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Coronavirus : "il y a des secteurs qui ne vont pas repartir", estime Paul Hermelin, PDG de Capgemini

Le PDG du géant français de l'informatique, invité éco de franceinfo jeudi 30 avril, est revenu sur la crise économique, la fusion entre Capgemini et d'Altran et sur l'application StopCovid.

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7min
Paul Hermelin, PDG de Capgemini, à Paris le 7 décembre 2018. (ERIC PIERMONT / AFP)

Pour Paul Hermelin, PDG du géant français de l'informatique Capgemini, "il y a des secteurs qui ne vont pas repartir" dans le monde économique. L'invité éco de franceinfo, jeudi 30 avril, revient sur les conséquences de la crise économique provoquée par l'épidémie de coronavirus, ainsi que sur la fusion entre Capgemini et son concurrent Altran.

franceinfo : Est-ce que la situation économique du pays vous inquiéte ?

Paul Hermelin : Il y a lieu de réfléchir et d'organiser beaucoup de choses. Deux semaines de mars ont pesé 5,8% pour un trimestre. Cela veut donc dire que la chute était de 35% sur ces quinze jours. Le PIB est en chute aujourd'hui de plus d'un tiers et donc, cela veut dire que l'économie est au ralenti. Et il y a des secteurs complètement sinistrés. Le tourisme, les transports ou le transport aérien. Il va falloir s'organiser sérieusement.

On sait que le gouvernement surveille de très près les entreprises stratégiques françaises qui pourraient être la cible d'OPA hostiles de la part de groupes étrangers. Est ce que le ministre de l'Économie a raison d'être vigilant sur ce point ?

Je pense qu'il y a des groupes qui peuvent se trouver dans une situation de faiblesse ou y renoncer. À ce moment là, il y a des menaces sur la souveraineté. Je pense que c'est juste. En même temps je pense que les conseils d'administration n'accepteraient pas des offres à prix cassés. Je pense que les conseils savent quelle est la valeur d'une entreprise. Mais on peut assister à des découragements. C'est ça le risque. Des sociétés qui ont du mal et qui ne voient plus très bien comment s'en sortir toutes seules. Il risque d'y avoir des rapprochements dont on n'avait pas l'idée avant.

Dans quels secteurs ?

Par exemple dans le domaine du tourisme, des transports de voyageurs. On avait vu il y a quelques temps Thomas Cook, qui a déposé le bilan. Je pense qu'il y a des secteurs qui ne vont pas repartir. Les comportements des consommateurs ne seront pas forcément les mêmes demain et après demain. Aujourd'hui en Chine, deux mois après la fin, les gens ne vont toujours pas au restaurant.

Vous même, Paul Hermelin, vous venez de profiter de la chute de la Bourse pour lancer une OPA sur votre concurrent, le groupe Altran que vous avez racheté pour près de 4 milliards d'euros. Quelle est la logique de cette opération ?

Nous l'avons lancée en juin de l'année dernière et nous l'avons finalisée en février. La crise de la Bourse a découragé l'activiste Elliott qui voulait nous en empêcher. C'est très bien parce qu'au fond, cette opération était amicale et pas hostile. Elle était recommandée par le conseil d'Altran. Les données sont en train d'être exploitées. Il y a des données dans le marketing. C'est Google avec les cookies. Et demain, il y aura des données dans tous les processus industriels et dans les produits, les produits connectés, les produits intelligents. Le mariage d'Altran et de Capgemini, c'est l'enrichissement de tous les processus d'ingénierie et de recherche par la donnée. Nous avons annoncé notre fusion il y a quelques semaines. Nous avons déjà aujourd'hui 70 propositions commerciales communes entre l'ancienne Altran et Capgemini pour combiner ces forces. Donc, ça marche très vite et très fort. C'est une belle opération qui fait d'Altran-Capgemini le leader mondial de l'industrie intelligente.

Donc, vous confirmez que les affaires continuent pendant la crise. Que dites vous aux salariés qui voient cette opération peut être comme une manière de faire des économies avec d'éventuelles conséquences sur l'emploi ?

Quand on a fait cette opération, nous avons eu le soutien du comité d'entreprise d'Altran, comme celui de Capgemini, parce que c'est une opération pour créer de la valeur. Ce n'est pas une opération de consolidation. Il n'y a pas de plan de licenciement associé à l'opération. C'est pour enrichir les offres d'Altran des données de Capgemini. Donc nous avons eu le soutien des syndicats. En plus, c'est une opération franchement "cocorico" de deux leaders français. Les syndicats sont plutôt enthousiastes.

Vous êtes très présents sur les services informatiques technologie et il y a l'importante question du traçage aujourd'hui pour le Covid. Est ce que vous êtes en avance sur ce sujet ? Qu'est ce que vous allez pouvoir proposer d'un point de vue technologique ?

Le gouvernement a lancé l'Inria (l'Institut national de recherche en informatique), pour piloter. Nous avons été choisis comme étant le maître d'œuvre de l'architecture. Nous avons des grandes compétences informatiques, donc le gouvernement nous introduit un protocole qui s'appelle Robert, qui est un protocole où on que les données médicales sensibles. Ça, nous n'avons pas notre voix au chapitre. On est en train d'intégrer la solution pour qu'elle fonctionne sur les iPhones Apple, sur Androïd, sur toutes les mécaniques.

Coment va fonctionner concrètement ce service ?

Ce sera sur une base volontaire. Les gens doivent décider ou non d'installer cette application sur leur téléphone portable. Deuxièmement, ils communiquent par Bluetooth. C'était dire qu'il n'y aura pas de géolocalisation. Le système ne flique pas les abonnés pour savoir où ils sont. Par contre, le Bluetooth qui va connecter un téléphone à un autre leur signalera qu'ils ont été en contact rapproché avec quelqu'un qui se révèle infecté et les invitera à se faire tester. C'est un mécanisme volontaire qui permet aux abonnés qui l'utilisent de dire : "J'ai été proche de quelqu'un qui s'est révélé infecté. Je ferais bien d'aller me faire tester moi aussi."
 
Donc, vous êtes prêts avec cette technologie ? Est-ce qu'elle va réellement être mise en service malgré les vives polémiques que l'on voit actuellement ?

Le gouvernement s'est engagé à faire un vote au Parlement. Je crois qu'il a lieu la semaine prochaine. nous avons dit que nous serions à livrer l'application dans un démonstrateur vers la mi-mai. Il faut quelques semaines de plus pour avoir quelque chose de robuste. Il ne faut surtout pas qu'on puisse se faire pirater. Ce sont des données sensibles. Il faut avoir quelque chose de très robuste et donc, je pense que dès le mois de juin, on pourra le déployer sur une base de volontariat individuel.

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