Cet article date de plus de deux ans.

Covid-19 : où en est la campagne de vaccination des 12-17 ans dans les collèges et les lycées ?

Entre une mise en œuvre compliquée et la réticence de certains parents, la vaccination dans le cadre scolaire peine à décoller en France.

Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Des élèves patientent dans un point de vaccination installé au lycée Saint-Joseph, à Prades (Pyrénées-Orientales), le 3 septembre 2021. (JC MILHET / HANS LUCAS / AFP)

"Tout collégien ou lycéen doit se voir proposer une vaccination au mois de septembre." Le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, a réitéré son engagement, lundi 20 septembre, lors d'un déplacement dans l'académie d'Amiens. Depuis la rentrée de septembre, les élèves âgés de 12 à 17 ans peuvent se faire vacciner contre le Covid-19 au sein de leur établissement scolaire ou à proximité. Cette tranche d'âge affiche un taux de 69% de primo-vaccinés 58% ont reçu leur deux doses. Le ministre de l'Education appelle toutefois au "volontarisme" des familles, car dans les lycées et les collèges, la vaccination "ne fonctionne pas autant que l'on aurait souhaité", selon Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du principal syndicat des chefs d'établissement (SNPDEN).

"Depuis la rentrée, 1 314 établissements ont proposé un parcours vaccinal à leurs élèves de collège et lycées sur les 10 000 établissements recensés au niveau national", détaille le ministère de l'Education nationale à franceinfo. Seulement 13% des établissements donc. "C'est trop peu" estime Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Syndicat national des enseignants de second degré (SNES-FSU). "L'organisation de la vaccination a été totalement laissée aux académies", note l'enseignante dans un lycée de l'Essonne contactée par franceinfo.

Un "enjeu d'égalité"

Le ministre de l'Education avait assuré, le 28 juillet, que "6 000 à 7 000 centres de vaccination" seraient "prêts" pour la rentrée scolaire. Depuis, les directions des services départementaux de l'Education nationale (DSDEN), en accord avec les préfectures et les agences régionales de santé (ARS), organisent la vaccination dans les lycées et les collèges en fonction du territoire et des centres de vaccination.

"En général, les collèges et lycées sont jumelés à un vaccinodrome mais toute l'organisation liée au déplacement et à l'encadrement pour s'y rendre est nébuleuse et dépend des établissements."

Sophie Vénétitay, SNES-FSU

à franceinfo

Pour la majorité des collèges et lycées la campagne vaccinale se déroule donc à l'extérieur de l'établissement. Certains doivent réserver des créneaux dans un centre de vaccination, d'autres bénéficient de la mise en place d'un centre éphémère à proximité. A l'instar de la Côte-d'Or, où l'ARS a affrété un "vaccinobus" qui se déplace dans 28 collèges du département (qui en compte 54), en ville comme dans les zones rurales.

Aux yeux de Sophie Vénétitay, cette "absence" de "réelle volonté" de la part du ministère de vouloir organiser la campagne de vaccination dans les établissements scolaires est regrettable car "il y a derrière un enjeu d'égalité d'accès au vaccin". Pour la secrétaire générale et professeur de Sciences économiques et sociales, la vaccination dans les établissements scolaires est un "outil complémentaire intéressant". "C'est un moyen de toucher une population qui n'a pas forcément accès au vaccin et de renforcer ainsi la couverture vaccinale", assure-t-elle.

Or le taux de vaccination des 12-17 ans se révèle disparate selon les départements. Dans les Bouches-du-Rhône, seulement 40% des 12-17 ans ont reçu un schéma vaccinal complet contre 87% dans les Landes, selon les données de Santé publique France datées du 15 septembre. Ce taux tombe à 11,6% en Guadeloupe.

Une faible adhésion des élèves et des familles

La raison est-elle à chercher du côté des élèves et de leurs familles, parfois peu enclines à faire vacciner les enfants dans le milieu scolaire ? Le taux d'adhésion des élèves pour cette campagne "oscille entre 2% et 5% en métropole", précise Bruno Bobkiewicz, du SNPDEN-Unsa. "Il est aux alentours de 8% dans les départements d'outre-mer, où la campagne de vaccination a pris plus tardivement", ajoute-t-il, s'appuyant sur des remontés du terrain lors d'une enquête auprès des adhérents du syndicat et qui a récolté 2 172 réponses.

Pour ce proviseur de la cité scolaire Berlioz à Vincennes (Val-de-Marne), la réticence des familles s'inscrit dans une logique qui prend racine en novembre 2020, quand les premiers tests antigéniques ont été distribués dans les lycées. "Nous avons eu un taux très bas de tests antigéniques réalisés entre novembre et mars, calcule Bruno Bobkiewicz. Cela a été également une catastrophe en termes d'adhésion lors des autotests déployés en juin", complète celui qui ne se dit "pas étonné" aujourd'hui du "faible" succès de la campagne vaccinale chez les plus jeunes.

"Les parents ne nous reconnaissent pas cette compétence sanitaire. Pour eux, cela relève de la sphère privée et non de l'établissement scolaire."

Bruno Bobkiewicz du SNPDEN-UNSA

à franceinfo

Pourtant, ce ne sont pas les infirmières scolaires qui vaccinent, mais bel et bien "des équipes mobiles dédiées, composées de personnel de santé, de professionnels de ville et de personnes intervenant dans les centres de vaccination", précise le ministère de l'Education nationale à franceinfo.

Les parents ont le droit de refuser la vaccination dans le cadre scolaire. Les syndicats relèvent à ce sujet "deux ou trois incidents". Bruno Bobkiewicz évoque "la distribution de tracts antivaccins devant un lycée ou encore l'envoi d'un mail d'intimidation de la part d'un collectif à un chef d'établissement", affirme Bruno Bobkiewicz.

"Il faudra en tirer les leçons"

Aucun débordement n'a été signalé auprès de la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (Peep). "Des parents réfractaires nous ont juste demandé de faire remonter au rectorat que l'information sur la vaccination doit rester neutre", précise Isabelle Fery, vice-présidente la Peep. Ces parents veulent aussi "veiller à ce qu'il n'y ait pas de pression de la part de leurs camarades", sur les lycéens de plus de 16 ans, pour lesquels l'autorisation parentale n'est plus requise.

Sophie Vénétitay, du SNES-FSU, estime tout de même que le nouveau protocole sanitaire "a mis un coup de pression sur les parents. Le risque d'éviction des cas contact non vaccinés a fait réfléchir."

"Même si cela touche très peu d'élèves, il fallait proposer la vaccination dans les lycées et les collèges", défend Bruno Bobkiewicz, avant d'assurer que "les équipes ne se déplacent pas pour rien, car l'opération s'évalue en fonction du nombre de demandes." Pour le chef d'établissement, "ce n'est pas dramatique s'il y en a peu, car les chiffres continuent d'augmenter à l'extérieur".

Cette opération de vaccination dans les lycées et collèges doit durer jusqu'aux vacances d'automne, afin d'assurer la deuxième dose aux élèves fraîchement vaccinés. "Mais il faudra en tirer des leçons pour une prolongation ou non de l'opération", conclut Bruno Bobkiewicz.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.