"J’ai des centaines de clients qui m’appellent par jour " : en Corse, la vente directe explose avec le confinement
Pour faire face aux manques de débouchés, avec les restaurants fermés notamment, et une demande qui a augmenté, les producteurs se tournent vers la vente directe. Reportage à Calvi en Corse.
Dans le port de Calvi en Haute-Corse, Maurice vérifie ses filets sur son petit bateau, et il a bien du mal à garder le moral : "Ce matin, j’ai ramené deux langoustes et trois poissons." En temps normal, le pêcheur livre aux restaurants mais évidemment pendant ce confinement, il ne vend plus rien. Sa seule solution : les particuliers. "On appelle les clients fidèles au téléphone mais c’est une ou deux fois par semaine", explique-t-il.
Avec le confinement, le secteur de l’agroalimentaire doit se réinventer. La fermeture des marchés et des restaurants entraîne moins de débouchés, certains consommateurs évitent aussi de se rendre dans les grandes surfaces. Résultat, la vente directe explose, qu’elle soit choisie ou subie.
Un nouveau modèle pour les producteurs
La vente directe, Jo, pêcheur lui aussi, a dû s’y mettre : "Les gens sont ravis, parce que passer par un circuit court permet d’avoir un produit de qualité avec un prix de 30 à 40% moins cher qu’en supermarché." Les clients sont donc contents, mais le pêcheur n’assure que 50% de son chiffre d’affaires habituel et doit prendre en compte les contraintes. "J’ai des centaines de clients qui m’appellent par jour, je n’en peux plus, confie Jo. C’est la ménagère qui vous demande 500 g de thon qu’il faut livrer à tel étage. Donc, c’est un peu plus long et un peu plus compliqué."
La vente du producteur au consommateur, c’est le crédo du collectif Drivulinu, monté il y a deux ans à Bastia. "Depuis que j’habite ici je cherchais des producteurs corses et je n’avais pas trouvé jusqu’au confinement", explique une cliente. "Entre les chiffres de février et ceux d’aujourd’hui, on doit être entre 5 et 6 fois plus au niveau des volumes", indique Yannick qui fait partie des fondateurs du collectif.
Un "après" incertain
Le maraîcher, basé en Haute-Corse, a vu une explosion de la demande de ces produits locaux avec le confinement. La période valide en quelque sorte le système sans intermédiaire qu’il défend. La question désormais, c’est "l’après". "Aujourd’hui, il y a une énorme fenêtre qui s’ouvre, indique Yannick. Maintenant, le défi va être de continuer à mobiliser du foncier pour pouvoir installer des agriculteurs, pour pouvoir fournir derrière, d’avoir une demande qui se stabilise."
On est dans un défi agricole complètement nouveau par le rythme qu’il faut adopter.
Yannick, co-fondateur du collectif Drivulinuà franceinfo
Un nouveau modèle de production confirmé, ou au contraire un effondrement. "Si les clients ne restent pas après le confinement avec tout ce qu’on a investi, on sera très mal", confie Yannick.
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