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"On est des pestiférés" : deux ans après le drame de la rue d'Aubagne à Marseille, des habitants de logements insalubres se disent abandonnés

Marseille commémore ce jeudi 5 novembre les deux ans du drame de la rue d’Aubagne. Depuis ce drame, des centaines de personnes n’ont pas été relogées et vivent dans des appartements provisoires ou à l’hôtel.

Article rédigé par franceinfo, Romane Porcon
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
La rue d'Aubagne à Marseille, le mardi 3 novembre 2020. (NICOLAS TUCAT / AFP)

Simona, Fabien, Niassé, Chérif, Julien, Marie Emmanuelle, Ouloum et Taher. C'est à ces huit personnes mortes dans l'effondrement de deux immeubles de la rue d'Aubagne à Marseille en 2018 que des habitants et associations vont rendre hommage jeudi 5 novembre. Deux ans après le drame, ils ont choisi d'observer huit minutes de silence précises.

"Ma vie n'est pas une vie"

Après l'accident, de nombreux Marseillais comme Nadia ont dû évacuer leur logement. Elle vivait depuis 2012 dans un appartement insalubre, quartier de la Belle de Mai."On a été évacués parce que la charpente allait tomber et je ne pouvais même pas fermer les portes de mon appartement en entier. C'était carrément fissuré, les murs porteurs ne tenaient pas. Je pense que c'est un peu la rue d'Aubagne qui a provoqué cela [l'évacuation de logements dans d'autres quartiers]."

Qu'ils viennent faire un tour à la Belle de Mai parce qu'il y a beaucoup de gens qui habitent actuellement dans des logements insalubres.

Nadia, habitante de Marseille

à franceinfo

Depuis maintenant un an, Nadia vit dans un appart'hôtel, un quotidien difficile à vivre dans une pièce de 15 mètres carrés."Franchement, ma vie n'est pas une vie, en fait. On n'a rien, on n'a pas de machine à laver, on n'a pas de canapé, on ne peut recevoir personne. La vie à l'hôtel, c'est vrai qu'on a un toit sur la tête, mais ce n'est pas comme si on était dans un appartement, explique Nadia. Et je trouve que rien n' est fait pour nous. Quand on arrive à la mairie, on vous écoute même pas. C'est, genre, on est des pestiférés, en fait. Comme si c'était notre faute si les immeubles étaient insalubres."

>> "Ça s'est effondré un lundi" : le témoignage de Sophie, rescapée de la rue d’Aubagne à Marseille.

Et avec la crise du Covid la communication avec la municipalité est encore plus compliquée affirme Nadia : "À chaque fois qu'on me téléphone, ils disent 'Écoutez, vous n'êtes pas toute seule dans ce cas là. Et puis, avec le Covid on ne peut rien faire, tout est fermé.' Ça fait un an que je téléphone, j'envoie des courriers mais rien n'est fait."

Plus de 800 familles toujours en hôtel ou logement temporaire

La situation que décrit Nadia est loin d'être unique déplore Kaouther Ben Mohamed, fondatrice de l'association Marseille en colère. "Depuis le début des évacuations, nous en sommes à près de 5 000 personnes qui ont été délogées et aujourd'hui, il reste 412 personnes qui vivent en hôtel. Il y a 415 foyers qui sont encore aussi en logement temporaire. 

Selon Kaouther Ben Mohamed, toutes ces familles n'ont aucune visibilité sur leur réintégration dans leur domicile. "Si c'est possible, dans quelles conditions et à quel moment ? Et si le retour n'est pas possible, où est-ce qu'elles vont habiter dans un quartier qu'elles n'auront pas choisi ? À quel moment et à quelle temporalité ? Il y a des enfants qui ont malheureusement changé d'école."

Deux ans après, on en est encore sur des prises en charge et des traitement de ces personnes qui sont dignes de l'urgence absolue post effondrement. Ce qui est scandaleux pour la deuxième ville de France. 

Kaouther Ben Mohamed

à franceinfo

L'association attend donc avec impatience la tenue d'un comité de pilotage. Il devrait se tenir avant la fin de l'année. 

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