Coronavirus : le relâchement le soir de la Fête de la musique est "déplorable", juge un membre du Conseil scientifique
"La proportion de la population qui est immunisée est faible" [5%] et des personnes asymptomatiques véhiculent le virus, rappelle Yazdan Yazdanpanah, le chef de service des maladies infectieuses à l'hôpital Bichat à Paris.
"Ce qui s'est passé au moment de la Fête de la musique, je pense que c'est déplorable", regrette mercredi 24 juin sur franceinfo Yazdan Yazdanpanah, membre du Conseil scientifique et directeur de l'Institut d'immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie à l'Inserm, au sujet du relâchement de certains fêtards le 21 juin. "Je pense qu'il faut encore augmenter le nombre de tests" de coronavirus, ajoute le chef de service des maladies infectieuses à l'hôpital Bichat à Paris.
franceinfo : Le Conseil scientifique estime qu'il est extrêmement probable que la France connaisse une deuxième vague de Covid-19. Pourquoi ?
Yazdan Yazdanpanah : Effectivement, la proportion de la population qui est immunisée est faible [seulement 5%]. Deuxièmement, on voit que le virus circule, notamment dans l'hémisphère sud, comme en Amérique latine, où il y a 100 000 morts désormais. Même s'il ne faut pas faire de mimétisme avec les autres virus respiratoires, avec la grippe, on sait qu'il y a une probabilité qui n'est pas négligeable que le virus revienne, notamment à l'approche des mois d'hiver. Quand il va faire plus froid, les gens vont aller dans des endroits plus confinés et on sait que là, il y a une augmentation de probabilité qu'on puisse contracter le virus parce qu'on est dans les endroits confinés. On n'est pas à l'extérieur et deuxièmement, même si le virus peut se transmettre quand il fait chaud, malgré tout, il y a un impact de la température.
Que pensez-vous du relâchement de certaines personnes le soir de la Fête de la musique ?
Ce qui s'est passé au moment de la Fête de la musique, je pense que c'est déplorable et il faut le dire. Ce virus, on ne le palpe pas, on ne le sent pas, donc on peut se relâcher si on en a envie. Mais il faut faire vraiment attention. C'était surtout des jeunes qui étaient-là, mais s'il y a une personne parmi eux qui était porteuse du virus, elle a pu le transmettre aux autres. Et en plus une personne asymptomatique peut transmettre le virus.
Sommes-nous mieux préparés à affronter une deuxième vague que nous ne l'étions pour affronter la première ?
Premièrement, on connaît beaucoup mieux de virus, même s'il faut qu'on reste encore humble et qu'on ne connaît pas tout. Deuxièmement, on a plus de masques et on sait quand il faut porter un masque. On a plus de tests et on sait que tester des personnes est extrêmement important pour pouvoir arrêter l'épidémie dès que ça démarre. Donc oui, on est plus armés. Je pense qu'il faut faire tout pour éviter un reconfinement généralisé. Là, ce qu'on voit en Allemagne, c'est un confinement localisé. Il y a d'autres armes. Il faut dépister très rapidement à chaque fois qu'il y a un nombre élevé de cas pour essayer d'arrêter. Aujourd'hui, on teste mieux qu'avant parce qu'on connaît beaucoup de choses, parce qu'on a plus de moyens.
Mais je pense qu'il faut encore augmenter le nombre de tests. On est autour de 25 000, 35 000 tests par semaine. C'est déjà pas mal, mais c'est très peu au regard de la population.
Yazdan Yazdanpanah, directeur de l'Institut d'immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie à l'Insermà franceinfo
La circulation du virus est plus faible. Tester, c'est vraiment un élément très important. On insiste, dès qu'il y a le moindre symptôme, que ce soit les symptômes respiratoires ou la sensation d'avoir de la fièvre, etc, il ne faut pas hésiter à aller faire des tests. Maintenant, il y a des endroits pour se faire tester.
Est-ce vraiment le bon moment pour assouplir les règles sanitaires, comme le souhaitent le gouvernement et le patronat ?
Ce qui avait été prévu, c'est de faire un assouplissement par escalier. Pour le moment, la proportion de tests positifs, la proportion des gens qui arrivent aux urgences, la proportion des gens qui sont hospitalisés, le nombre de lits de réanimation, montrent, depuis le 11 mai, qu'il n'y a pas une augmentation des cas. Donc, on peut continuer à assouplir. Mais ça ne veut pas dire qu'il faut faire n'importe quoi. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire de télétravail. Mais, en même temps, je travaille aussi dans un institut de recherche, l'Inserm, et on constate que quand on ne voit pas les gens de temps en temps, c'est plus compliqué. Ça ne veut pas dire qu'il faut jeter le télétravail mais je pense qu'il faut peut-être augmenter la proportion de non-télétravail, au moins pour les jeunes. Pour les personnes à risque, il faut continuer à télé-travailler.
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