Marins du porte-avions "Charles-de-Gaulle" positifs au Covid-19 : "Je crois qu'il y a un dysfonctionnement", estime Alexis Corbière
Le député LFI de Seine-Saint-Denis aimerait comprendre pourquoi le porte-avions a été autorisé à faire escale à Brest le 13 mars et surtout, à repartir la 16 alors que le chef de l’État allait annoncer le confinement.
"Je crois qu'il y a un dysfonctionnement", estime, vendredi 17 avril sur franceinfo, Alexis Corbière, député LFI en Seine-Saint-Denis et membre de la commission de la défense nationale et des forces armées, alors que sur les 2 300 marins du porte-avions Charles-de-Gaulle, 1 081 ont été testés positifs au Covid-19.
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La ministre des Armées Florence Parly et la secrétaire d'État Geneviève Darrieussecq ont été auditionnées vendredi 17 avril devant les députés de la commission de la défense nationale et des forces armées. Alexis Corbière aimerait comprendre pourquoi le porte-avions a été autorisé à faire escale à Brest le 13 mars et surtout, à repartir la 16 alors que le chef de l’État allait annoncer le confinement des Français dans une allocution.
franceinfo : Avez-vous été convaincu par l'audition des ministres et par leurs réponses ?
Alexis Corbière : Non, je dois le dire. C'est extrêmement grave. D'abord, je vais avoir une pensée pour les marins, pour leurs familles. C'est extrêmement préoccupant. Que s'est-il passé le 13 mars ? Le Charles de Gaulle a fait escale à Brest. Les marins ont pu voir leurs familles fréquenter différents établissements publics du port de Brest et le bateau est reparti le 16. J'ai interrogé la ministre. Depuis le 12, il avait été annoncé que les écoles allaient fermer, le 14 au soir le Premier ministre s'est exprimé pour dire que la situation était suffisamment grave pour que l'ensemble des restaurants et cafés aient dû être fermés. Et le 16 au soir, le président de la République annonce le confinement. Comment est-il possible que notre seul porte-avions, c’est d’une importance stratégique majeure pour la France, reprenne la mer sans qu'aient été d'abord évalués les risques que cela comportait après que les marins ont pu fréquenter les habitants de Brest et voir leurs familles. La ministre a répondu qu'une enquête était en cours et qu'elle espérait que d'ici 15 jours, elle aurait des décisions. Je vais la lire très attentivement et je crois que je ne serai pas le seul, mais ça me semble un peu sec comme réponse. On a déjà l'exemple des gens de Creil, ces soldats qui étaient allés chercher nos compatriotes en Chine et qui ont été contaminés par la suite. Donc, le risque était là et j'ai du mal à croire qu’à l'heure actuelle, on ne savait pas avant que le président de la République s'exprime, à 20 heures, le 16 au soir, des risques encourus.
Selon vous, ces marins n’ont pas été assez protégés ?
Je le crois. Je crois qu'il y a un dysfonctionnement. Je ne sais pas si c'est un dysfonctionnement du point de vue du "Pacha", comme on dit du Charles de Gaulle. J'ai du mal à y croire, car tous les supérieurs des militaires que j'ai pu fréquenter sont extrêmement sérieux, méticuleux et extrêmement sensibles à la protection de leurs troupes. Mais il devrait y avoir tout de même une décision d'ordre politique prise à cette occasion. Comment est-il possible que ceux qui dirigent un porte-avion aussi important n'aient pas d'information, ne soient pas à égalité avec l’ensemble des Français. Avant l'allocution du président à 20h, ils ne savent pas les risques encourus ?
Cette escale est une erreur, selon vous ?
Il y a des conséquences lourdes. Évidemment, il faut que la commission d'enquête ait lieu. Madame la ministre a promis qu'elle serait transparente. Je veux croire que tous ceux qui seront interrogés puissent parler librement parce qu'il ne faudrait pas qu'il y ait une parole un peu bridée par des risques de sanctions internes. La presse l'a beaucoup relevé. Beaucoup de gens, des marins ont dit que leur vie avait été mise en danger. Ils sont forts en colère. Il a même été dit que le responsable du porte-avions lui-même ne voulait pas reprendre le départ. Depuis, il a démenti. Il semble qu’il y ait beaucoup d’interrogations.
Vous espérez que cette commission d’enquête va répondre à ces interrogations ?
Madame la ministre m'a répondu en me disant qu'à ce stade, elle ne pouvait pas me répondre. Ce sera la commission d'enquête qui répondra. Je trouve la réponse un peu courte, mais j'invite les Français tout de même à être vigilants et, comme moi, à faire ce travail de lecture de la commission d'enquête. Ça nous concerne tous. Vous savez, je n'ai pas le goût du militaire, mais quand on a un certain attachement à l'indépendance de la France, nous devons aussi avoir une armée qui fonctionne, de qualité, des marins qui ne sont pas exposés inutilement à des risques comme ça. Donc là, il y a une chaîne de décision que je ne maîtrise pas. À ce stade, je ne sais pas qui a pris la décision.
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