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Covid-19 : pourquoi les commerçants réclament leur réouverture dès le 13 novembre

Fermés depuis la mise en place du confinement, les commerces dits "non essentiels" veulent rouvrir au plus vite. La question doit être tranchée jeudi en conseil de Défense par le gouvernement.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Rideau baissé pour cause de confinement (illustration). (MARION AQUILINA / RADIOFRANCE)

Depuis la mise en place du deuxième confinement, pour lutter contre l'épidémie de Covid-19, les commerces dits "non essentiels" sont fermés. Dans son discours, le 28 octobre dernier, Emmanuel Macron avait indiqué qu'une réévaluation du dispositif aurait lieu tous les 15 jours. Le Medef, la CPME et les fédérations professionnelles de commerçants demandent donc une réouverture de ces commerces à partir du vendredi 13 novembre.

Tout dépend de la crise sanitaire. Un conseil de Défense est prévu jeudi 12 novembre. Il sera suivi par une conférence de presse à 18 heures du Premier ministre. "Il faut rester optimiste, tant que la décision officielle n'est pas encore tombée, tente Yohan Petiot, directeur général de l’Alliance du commerce, qui représente 27 000 magasins. Mais c'est vrai que si on regarde les choses en face, l'interview lundi de Bruno Le Maire nous laisse peu d'espoir sur une réouverture rapide", admet-il mardi sur franceinfo

Une mesure incomprise du point de vue sanitaire  

"Si je pouvais répondre à la place du gouvernement, bien évidemment, je rouvrirais les commerces, avec des mesures sanitaires renforcées s'il le fallait. Ils sont prêts d'ailleurs", a déclaré mardi sur France Inter François Asselin, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).  

Les commerces ont pris toutes les mesures sanitaires pour accueillir leurs clients.

Yohan Petiot, Alliance du commerce

à franceinfo

Une assertion confirmée par le directeur général de l’Alliance du commerce"Les commerces ne sont pas vecteurs du Covid, plaide-t-il. Nous n'avons toujours pas de visibilité sur cette réouverture. Et ce défaut de visibilité fait monter l'angoisse et le stress chez les entreprises."

Une période-clé dans la balance

François Asselin insiste sur la période-clé des fêtes de fin d'année. Une question de survie pour certains commerçants : "La problématique est encore plus importante parce que là, ce sont vraiment les gros mois d'activité pour beaucoup de commerces."

Pour l'habillement, novembre-décembre-janvier avec les soldes, c'est à peu près 40% de l'activité de toute l'année. S'ils ne font pas ce chiffre d'affaires, ils ne pourront pas s'en remettre.

François Asselin, président de la CPME

à France Inter

Il est impossible de "rater la fin de l'année qui représente entre 20 % et 60 % du chiffre d'affaires", abonde Yohan Petiot. "Nous avons fait des estimations, rapporte-t-il. Pour mémoire, nous étions à fin septembre déjà avec un retard d'activité de 20% sur l'année. Là, avec le mois de fermeture en novembre, si nous ouvrons simplement début décembre, nous serons à moins 30% d'activité sur l'année." Pire encore, selon lui, si l'ouverture est autorisée tardivement au mois de décembre : "Si nous n'arrivons pas à faire Noël, nous aurons une perte d'activité de 40% sur l'année. C'est considérable et beaucoup d'entreprises ne pourraient pas s'en remettre". 

Un doublement redouté des dépôts de bilan

Cette situation est "catastrophique pour certains" commerçants, explique François Asselin car "vous avez un statut d'indépendant, ce qu'on appelle les travailleurs non-salariés". Donc, s'il n'y a "pas de recettes, il n'y a pas de revenus, et pas de revenus signifie pas de salaire, explique-t-il. Et puis, si vous devez baisser le rideau, il vous reste des dettes parce que vous n'avez pas de chômage."

Le patron de la CPME a rappelé qu'il y a "à peu près 50 000 entreprises qui déposent le bilan en année normale". En raison de la crise, "il faut s'attendre à un doublement de cette sinistralité sur l'année 2021". De plus, il estime qu'il y a aujourd'hui "environ 100 000 entreprises en France qui ont moins d'un mois de trésorerie" et cela provoque une "angoisse très forte" pour les entrepreneurs qui se retrouvent "à la merci de leur banquier qui peut leur refuser d'aller plus loin".

Le "click and collect" insuffisant

Les commerçants, fermés à cause du confinement, tentent de maintenir leur activité grâce au retrait de commandes en boutique. Mais le click and collect est "techniquement facile, mais dans la réalité, on s'aperçoit que c'est beaucoup plus difficile, explique Jean-Pierre Lehmann, président de Vitrines de France. Mettre un site internet en place, c'est quasiment ouvrir une deuxième boutique."

Surtout cette présence en ligne "ne permettra pas de compenser la perte de chiffre d'affaires, explique le directeur général de l’Alliance du commerce Yohan Petiot. Il faut bien se rendre compte qu'aujourd'hui, le e-commerce dans le secteur de la mode par exemple représente 15% en moyenne de l'activité."

Le chiffre d'affaires en ligne va augmenter du fait de la fermeture de nos magasins, mais s'il atteint 20% ou un peu plus, ce sera déjà un maximum.

Yohan Petiot, Alliance du commerce

à franceinfo

Pour les représentants du commerces, ces ventes sur Internet sont insuffisantes pour compenser toute la perte d'activité lors du confinement. "Si nous pouvons faire du click and collect, nous le faisons ; s'il est possible de faire du rendez-vous, il faut le faire, mais c'est insuffisant", conclut Yohan Petiot.

Des mesures de soutien pas adaptées

"Il faut que les mesures de soutien mises en œuvre par le gouvernement soient véritablement à la hauteur, réclame Yohan Petiot. Aujourd'hui, ce n'est pas le cas, parce que ces mesures laissent de côté toutes les entreprises moyennes et grandes, qui ont plusieurs établissements ou magasins".

Aujourd'hui, ces enseignes ne peuvent pas, par exemple, bénéficier du fonds de solidarité. Elles ne peuvent pas bénéficier non plus du crédit d'impôt prévu par Bruno Le Maire sur les loyers, puisqu'il est limité aux entreprises de 250 salariés. 

Yohan Petiot, directeur général de l’Alliance du commerce

à franceinfo

Pour le directeur général de l'alliance du commerce, aucune mesure n'est prévue dans le plan de soutien pour les ETI (entreprises de taille intermédiaire). "Et il y en a beaucoup en France qui sont en difficulté aujourd'hui", alerte-t-il. "Notre demande, c'est d'abord de rouvrir au plus vite et deuxièmement, d'étendre les mesures de soutien aux ETI françaises dans le commerce", conclut Yohan Petiot.

"Il faut trouver un moyen de financer les stocks" pour que les commerçants "puissent payer leurs fournisseurs et que demain ils puissent espérer relever le rideau pour vendre leurs marchandises", évoque de son côté François Asselin. Il faut trouver un moyen aussi sur les loyers", a ajouté le chef d'entreprise. Pour cela, il demande "aux bailleurs de faire des efforts", tout en sachant que la situation est compliquée car "parfois le bailleur, c'est l'ancien commerçant, c'est l'ancien artisan pour qui son magasin qu'il loue, son pas-de-porte, c'est sa retraite, ou l'essentiel de ses revenus".

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