Afrique : le choix de la chloroquine ?
Depuis le début de l'épidémie, le sort de l'Afrique inquiète. L’ensemble du continent est désormais touché, amenant les états à prendre des mesures : confinement, quarantaines, distanciation sociale. Et à faire des choix thérapeutiques déjà, comme pour certains la très controversée chloroquine.
Le Maroc, Madagascar, le Burkina Faso, le Cameroun, l’Afrique du Sud… A travers tout le continent, plusieurs pays ont décidé d'autoriser l'utilisation de la chloroquine en milieu hospitalier. A commencer par le Sénégal, où, pour l’anecdote, est d’ailleurs né l'infectiologue Didier Raoult, promoteur de cette thérapie. Les scientifiques africains chargés de mener la lutte contre le Covid-19 restent évidemment prudents. Faute d’essais cliniques de grande ampleur, conviennent-ils, il n’y a pas de preuve formelle encore de l’efficacité de la chloroquine sur le coronavirus. Mais eux, disent-ils, sont obligés de calculer en termes de bénéfice/ risque.
Compte tenu du très faible nombre de respirateurs ou de lits en réanimation dans la majeure partie des pays africains, si l’utilisation de cette molécule peut permettre de réduire la durée d’hospitalisation, leur choix est fait. Et de répéter que les chercheurs africains sont probablement les mieux placés pour connaître les effets secondaires de la chloroquine, tant elle a été utilisée, et de façon massive dans le cadre de la lutte contre le paludisme. Son utilisation a été stoppée à la fin des années 1990, non en raison de sa toxicité, mais de la résistance qui s’est développée.
Stocks préemptés
La chloroquine, cependant, reste facilement trouvable et très bon marché. Ou plutôt, l’était, jusqu’à ce que l’espoir provoqué par les annonces du professeur Raoult n’entraîne une ruée vers les pharmacies privées de nombreux pays, notamment en Afrique de l’Ouest. Ce qui amené plusieurs états à en interdire la vente en pharmacie – sauf sur ordonnance, dans le cas de maladies comme le lupus – et d’en préempter les stocks existants pour les réserver à la médecine hospitalière. Le Maroc, le mois dernier, a ainsi réquisitionné les stocks du laboratoire Sanofi.
Des mesures qui inquiètent l’OMS qui continue de mettre en garde les pays africains sur les risques d’entretenir une trop grande confiance sur cette possible thérapie. Ceux qui font le choix de la chloroquine de fait, le martèlent : il ne faut surtout pas s’automédiquer. Mais dans un cadre hospitalier, nombreux sont ceux, à l’image du médecin congolais Denis Mukwege, prix Nobel de la paix, qui estiment que selon eux, face au manque d’infrastructures, entre deux maux, ils préfèrent choisir le moindre.
L'Afrique, test géant pour la chloroquine ?
Chloroquine, et même au-delà : vendredi dernier, le coordinateur national de la lutte anti covid en République Démocratique du COngo a en effet annoncé que son pays était candidat pour les essais de vaccins qui devraient avoir lieu à l'été. Jean-Jacques Muyembé, co-découvreur du virus Ebola, dit avoir pris cette décision à la lumière de son expérience des multiples épidémies d’Ebola traversées par son pays.
La dixième, en passe d’être terminé, a été maîtrisée, pense-t-il parce que des centaines de milliers de congolais ont participé aux tests pour deux vaccins, dont le premier est en cours d’homologation. Un choix polémique qui soulève la colère de nombreuses voix africaines qui refusent d’être ainsi les cobayes de la planète.
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