Grands prématurés : des risques plus importants de troubles psychiques ?
De nombreuses études publiées depuis le début des années 1990 suggèrent qu’une extrême prématurité augmente le risque ultérieur de développer divers troubles psychiques (troubles du spectre autistique, hyperactivité…). Des chercheurs canadiens viennent de procéder à une analyse critique des études les plus importantes sur le sujet, menées dans une douzaine de pays développés (d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Océanie), afin de déterminer si le phénomène est réellement significatif.
Au total, 41 travaux impliquant un total de 2.712 individus nés avec un très faible poids à la naissance (moins d’un kilogramme à la naissance, du fait d’une importante prématurité) et 11.127 témoins de poids normal ont été pris en compte.
L’analyse confirme que, comparés à des bébés (nés dans des familles de même niveau socio-économique) de poids normal, ceux présentant un très faible poids à la naissance présentaient un risque accru "de développer certains problèmes de santé mentale, dès l'enfance, et au moins jusque dans leur trentaine". Les chercheurs insistent sur le fait que ce sur-risque est un constat épidémiologique, et que tous les enfants prématurés ne développent évidemment pas les troubles identifiés.
A noter, en outre, que les résultats concernent essentiellement des données rapportées par les parents, et non de stricts diagnostics de psychologues ou de psychiatres, ce qui constitue un potentiel biais d’interprétation des résultats.
Troubles de l'attention et dépression
Un très faible poids à la naissance apparaît augmenter le risque de présenter un déficit de l'attention avec hyperactivité, dans l’enfance comme dans l’adolescence [1]. À l’âge adulte, la probabilité de manifester de l’anxiété ou de souffrir de dépression est également accrue, ainsi que celle de présenter "des niveaux significativement inférieurs de fonctionnement social"[2]. Un sur-risque de présenter des troubles du spectre autistique est également rapporté [3].
Les chercheurs constatent que ce sur-risque existe indépendamment de troubles neurosensoriels pouvant résulter d’une extrême prématurité (paralysie cérébrale, cécité…). Ils observent en outre que les données sont globalement similaires quelles que soient les pays dans lesquels ont été menés les études.
Le constat étant posé, les chercheurs se veulent précautionneux dans leurs interprétations. Selon Karen Mathewson, cosignataire des travaux, ce sur-risque pourrait témoigner de "[certaines] réponses biologiques à des conditions prénatales difficiles, mais aussi à des stress postnataux en lien avec la naissance précoce". Les mécanismes en jeu restent indéterminés.
Mais pour la chercheuse, ces résultats montrent surtout "la nécessité de continuer à fournir des services à ces personnes tout au long de leur vie". "Il est important [de rester] conscient des potentiels problèmes de santé mental qui peuvent émerger chez [les personnes nées avec un] très faible poids à la naissance".
la rédaction d’Allodocteurs.fr
Méta-analyse : Mental Health of Extremely Low Birth Weight Survivors: A Systematic Review and Meta-Analysis. K. Mathewson et al. Psychological Bulletin, 13 fév. 2017.
[1] Sur-risque de TDAH rapporté par les parents estimé entre +20% et +44%.
[2] Sur-risque de mention de problèmes sociaux par les parents estimé entre +39% et +69%.
[3] Sur-risque de mention de troubles du spectre autistique estimé entre +17% et +71%.
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