Déconfinement et reprise du travail : les réponses à quelques unes de vos questions essentielles
C’est le jour J pour des millions de salariés qui retournent physiquement au travail. Philippe Duport répond à quelques unes des questions que se posent les travailleurs.
La question essentielle que tout salarié se pose en ce premier jour de déconfinement : est-ce que mon employeur est tenu de me fournir un masque ? Non, il n’y a toujours pas une obligation générale, absolue, pour tous les employeurs de France, de fournir des masques à leurs salariés. Le protocole de déconfinement qui s’applique à toutes les entreprises, petites et grandes, et qui a été mis au point par le ministère du Travail il y a une semaine, ne prévoit qu’un seul cas de figure dans lequel le masque s’impose. Votre employeur est tenu de vous en fournir un s’il ne peut pas faire respecter sur le lieu de travail un espace de quatre mètres carrés entre vous et vous collègues ou entre vous et les clients, ou tout autre personne.
Certains employeurs ont décidé d’aller plus loin. Et d’imposer le port du masque à leurs collaborateurs alors même que les règles de distanciation sociale sont respectées. Dans ce cas-là, les salariés ont-ils l’obligation de porter le masque qui leur est fourni ? La réponse est oui. L’employeur peut imposer le port d’équipements de sécurité s’ils sont proportionnels à la tâche à accomplir. Pas de doute qu’une telle précaution est adaptée à la situation. Un salarié qui refuserait de porter le masque alors que son employeur le lui demande s’exposerait à des sanctions disciplinaires.
Le gel hydroalcoolique peut être fourni par l'employeur
Le protocole de déconfinement ne le prévoit pas spécifiquement, mais le ministère du Travail a publié une soixantaine de guides qui s’appliquent plus précisément à différents métiers. Et pour certains d’entre eux, comme assistante maternelle, hôtesse de caisse ou encore chauffeurs livreurs, il est prévu que l’employeur doit bien fournir du gel.
Une seule situation est identifiée où le gel est obligatoire : si, à l’entrée ou à la sortie de l’entreprise, il y a des portillons qu’on est obligé de pousser. Alors, l’employeur doit fournir du gel.
Mais toute l’idée de cette reprise du travail, c’est, pour reprendre la formule de Muriel Pénicaud, "de ne pas faire de la santé des salariés une variable d’ajustement". Et donc l’employeur doit tout faire pour protéger la santé et la sécurité de ses salariés. S’il était poursuivi devant les tribunaux, et qu’il était démontré qu’il n’avait pas mis de gel à disposition, alors il aurait de forte chance d’être condamné. En tout cas l’aléa judiciaire pèserait fortement en sa défaveur.
Les mesures de distanciation sociale s’imposent au travail
Il faut avoir en tête la règle des quatre mètres carrés. Dans toutes les directions, un mètre doit séparer un salarié de l’un de ses collègues. S’il le faut, les bureaux doivent donc être séparés ou éloignés les uns des autres. Même chose dans les ascenseurs. Une seule personne dans un ascenseur de quatre mètres carrés. Les espaces de convivialité et la cantine doivent suivre les mêmes règles. Il est recommandé de permettre aux salariés de se croiser dans l’entreprise en respectant cette règle. Si les salariés constatent que leur employeur ne suit pas les recommandations gouvernementales, ils pourraient aller jusqu’à faire jouer leur droit de retrait. Mais c’est une arme délicate à manier. Mieux vaut d’abord alerter son employeur, ses représentants du personnel, et ensuite, si rien n’est fait, alors se prévaloir de son droit de retrait et ne pas revenir son lieu de travail. On rappelle que l’on continue alors à être payé. Mais l’employeur peut contester le droit de retrait et sanctionner le salarié. Au final, ce sera au juge de trancher.
Le refus de se rendre à son travail, le télétravail imposé
Le télétravail, le gouvernement pousse à fond pour le maintenir au maximum. Mais ces recommandations, aussi nombreuses et officielles qu’elles soient, n’ont pas force de loi. D’un point de vue juridique, vous pouvez faire la demande, mais votre employeur peut vous la refuser. À condition de bien motiver cette décision. Il devra prouver qu’il n’y a pas moyen de faire autrement, qu’il s’agit d’impératifs de service. À vous de négocier, mais au bout du bout, vous pourriez être perdant.
Sauf si votre état de santé ou celui de votre conjoint ne vous permet pas de reprendre le travail. Par exemple parce que vous souffrez d’asthme, d’obésité, d’insuffisance respiratoire ou d’antécédents cardiaques, alors vous pouvez demander à rester en télétravail ou vous faire prescrire un arrêt maladie par la Sécurité sociale ou votre médecin traitant.
L'aménagement des horaires
Concernant l’affluence dans les transports en commun, votre employeur est-il tenu d’aménager mes horaires ? Tenu, non, incité oui. Notamment en Ile-de-France. Encore une fois, il s’agit de fortes recommandations gouvernementales. On ne veut pas que les salariés arrivent et repartent de leur travail tous en même temps. Mais il ne s’agit pas d’une obligation absolue. Pas de sanctions prévues à la clef.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.