Covid-19 : "Je suis le symbole que l'on peut s'en sortir, mais aussi que ça peut toucher tout le monde", témoigne le député Jean-Luc Reitzer
De retour à l'Assemblée après six mois de convalescence, Jean-Luc Reitzer est un "miraculé", selon les médecins. Il a été le premier député à contracter le Covid-19.
"Je suis le symbole que l'on peut s'en sortir, mais aussi que ça peut toucher tout le monde", a témoigné le député du Haut-Rhin Jean-Luc Reitzer sur franceinfo mercredi 14 octobre. Il a été ovationné mardi pour son retour à l'Assemblée nationale, après six mois d'absence. L'élu Les Républicains a été le premier député à contracter le Covid-19 en mars. Il a passé un mois dans le coma, deux mois et demi à l'hôpital.
Jean-Luc Reitzer lance un appel au respect des gestes barrières et à porter le masque à destination de "toutes celles et à tous ceux qui veulent vivre, qui veulent se retrouver dans des lieux de fête et des lieux de convivialité". Reconnaissant envers le personnel soignant, il appelle aussi à "revaloriser le métier [...] matériellement et financièrement".
franceinfo : Comment s'est passé ce retour dans l'hémicycle sous les applaudissements ?
C'était un moment d'émotion très puissant, très fort. J'ai eu un accueil extraordinaire. Ça a été extrêmement touchant parce que c'est venu de tous les bancs de notre Assemblée. Pendant toute cette période difficile que j'ai vécue depuis le début du mois de mars, j'ai eu les témoignages de mes collègues parlementaires issus de tous les bancs politiques, et des témoignages extraordinaires de la France entière, voire de l'étranger. C'est vrai que j'étais le premier député à être infecté par ce Covid-19 et ça a été extrêmement médiatisé à l'époque. Donc, il y a eu un courant de soutien, également un courant d'inquiétude parce que des gens se sont dit : "Si notre député est malade, c'est que ça devient sérieux et que cette épidémie peut toucher tout le monde".
Est-ce qu'on peut vous présenter comme un rescapé ?
C'est ce qu'on me dit. On me parle de "miraculé". On me dit, surtout les médecins, "M. Reitzer, vous revenez de loin". Et puis, ma famille aussi a vécu des moments extrêmement difficiles. Donc, c'est vrai que je suis un petit peu le symbole que l'on peut s'en sortir, mais aussi que ça peut toucher tout le monde et qu'il faut que tout le monde fasse attention. Je lance un appel à nos jeunes. Je lance un appel à toutes celles et à tous ceux qui veulent vivre, qui veulent se retrouver dans des lieux de fête et des lieux de convivialité. Il faut respecter les gestes barrières. Il faut porter son masque et il faut être extrêmement prudent.
Que vous a appris votre long séjour à l'hôpital sur son fonctionnement ? Sur les soignants ?
Je connaissais déjà les problèmes des hôpitaux. J'ai été maire pendant 34 ans, donc je suis un homme de terrain. J'ai été président d'un conseil de surveillance et d'administration de mon hôpital, l'hôpital Saint-Morand, à Altkirch, dans le Haut-Rhin. Je connaissais les problèmes du personnel soignant, mais c'est vrai qu'en étant hospitalisé, pendant les deux mois où j'ai été soigné et ensuite rééduqué, j'ai découvert non seulement du professionnalisme, non seulement des compétences, mais aussi une extrême humanité. Et c'est ça qui m'a marqué.
J'avais des difficultés à déglutir, je ne pouvais ni boire ni manger pendant des semaines. Je n'avais plus du tout le moral et les larmes venaient aux yeux. Quand vous avez plusieurs infirmières qui viennent vous dire : "M. Reitzer, ce n'est pas grave, ne vous inquiétez pas, ça reviendra", qui vous touchent le bras, la main, l'épaule pour vous réconforter, c'est quelque chose d'extraordinaire.
Jean-Luc Reitzer, député du Haut-Rhinà franceinfo
Et puis, j'ai vu une solidarité et un dévouement, une abnégation de personnes qui sont revenues de leur retraite pour renforcer les équipes à Mulhouse. J'ai vu des gens qui sont venus de toutes les régions de la France, notamment une collègue député qui était la suppléante de Christophe Castaner, qui était infirmière de métier avant d'être députée et qui est venue renforcer les équipes. Il faut revaloriser le métier de soignant.
Pendant des années, tous les gouvernements, de droite comme de gauche, ont expliqué que l'hôpital ne pouvait pas échapper aux économies. Ça, c'était le monde d'avant ? Ce discours change aujourd'hui ?
Je suis député depuis 32 ans. J'ai été dans l'opposition, j'ai été dans la majorité. Je me suis battu souvent avec plus de force contre mes propres gouvernements, mes propres majorités. Ça m'a parfois coûté cher, mais j'ai toujours eu ma liberté de penser, ma liberté de parole et j'ai toujours dénoncé la fermeture des lits. J'ai dénoncé la fermeture des services. Je me suis battu pour la maternité de mon hôpital, pour le service de chirurgie, pour les urgences. Et malheureusement, quels que soient les gouvernements, les majorités, on est arrivé à la fermeture de la maternité. On est arrivé à la fermeture d'un certain nombre d'autres services. Tous les gouvernements, toutes les majorités sont collectivement responsables de cette situation. Il y a eu le fameux numerus clausus qu'on a instauré et qu'on a levé. Mais il faudra plusieurs années pour retrouver le nombre de médecins nécessaires dans nos hôpitaux et même en ville.
Il faut qu'on tire les leçons de ce qui s'est passé. Il faut lutter contre ces fermetures. Il faut lutter contre l'excès de bureaucratie et d'administration de nos services de santé.
Jean-Luc Reitzer
Et il faut revaloriser matériellement et financièrement, en donnant plus de moyens en locaux, en lits, en service de réanimation pour nos soignants, pour qu'ils sachent qu'ils sont effectivement des éléments essentiels de la solidarité nationale.
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