Droit de visite dans les Ehpad : une annonce le dimanche soir pour le lundi est "irresponsable" estime le maire de Plérin, dans les Côtes-d'Armor
Ronan Kerdraon dénonce un "effet d'annonce", "sans moyen" pour le mettre en place avec le risque pour le personnel "d'être au bord du burn out".
Le gouvernement autorise à nouveau, depuis lundi 20 avril, les visites dans les Ehpad. Des visites "pour les familles", dans des "conditions extrêmement limitées", sous la responsabilité des directions d'établissements et à la demande des résidents, a précisé le Premier ministre Edouard Philippe, dimanche 19 avril. Le maire PS de Plérin, dans les Côtes d'Armor, Ronan Kerdraon, déplore les effets de cette annonce : "C'était aussi irresponsable que d'annoncer la fermeture des restaurants, des cafés et des bars le samedi soir, à la veille d'un premier tour d'élections".
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franceinfo : Vous n'autorisez pas les visites dans l'Ehpad de votre commune avant la semaine prochaine. Pourquoi ce choix ?
Ronan Kerdraon : Je suis convaincu qu'il faut que les résidents puissent bien évidemment voir leurs familles, c'est une certitude aujourd'hui. Mais il me semble tout à fait difficile de le faire du jour au lendemain, surtout que les pouvoirs publics sont incapables de nous fournir les équipements de protection nécessaires. Comment faire quand il y a un effet d'annonce à 18h30 un dimanche soir ? On s'est retrouvés avec des flopées d'appels téléphoniques pour nous demander "ça y est, on peut venir dès dimanche soir" et là, c'était un peu un sentiment de panique, d'incompréhension, et puis surtout, on a l'impression d'avoir affaire à des gens qui gèrent les choses par effet d'annonce, sans nous donner les moyens de mettre en oeuvre ces dispositifs qui sont pourtant importants.
On fait peser une pression trop lourde sur les personnels de l'Ehpad de votre commune alors qu'il n'y a pas de moyens de sécurité suffisants ?
Ces personnels qui travaillent par cycles de 12 heures sont déjà sous tension. Ce sont des métiers qui sont physiquement et moralement éprouvants. On rajoute sur eux et sur elles - ce sont des femmes très souvent - une tension qui aujourd'hui pourrait provoquer des arrêts de travail, on risque d'être au bord du burn-out à un moment donné.
C'est irresponsable pour vous, de la part du gouvernement, de faire cette annonce un dimanche soir pour le lendemain ?
Pour moi, c'était aussi irresponsable que d'annoncer la fermeture des restaurants, des cafés, des bars le samedi soir, à la veille d'un premier tour d'élections. Annoncer cela un dimanche soir, alors qu'on sait pertinemment que nous n'avons pas les moyens de mettre en oeuvre immédiatement les moyens nécessaires pour garantir l'intégrité physique à la fois des résidents, des agents et des familles, c'est effectivement irresponsable. C'est pour cela que je veux que l'on se donne la semaine pour mettre en oeuvre, en concertation avec les personnels, tous les dispositifs nécessaires pour garantir cette intégrité sanitaire.
Il y a 86 résidents dans l'Ehpad de Plérin. Pour l'heure, aucune contamination. Vous craigniez que cela change si on autorise les visites ?
Le confinement que l'on a mis en place dans un premier temps, l'établissement, puis les résidents dans leurs chambres, cela a bien fonctionné. On n'a pas été touchés par le Covid-19. Ma crainte, c'est qu'effectivement, ce résultat soit remis en cause parce qu'effectivement, on n'aura pas eu les moyens nécessaires et suffisants pour protéger les uns les autres lors de la réouverture de l'Ehpad. Si demain, du fait qu'on a permis l'entrée de quelqu'un dans l'établissement, se déclare un cas de Covid-19 et que la personne décède, quelle sera la responsabilité pénale, à la fois de la directrice de l'Ehpad et la mienne ? C'est vrai que là, on a des incertitudes juridiques face à des effets d'annonces gouvernementales.
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