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Coronavirus : où en est la quête d'un vaccin contre la pandémie de Covid-19 ?

Des dizaines de projets sont à l'étude à travers le monde. Mais leurs états d'avancement ne permettent pas de conclure à l'imminence d'une solution pour contrer l'épidémie.

Article rédigé par Vincent Matalon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Un chercheur au sein de l'Institut Pasteur, à Paris, le vendredi 7 février 2020. (MAXPPP)

Même si la date de levée du confinement annoncée par Emmanuel Macron approche, la fin de la pandémie de nouveau coronavirus est encore loin. Selon une étude de l'Institut Pasteur, seuls 5,7% des Français auront été infectés au 11 mai. Un taux très éloigné des 60 à 70% considérés comme nécessaires pour atteindre la fameuse immunité collective. Dans ce cadre, la découverte d'un vaccin semble cruciale.

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Où en est-on aujourd'hui ? Quelles sont les difficultés rencontrées par les chercheurs ? Elements de réponse.

Des dizaines de projets lancés

Avec au moins 170 000 décès liés au Sars-CoV-2 et des milliards de personnes appelées à limiter leurs déplacements de Paris à Delhi en passant par Auckland, les scientifiques du monde entier travaillent d'arrache-pied pour trouver un vaccin au nouveau coronavirus. C'est bien simple : selon le décompte actualisé chaque semaine par une université publique londonienne, au moins 119 projets de vaccins sont engagés dans cette course contre la montre.

Tous ne sont pas au même stade : l'écrasante majorité des prototypes, dont ceux élaborés en France par Sanofi et l'Institut Pasteur, sont en phase dite préclinique. "C'est lors de cette étape que l'on met au point un prototype en fonction du type de réaction immunitaire que l'on souhaite induire dans l'organisme", détaille pour franceinfo Marie-Paule Kieny, ancienne responsable de l'OMS ; où elle a dirigé les opérations de recherche lors de l'épidémie d'Ebola.

Une fois que le concept est trouvé, on fait des tests sur des petits animaux, souvent des souris, et on produit un lot de vaccins qui répondent à toutes les normes en usage clinique et passent tous les contrôles réglementaires pour être administrés à l'homme.

Marie-Paule Kieny, ancienne responsable de l'OMS

à franceinfo

Cette seule étape prend "plusieurs mois, deux au minimum", ajoute cette spécialiste actuellement membre du Comité analyse recherche et expertise (Care), qui réunit 12 scientifiques et médecins pour conseiller le gouvernement sur les traitements et les tests contre Sars-CoV-2.

Certains laboratoires sont toutefois déjà en phase d'essais cliniques. C'est le cas de l'américain Moderna, aidé financièrement par une agence sanitaire gouvernementale et qui a débuté le 16 mars à Seattle (Etat de Washington) les essais de son vaccin baptisé mRNA-1273 sur trois cohortes de volontaires en bonne santé âgés de 18 à 55 ans, rapportait à l'époque le New York Times (article en anglais). Trois dosages différents leur ont été administrés, et la réaction de leur système immunitaire est scrutée de près par les chercheurs.

Mais trouver un vaccin contre le nouveau coronavirus relève davantage de la course de fond que du sprint, comme nous l'explique le docteur Yves Lévy, ancien président directeur général de l'Inserm. "Moderna travaille sur un vaccin facile à produire, et qui a été réorienté pour le Sars-CoV-2, ce qui a séduit les autorités américaines. Mais il s'agit d'un pari immense, car la technologie de vaccin sur laquelle ils travaillent n'a pour l'instant jamais été mise sur le marché, ou même établie comme efficace", pointe l'actuel directeur de l'Institut de recherche vaccinale (VRI), qui planche également sur un remède au Covid-19.

De nombreux obstacles

Dans cette course contre le temps, les scientifiques partent avec un handicap de taille : aucun vaccin n'a jamais été développé contre un virus de la famille des coronavirus. Sur son site internet, l'Institut Pasteur rappelle ainsi qu'il avait inventé en 2004 un candidat-vaccin contre un autre coronavirus, le Sars-CoV-1, mais que celui-ci n'avait jamais été "expérimenté chez l'homme car, quand il était prêt, l'épidémie était heureusement terminée, et il n'y avait plus de patients sur lesquels proposer de le tester". Le savoir-faire développé à l'époque est toutefois "actuellement appliqué par les scientifiques concernés pour un projet en cours de vaccin potentiel" contre le nouveau coronavirus, précise la fondation française.

Un autre sujet préoccupe grandement les scientifiques qui planchent sur l'élaboration d'un vaccin : la durée de l'immunité conférée par le contact avec la maladie. A l'heure actuelle, on ignore si les vaccins en cours de développement protègeront à coup sûr la population contre les épidémies à venir.

Il semble pour l'instant que certaines personnes qui ont contracté le Covid-19 bénéficient d'une immunité naturelle de courte durée, ce qui n'est pas un signe très encourageant.

Marie-Paule Kieny

à franceinfo

Face à une telle situation, la solution pourrait consister à vacciner la population régulièrement contre le nouveau coronavirus, à l'image de ce que de nombreux Français connaissent avec la grippe saisonnière. Cette spécialiste n'exclut toutefois pas que l'immunité induite par un vaccin puisse être plus durable que celle provoquée naturellement par la maladie.

Un dernier obstacle provoque de vives inquiétudes : dans certains cas, la réaction de l'organisme au vaccin peut entraîner des effets délétères et aggraver la maladie qu'il est censé prévenir. L'ancien patron de l'Inserm Yves Lévy cite ainsi le cas de singes utilisés pour tester un modèle de remède contre le Covid-19, et dont l'organisme a moins bien réagi après infection que leurs congénères qui n'avaient pas subi d'injection. Un effet dit "facilitateur" déjà observé dans des maladies telles que la dengue.

Les conditions de production de masse en question

Tous les chercheurs s'accordent sur un point : il ne faut pas s'attendre à ce qu'une injection miracle contre la maladie soit disponible d'ici à la fin de l'année. "Personne n'imagine qu'on ait un vaccin en France avant 12 ou 18 mois", a déclaré mardi sur franceinfo le professeur William Dab, épidémiologiste et ancien directeur général de la santé.

Pour ce spécialiste reconnu, la longueur de ce processus ne s'explique pas tant par la recherche que par "l'industrialisation du vaccin" à venir.

"Je ne suis pas sûr qu'on aura l'appareil industriel qui permettra de produire rapidement, 5, 6 ou 7 milliards de doses de vaccin.

William Dab

à franceinfo

"Nous avons de grosses plateformes de production de vaccin contre la grippe, nous avons de très gros industriels dans le domaine pharmaceutique, donc nous sommes plutôt bien placés dans cette compétition mais les seules ressources françaises ne suffiront pas", a-t-il prévenu.

William Dab redoute en outre des inégalités entre pays au moment de la production massive de cet antidote : "Il faudra construire des usines et, espérons-le, sous gouvernance internationale. Quand on pense à l'avenir, la pire des choses c'est que les pays riches trouvent les moyens de se protéger et que les pays pauvres soient sacrifiés. Il faut penser à une solution mondiale."

Cette préoccupation est partagée au plus haut niveau. Lundi, les 193 membres de l'Assemblée générale de l'ONU ont adopté par consensus une résolution réclamant un "accès équitable" aux "futurs vaccins" contre le Covid-19, et soulignant le "rôle dirigeant crucial de l'Organisation mondiale de la santé", alors même que l'institution est mise en cause, notamment par Donald Trump, dans sa gestion de l'épidémie.

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