Au Brésil, face à un président qui qualifie le coronavirus de "fantaisie", la société civile s'organise
Des équipes de football, des médias, des associations d'habitants tentent de protéger la population, dont la frange la plus pauvre risque d'être très touchée par l'épidémie de Covid-19.
Avec 2 433 cas et 57 morts en raison du coronavirus, le Brésil est le pays le plus touché d'Amérique latine. Mais face à des autorités qui restent globalement passives face à l'épidémie, c'est la société civile qui est en pointe dans ce combat, en commençant par les équipes de football, dans un pays qui vénère ce sport et qui est privé de compétitions pour au moins deux mois.
Dès que la décision a été prise d’annuler les championnats de "futebol", les présidents des plus importantes équipes ont fait de la pédagogie sur le Covid-19, pour les supporteurs, mais aussi pour les enfants, qui s'entraînent dans les clubs. Au Brésil, les grandes formations de foot proposent aussi d'autres sports, comme la natation, l'athlétisme ou l'aviron par exemple, elles touchent beaucoup de monde. Les clubs diffusent notamment sur les réseaux sociaux les bons gestes d'hygiène pour limiter la propagation de l'épidémie.
20 clubes ainda disputam a minha #TerceiraFase.
— Copa Continental do Brasil () (@CopadoBrasil) March 25, 2020
Mas, antes da minha volta, chamei uma conhecida de vocês para dar alguns avisos!
Contamos com vocês para que eu volte logo! @8bitfootball #CopaContinentalDoBrasil pic.twitter.com/EsZ3Gi1zif
Un stade de football transformé en hôpital à Sao Paulo
Depuis la semaine dernière, toutes les installations des clubs de football sont fermées. Dans un geste inédit, ils viennent de proposer aux autorités d'utiliser les stades pour les transformer en hôpitaux. Sao Paulo et Rio de Janeiro, qui sont les États les plus touchés par le coronavirus, ont aussi des systèmes de santé très défaillants.
Ainsi, le mythique stade Maracana et le stade olympique Nilton Santos, à Rio de Janeiro, ou encore le stade Itaquerao à Sao Paulo (construit pendant la coupe du monde en 2014) pourront devenir des installations sanitaires. Le stade Pacaembu, à Sao Paulo, a d'ailleurs déjà commencé à se transformer en centre d'accueil pour les cas mineurs de coronavirus.
Seguimos a todo vapor na luta contra o Coronavírus! Essa é prioridade #SPContraOCorona #FiqueEmCasa #NaoSejaUmPropagador - Crédito: @AllegraPacaembu pic.twitter.com/9L5xWLUGc5
— Cidade de São Paulo (@prefsp) March 24, 2020
Reste aux autorités à organiser ces structures, ce qui n'est pas encore le cas. À Brasilia, on regarde pour l'instant le coronavirus avec circonspection. Selon le président brésilien, il n’y a pas de quoi s'affoler et il ne faut surtout pas bloquer l’économie. Jair Bolsonaro, climatosceptique notoire, semble douter également de la dangerosité du virus. Il a qualifié la pandémie de "petite crise", "fantaisie", "hystérie", "problème surdimensionné". Le chef de l'État, dont une partie de l'entourage a contracté le virus, a même continué à s'adonner à des bains de foule, alors qu'il était lui-même suspecté d'être infecté.
L'OMS s'inquiète du manque de préparation
Selon le président, les médias exagèrent la situation. Jair Bolsonaro critique les décisions prises par les gouverneurs des États de Rio et de Sao Paulo, les maires de ces villes ayant imposé des mesures de restriction. Ce sont les autorités locales qui ont déterminé la fermeture des écoles et depuis mercredi, celle des commerces qui ne sont pas indispensables.
L'OMS s’inquiète du manque de préparation du Brésil. Si le président Bolsonaro répète que le pays est prêt à faire face, les spécialistes ont une toute autre vision : plus de la moitié de la population vit en favelas dans les États de Rio et Sao Paulo, qui sont les plus peuplés. Dans ces secteurs, la promiscuité et le manque de services publics sont une réalité, certains habitants n'ont même pas d’eau pour se laver les mains. Hier, on apprenait que des cas de coronavirus ont déjà été détectés dans deux grands complexes de favelas à Rio, dont "la cité de Dieu". Ces habitants sont aussi ceux qui travaillent toujours, car vivant le plus souvent de l'économie informelle et n'ayant d'autres choix que de continuer à travailler.
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