L'Ice Bucket Challenge fait avancer la science
Il y a deux ans, le phénomène était devenu viral, surtout lorsque des "people" comme Britney Spears, Justin Timberlake, Bill Gates ou encore David Beckam s'étaient pris au jeu. Tout ce beau monde se renversait ou se faisait renverser un seau d’eau bien glacée sur la tête devant une caméra. Le Ice Bucket Challenge ("défi du seau d'eau glacée") ne relevait pas du pur masochisme, mais visait à médiatiser la lutte contre la sclérose latérale amyotrophique (SLA), également appelée maladie de Charcot. Le but était aussi de collecter des fonds contre cette maladie, les participants frigorifiés s’engageant à faire un don pour la cause.
Les vaillants donateurs n'auront pas grelotté pour rien. L'association américaine ALS, qui a collecté la plupart des dons, a reçu 115 millions de dollars (105 millions d’euros environ) grâce à la rafraîchissante initiative. Dans un communiqué, l’association a annoncé que l’argent récolté avait permis d’identifier un nouveau gène lié à la SLA. Et donc une nouvelle cible potentielle pour le développement de thérapies. Les résultats de cette avancée ont été publiés dans la revue scientifique Nature Genetics.
Un gène muté sur-représenté chez les malades
La SLA est une maladie neurodégénérative qui touche les cellules nerveuses dans le cerveau et la moelle épinière. Elle mène progressivement à une paralysie totale et à la mort, habituellement dans un délai de deux à cinq ans suivant le diagnostic. 10% des formes de SLA sont familiales (et donc génétiques). Les 90% restants sont considérés comme sporadiques, ou sans antécédents familiaux. Cependant, il est très probable que la génétique contribue, directement ou indirectement, à un pourcentage beaucoup plus élevé de cas.
Les fonds réunis grâce au Ice Bucket Challenge ont profité à plusieurs projets, dont une initiative internationale du nom de MinE, qui a réuni 80 chercheurs de 11 pays. Le séquençage du génome de familles et de personnes atteintes de la SLA a permis de constituer de grandes banques de données et de "repérer" le gène NEK1, associé avec un grand nombre de cas. Une découverte "significative", selon l’association.
NEK1 a été découvert grâce à la recherche de gènes à risque dans plus de 1000 familles. Et il a été retrouvé indépendamment et par des moyens différents dans une population isolée aux Pays-Bas. Une analyse plus approfondie de plus de 13.000 individus atteints de SLA sporadique a aussi révélé une sur-représentation de mutations de ce même gène. Les mutations découvertes pour ce gène sont liées à une perte de sa fonction. Or, NEK1 est connu pour avoir des rôles multiples dans le bon fonctionnement du neurone. Ses mutations sont donc liées à un risque accru de SLA. C’est ce qu’on appelle un gène de susceptibilité.
Dans le cas de ce projet, c’est l’ampleur des moyens mis en œuvre qui a porté ses fruits. "La découverte de NEK1 met en évidence la valeur du « big data » dans la recherche de la SLA", a déclaré Lucie Bruijn, une des responsables du projet. "L'analyse génétique sophistiquée qui a conduit à cette conclusion a été possible grâce au grand nombre d'échantillons SLA disponibles", a-t-elle ajouté.
Comprendre le rôle de NEK1 dans la maladie fournira une nouvelle cible importante pour le développement de thérapies. Ces travaux améliorent la connaissance de la maladie, pour laquelle, à ce jour, aucun traitement n’existe.
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