Coronavirus Covid-19 : comment la France se prépare à faire face à une éventuelle épidémie
Avec l'apparition d'un important foyer de coronavirus Covid-19 en Italie, la France a annoncé le renforcement de mesures afin de tenter d'empêcher une épidémie dans l'hexagone.
L'épidémie de coronavirus Covid-19 traversera-t-elle les Alpes ? Les autorités italiennes ont revélé que plus de deux cents personnes avaient contracté le virus et annoncé la mise en quarantaine de plus de 50 000 personnes, réparties dans onze communes de Lombardie et de Vénétie (nord du pays), soit à quelques centaines de kilomètres de la frontière française.
Si, en France, il ne restait dimanche qu'un seul malade, hospitalisé à Lyon (Rhône), les autorités sanitaires se préparent à une inévitable augmentation du nombre de cas. "Nous agissons vite, nous agissons fort pour faire face à la menace épidémique (...) et nous prenons toutes les mesures qui sont nécessaires pour assurer la sécurité des Français", a rassuré, dimanche, le ministre de la Santé, Olivier Véran. Des mesures qui ont été renforcées ces derniers jours, alors que la menace d'une épidémie a grandi aux portes de l'hexagone. Franceinfo fait le point sur le dispositif mis en place de ce côté des Alpes.
Au moins un centre hospitalier "activé" par département
Quelque 70 hôpitaux supplémentaires vont "être activés" pour faire face à une éventuelle propagation massive en France du coronavirus. Objectif : avoir au moins un établissement par département en métropole, a indiqué dimanche le ministre de la Santé.
"Pour accueillir les éventuels malades, nous disposions jusqu'à présent de 38 établissements de santé essentiellement les CHU. J'ai décidé en accord avec le Premier ministre que 70 établissements siège d'un Samu seront activés dès demain pour augmenter nos capacités de réponse si c'était nécessaire", a déclaré le ministre lors d'un point presse après une réunion d'urgence de ministres autour d'Edouard Philippe à Matignon.
Ainsi, "tous les départements de métropole disposeront d'au moins un centre hospitalier capable d'accueillir les malades et de les prendre en charge du début à la fin", a-t-il déclaré.
Des professionnels de santé en alerte
Les autorités sanitaires n'avancent pas à l'aveugle face au risque d'une épidémie. La France a ainsi activé "un plan qui s'appelle Orsan REB", a expliqué dimanche Bruno Lina, professeur de virologie au CHU de Lyon et chercheur au Centre international de recherche en infectiologie (Ciri)."C'est une organisation qui cherche à prioriser les actions à mener (lien en pdf) pour la prise en charge des patients, si jamais ce nombre de patients devait augmenter", a-t-il résumé au micro de franceinfo.
Concrètement, en vertu de ce protocole, "on installe des capacités d'admission dans les hôpitaux. Les pouvoirs publics informent les professionnels de santé sur la prise en charge de ces patients. Les éléments cliniques à comprendre, de façon à ce que l'on puisse activer très rapidement, si jamais un foyer épidémique se mettait en place en France, des processus qui vont nous permettre d'éviter une diffusion massive et éventuellement de contrôler l'apparition de ce virus en France", a ajouté le spécialiste.
Ce plan insiste donc sur la nécessité d'identifier "rapidement les cas et leurs contacts selon une procédure préétablie permettant le tri, la prise en charge sécurisée et la confirmation diagnostique", la mise en œuvre de "mesures de prise en charge médicale éventuelles pour les personnes malades et les sujets contacts ou co-exposés", ou encore la limitation du "risque de transmission au personnel soignant et aux autres patients hospitalisés en cas de maladie à contagiosité interhumaine par la mise en œuvre de mesures barrières et d'isolements."
Une multiplication des moyens de dépistage
La France va renforcer ses "capacités de diagnostic" du Covid-19, en multipliant les moyens de dépistage, a confirmé pour sa part le ministre. Selon lui, l'institut hospitalo-universitaire des maladies infectieuses de Marseille est déjà "en capacité de réaliser sur la seule zone de Marseille mille tests par jour. Dans les hôpitaux de Paris, nous sommes à quatre cents tests par jour. Nous allons pouvoir, en amplifiant le mouvement, être en mesure de répondre à toutes les demandes à l'échelle du territoire", a-t-il prévenu.
Pour le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, interrogé lundi sur franceinfo, ce point est essentiel : pour contrer rapidement l'épidémie, il faut "proposer une détection rapide des cas." "Ce qui est important, c'est de détecter rapidement toute personne contagieuse", affirme-t-il. "C'est d'ailleurs pour cela qu'on aura sans doute beaucoup de cas dans les prochaines heures. [...] Le nombre de cas en cours d'investigation doit augmenter. Toute personne qui revient de Lombardie ou de Vénitie avec des symptômes doit être placée comme suspect", a-t-il poursuivi.
De nouvelles commandes de masques pour le personnel soignant
Selon Olivier Véran, des masques de protection seront commandés "en quantité", a destination du personnel soignant. Le Parisien parle "de plusieurs dizaines de millions de masques de protection", de type FFP2 , destinés aux professionnels de santé. Ces masques, très différents des masques chirurgicaux que l'on observe parfois dans la rue, sont efficaces pendant une durée de trois heures.
En effet, pour le citoyen moyen, et notamment les habitants du sud de la France, proches de la frontière italienne, "porter un masque est parfaitement inutile à l'heure à laquelle je vous parle", a nuancé le ministre, Olivier Véran, interrogé dimanche soir lors du 20 heures de France 2. "Si la situation devait évoluer et s'il devenait utile, je partagerai la totalité des informations en transparence."
Pas de fermeture de frontière mais une coopération entre voisins
Dimanche, Olivier Véran a précisé s'être entretenu avec ses homologues italien et allemand. "Nous avons convenu d'un prochain entretien réunissant plusieurs ministres de la Santé de l'Union européenne, probablement la semaine prochaine, pour aborder ensemble comment faire face au risque épidémique", a-t-il indiqué.
Pour l'instant, les autorités n'envisagent guère de fermer les frontières. Ainsi, pour Jérôme Salomon, cela n'aurait "pas beaucoup de sens." "On est dans l'espace Schengen, donc c'est compliqué d'imaginer qu'on mette en place des contrôles aux frontières sur une frontière terrestre alors qu'il y a une frontière maritime, des échanges aériens et qu'on peut se rendre d'Italie en France en passant par la Suisse ou par l'Autriche. Donc on aurait vraiment du mal à avoir des contrôles significatifs", rappelle le directeur général de la santé, cité par Europe 1. Et Eric d'Ortenzio, médecin épidémiologiste à l'Inserm, d'abonder, toujours sur la radio : "La fermeture des frontières n'a jamais arrêté des épidémies. Ce n'est pas une bonne mesure. D'ailleurs, l'OMS ne le recommande pas."
Le directeur général de la santé, lui, insiste sur la nécessité d'informer : "On souhaite que tout le monde soit informé dans un sens comme dans l'autre, qu'il y a bien un foyer en cours d'investigation, en particulier en Lombardie. Et inversement : que les personnes qui viennent de Lombardie sachent quoi faire. Et donc, appeler le 15 si par hasard elles avaient une infection respiratoire dans les jours qui suivent leur séjour".
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.