiration
À l’hôpital de Saint-Pierre, dans le sud de l’île où se trouve le principal foyer de l’épidémie, Jacky reçoit la visite de sa femme et ses enfants. Ce quinquagénaire est hospitalisé depuis 24 heures à cause de la dengue. "C'est beaucoup de fièvre, on ressent une douleur dans l'œil, mais aussi des défaillances musculaires sur les doigts, des crampes et énormément de transpiration." Jacky dit se sentir faible. "On sent que ça ne va pas", affirme-t-il. Désormais, dans le sud de l'île où il vit, Jacky ne croise plus ses voisins au marché, mais à l’hôpital. "J'ai deux copains qui sont arrivés, je leur ai dit 'le monde est petit', rigole-t-il.
L’hôpital a dû ouvrir des lits supplémentaires, explique le docteur Rodolphe Manaquin, du service des maladies infectieuses. "On a vu des formes parfois un peu plus sévères d'autres maladies comme des infections urinaires ou pulmonaires qui, parfois associées à la dengue, nécessitent une hospitalisation. Tout ça fait une augmentation d'activité qu'il faut pouvoir assumer", explique-t-il.
On est encore en phase d'augmentation, on n'a pas encore atteint le pic dans cette épidémie de dengue
Rodolphe Manaquin, médecin à l'hôpital Saint-Pierreà franceinfo
Même si le pic n'est pas atteint, le nombre de cas explose. Paris a bien envoyé des renforts de la protection civile pour lutter contre les moustiques, vecteurs de la dengue. La Croix-Rouge, l’Agence régionale de santé multiplient les opérations de prévention, mais difficile de sensibiliser la population. Comme Jacky, de nombreux Réunionnais ne se protègent pas avec de l’anti-moustique. "Ma femme se protège, elle me dit 'il faut en mettre un peu sur toi'. Mais mettre tous les jours, non... les moustiques sont partout", avance comme excuse Jacky.
"C'est presque devenu commun, la dengue"
Son gendre Stéphane acquiesce. Il a déjà eu le chikungunya il y a quelques années et vient d’avoir lui aussi la dengue. "Nous, après 10 jours de pluie, on est infestés de moustiques, on ne peut pas en permanence se protéger, ce n'est pas possible. C'est presque devenu commun la dengue, en fait. On n'a pas pris le problème assez tôt et assez vite au sérieux", assume Stéphane, qui en a pourtant déjà fait les frais.
Le moustique est un ennemi presqu’invisible et redoutable, face à des habitants las et fatalistes. Le cocktail pourrait bien faire exploser cette épidémie, selon le docteur Rodolphe Manaquin. "Les gens ont connu le chikungunya. Là, ils connaissent la dengue et savent que c'est un mauvais moment à passer, explique le médecin. On a cinq cas de décès, on n'est pas sur une mortalité très élevée. Mais quid de l'évolution, si on passe à 1 500 ou 2 000 cas par semaine ? Ça va être compliqué...", prédit-il.
L'épidémie d'autant plus compliquée qu'il n’existe pas de remède spécifique à la dengue. Il faut seulement attendre que le mal passe,en donnant éventuellement du paracétamol et en réhydratant les patients les plus gravement atteints.
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