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De nouveaux horaires en échange de leur salaire à 100% ? Des salariés de la Fnac en chômage partiel dénoncent le "chantage" de la direction

Selon la CGT, la direction entend verser la totalité du salaire des travailleurs au chômage partiel s'ils acceptent une modulation de leur temps de travail lors de la reprise de l'activité le 11 mai. Des négociations sont en cours.

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Un magasin Fnac dans le 17e arrondissement de Paris, le 29 septembre 2019. (MANUEL COHEN / AFP)

"On n'est pas dans l'illégalité, mais dans l'opportunité." Dans un communiqué publié mardi 21 avril, la CGT de la Fnac affirme que les salariés au chômage partiel pour cause d'épidémie de coronavirus ne savent toujours pas s'ils vont recevoir la totalité de leur paie pour le mois d'avril.

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Pour le moment, ces salariés (rémunérés au-delà du smic) perçoivent 70% de leur salaire brut, comme le prévoit la loi. Mais "la Fnac ne s'est toujours pas engagée à verser le complément de salaire (30% du salaire brut) qui n'est pas pris en charge par l'Etat", dénonce le syndicat dans son communiqué.

"L'entreprise veut qu'on accepte l'accord sur la renégociation de nos horaires de travail lors de la reprise de l'activité, si on veut recevoir la totalité de notre salaire", explique à franceinfo Marc Pietrosino de la CGT Relais à la Fnac.

Des semaines à 43 heures de travail ?

Selon un document interne du 20 avril consulté par franceinfo, le groupe Fnac-Darty prévoit en effet de garantir 100% du traitement des salariés en avril et jusqu'au 11 mai, date officielle du début du déconfinement, en échange de la négociation de l'accord de modulation et ce, afin d'"adapter le temps de travail des salariés en fonction du taux de fréquentation sur les 12 prochains mois".

Si le directeur général du groupe Fnac-Darty, Enrique Martinez, a assuré sur BFMTV que les enseignes seraient en capacité de rouvrir au 11 mai, la Fnac anticipe toutefois un recul d'environ 30% de son taux de fréquentation au moment de la réouverture des magasins.

La direction nous a expliqué que, comme la Chine allait avoir des problèmes de réapprovisionnement, nous allions avoir des heures creuses et qu'elle voulait donc aménager notre temps de travail.

Marc Pietrosino

à franceinfo

Cette accord est prévu pour durer un an, jusqu'au 10 mai 2021, et prévoit jusqu'à 43 heures hebdomadaires de travail pour les semaines hautes à forte activité. L'entreprise garantit "que les semaines de 43 heures ne soient pas accolées et que les semaines hautes ne dépassent pas le nombre de huit semaines consécutives", précise le document. Les semaines hautes et basses devront se compenser pour que la durée moyenne de travail hebdomadaire soit de 35 heures sur une période d'un an.

"Dans mon cas, à Fnac Relais en province, je peux travailler jusqu'à 36 heures par semaine en période basse d'activité, et 39 heures en période haute. Cela me donne droit à 12 jours de RTT, illustre Marc Pietrosino. Avec ce nouvel accord, je pourrais avoir certaines semaines à 25 heures et d'autres pourraient monter jusqu'à 43 heures."

Des inconnues sur l'application du projet

"C'est du chantage et c'est immoral", estime auprès de franceinfo Boris Lacharme, de la CGT Fnac à Paris. Il dénonce également "une précipitation" dans la signature de cet accord. "On ne sait pas comment ce projet sera déployé exactement, quels seraient les besoins, comment les magasins vont redémarrer..."

On nous demande de signer un accord sans savoir de quoi demain sera fait.

Boris Lacharme

à franceinfo

Contacté par franceinfo, le groupe Fnac-Darty répond que les discussions sont en cours avec les représentants du personnel et rappelle que "par cette modulation annuelle du temps de travail envisagé, nous souhaitons garantir que l’ensemble de nos salariés soient assurés du versement à 100% de leur salaire fixe pour les douze prochains mois."

La CGT estime que l'entreprise a dans tous les cas les capacités de verser la totalité des salaires sans avoir recours à un changement du temps de travail. "La masse salariale est la variable d'ajustement habituelle de notre direction", dénonce Boris Lacharme. "La Fnac a une aubaine de faire des économies et elle en profite, ajoute Marc Pietrosino. En attendant, ce sont les salariés qui payent eux-mêmes leurs salaires, puisque les salaires sont garantis par l'Etat, qui se finance via nos impôts !"

Un prêt de 500 millions d'euros garanti par l'Etat

Le groupe Fnac-Darty est le premier grand groupe français à avoir bénéficié du dispositif de prêts garantis par l'Etat en obtenant 500 millions d'euros de plusieurs banques. L'Etat garantit 70% de ce prêt. Le groupe a précisé que ce prêt servirait à "sécuriser la liquidité du groupe" et à "préparer la reprise des activités" alors que l'ensemble des magasins physiques en France, en Espagne, en Suisse et en Belgique sont fermés depuis la mi-mars. 

Le groupe a également tiré "de façon préventive" sur sa ligne de crédit renouvelable de 400 millions d'euros et a annoncé qu'il retirait sa proposition de versement de dividende de 1,50 euro par action au titre de l'exercice 2019, et qu'il ne procéderait pas à des programmes de rachat d'actions en 2020, comme l'avait fortement encouragé le gouvernement.

Selon le document interne, l'entreprise s'est engagée depuis le 18 mars et pendant toute la durée de la crise à verser une prime d’activité de 100 euros par semaine aux salariés travaillant sur les sites de l’entreprise ou en contact avec la clientèle. 

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