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Vaccination obligatoire contre le Covid-19 : comment l'idée fait son chemin en Europe et dans le monde

La "cinquième vague" de la pandémie pose à nouveau la question d'une mise en place de l'obligation vaccinale pour toute la population.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Face à une reprise épidémique et à l'arrivée du variant Omicron, la question de l'obligation vaccinale se pose à nouveau. (PASCAL BACHELET / BSIP VIA AFP)

La vaccination contre le Covid-19 va-t-elle devenir obligatoire pour tout le monde ? La question se pose sérieusement dans plusieurs pays de l'Union européenne, épicentre de la cinquième vague de la pandémie. En France, Emmanuel Macron disait ne pas croire à cette option dans une interview accordée à Brut en décembre 2020. Mais un an plus tard, 22,4% de la population n'a reçu aucune dose, selon la plateforme Covidtracker, et l'arrivée du variant Omicron fait craindre une plus grande contagiosité et une plus forte résistance aux vaccins.

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Dans ce contexte, l'Union européenne s'interroge sur la nécessité d'une obligation vaccinale, même si elle est jugée excessive et peu pratique. "Une discussion (...) doit avoir lieu", a ainsi estimé Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, mercredi 1er décembre. Franceinfo fait le tour des pays qui l'envisagent ou qui l'ont déjà mise en œuvre.

L'Allemagne et l'Autriche l'ont déja prévue

C'est une grande première. En Autriche, le gouvernement a décidé de rendre la vaccination obligatoire à partir de février prochain. A cette date, les Autrichiens qui refuseront de se faire vacciner seront passibles d'une amende pouvant aller jusqu'à 7 200 euros, révèle le quotidien Die Presse (en allemand). Le projet de loi est actuellement en discussion afin de décider comment cette obligation vaccinale pourra être mise en œuvre en vertu du droit constitutionnel. Seules les personnes qui bénéficient d'une contre-indication en seront exemptées.

En Allemagne, le futur gouvernement de coalition envisage lui aussi d'inscrire cette mesure dans son programme. "Trop de gens ne se sont pas fait vacciner", a ainsi déclaré le social-démocrate Olaf Scholz, qui va succéder la semaine prochaine à Angela Merkel. Le futur chancelier allemand, qui s'était opposé à la vaccination obligatoire pendant la campagne électorale, souhaiterait que cette obligation soit adoptée par le Parlement avant la fin de l'année, pour une mise en œuvre au 1er février ou au 1er mars au plus tard.

Plusieurs pays l'ont déjà imposée

Hors des frontières européennes, quelques pays ont sauté le pas depuis l'arrivée sur le marché des vaccins contre le Covid-19. En Indonésie, depuis janvier, la vaccination est donc obligatoire. Mais à cause d'un déficit de doses disponibles, à peine 35% de la population a reçu un schéma vaccinal complet à la date du 21 novembre, selon la plateforme OurWorldinData.orgUn règlement présidentiel stipule que les sanctions imposées aux personnes non vaccinées peuvent prendre la forme de retards ou de cessation des services administratifs gouvernementaux, à la seule appréciation des agents de ces services, rapporte Courrier international (article payant).

Au Turkménistan, la vaccination, imposée depuis le 7 juillet, a permis au pays de vacciner avec au moins une dose 71,5% de sa population, toujours d'après le site OurWorldinData. C'est un succès moindre pour le Tadjikistan qui, malgré l'obligation en vigueur, a vacciné, avec au moins une dose, moins de 30% de sa population. 

Au Vatican, une note, datée du 8 février, rend impératif le vaccin pour les habitants du plus petit Etat au monde et les employés qui y travaillent. Impossible d'y échapper sous peine de sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, à moins de disposer d'une "raison de santé avérée", rapporte La Croix (article payant). Jusqu'à présent, le Vatican n'a pas communiqué le nombre de personnes ayant été vaccinées.

En France, la question fait débat

En France, l'obligation vaccinale ne s'applique pour l'instant qu'aux personnels des hôpitaux, des maisons de retraite ainsi qu'aux pompiers, aux ambulanciers et aux aides à domicile, et ce depuis le 15 septembre. Mais elle va bientôt concerner tout le monde en Nouvelle-Calédonie. Ce territoire français du Pacifique Sud, qui dispose d’une large autonomie, va l'imposer à sa population ainsi qu'aux voyageurs à partir du 31 décembre.

Cet exemple peut-il faire tache d'huile ? Pour le moment, la nécessité d'une obligation vaccinale ne fait pas l'unanimité. Olivier Véran a à nouveau assuré mercredi que ce n'était "pas le choix de la France" et que l'exécutif privilégiait une stratégie "sans obligation si possible", rapporte LCI. Le ministre de la Santé a souligné qu'une telle mesure nécessiterait un "contrôle" et des "sanctions" qui ne rendrait pas sa faisabilité "évidente". Mais il ajouté que si cette obligation vaccinale est compliquée à mettre en place, elle n'était cependant pas "impossible".

Quant au professeur Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique sur le Covid-19, il a affiché son scepticisme pour des raisons de principe comme d'application pratique. "Bien sûr que la santé (...) est un élément essentiel, mais est-ce qu'on doit nous priver quand même d'une certaine forme de liberté ?", s'est-il interrogé face à des députés. Et d'ajouter : "Comment on le contrôle ?"

"Quand vous avez une petite mamie qui vous dit qu'elle ne veut pas se faire vacciner (...), vous croyez qu'on va envoyer les gendarmes ?"

Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique sur le Covid-19

face aux députés

La vaccination obligatoire a pourtant des défenseurs de longue date dans le paysage politique et médical français. Cet été, le président de la Fédération hospitalière de France (FHF), Frédéric Valletoux, appelait déjà dans Le Journal du dimanche (article payant) à prendre cette mesure. Des sénateurs socialistes avaient aussi déposé un projet de loi visant à compléter la liste des onze vaccinations obligatoires avec celui contre le Covid-19 dans le Code de la santé publique, rappelle Public Sénat

François Bayrou, le président du MoDem, a également estimé sur BMFTV que "le débat doit être ouvert". De son côté, Anne Hidalgo, maire de Paris et candidate à l'élection présidentielle, a répondu "pourquoi pas" à la question d'une mise en place de la vaccination obligatoire sur France Inter. Enfin, dans LibérationFrançois Bourdillon, ancien directeur de Santé publique France, pense que l'"on va aller doucement" vers cette obligation. Car c'est "le rôle de l'Etat de protéger" les personnes qui ne sont toujours pas vaccinées, selon le médecin.

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