Chasse : gare à la tularémie
La chasse est ouverte. Et les cibles du jour, les lièvres, peuvent se venger des chasseurs en leur transmettant une maladie méconnue. C'est arrivé il y a quelques années à Quentin, un jeune chasseur de 25 ans : "Je n'arrivais pas à marcher, j'étais fatigué toute la journée, j'avais de la fièvre… J'ai perdu six kilos... Et puis j'ai eu un ganglion sous le bras droit, ça a gonflé et j'ai fini par aller voir mon médecin".
Son médecin traitant pense d'abord à la grippe. Deux semaines plus tard, sa température reste autour de 41 degrés. C'est le remplaçant qui oriente Quentin vers le CHU de Reims. Là, les médecins pensent enfin à la tularémie. Une maladie infectieuse qui passe facilement du lièvre à l'homme. "Ils m'ont demandé si je chassais, je leur ai dit oui…", se souvient Quentin. "Ils ont conclu que ça devait remonter à la fois où j'ai tué un lièvre : après on a déjeuné sans trop se laver les mains…".
C'est aussi dans l'assiette que le lièvre peut transmettre la bactérie Francisella tularensis. Car elle résiste à la congélation et à une cuisson trop courte. Mais la contamination la plus courante concerne le chasseur : "C'est par voie cutanée que ça se passe", explique le Dr Violaine Laurant-Noël, spécialiste en médecine interne au service des maladies infectieuses du CHU de Reims. "Le chasseur va se blesser avec son couteau en dépeçant l'animal, un autre va manipuler un cadavre d'animal en ayant une petite plaie sur la peau... La bactérie va alors en profiter pour entrer dans l'organisme et donner cette forme classique de la tularémie : une atteinte cutanée qui reste inaperçue, suivie d'un ganglion satellite".
Alerte nationale et locale
Faire le diagnostic rapidement est important pour le patient bien sûr. Il faut un antibiotique spécifique car la bactérie résiste à la pénicilline. Mais cela déclenche aussi un dispositif d'alerte nationale et locale, auprès de l'Agence régionale de santé, l'ARS. "Si on déclare les contaminations assez vite, assez tôt, l'ARS mène une enquête autour du cas pour qu'il y ait des mesures de prévention et d'information auprès des chasseurs", rappelle le Pr Christophe De Champs, chef du Laboratoire de bactériologie au CHU de Reims.
Les chasseurs de Champagne-Ardenne ont ainsi été sensibilisés cette année car plus de 10% des cas de tularémie recensés en 2015 étaient dans la région. Et les consignes sont très claires. "Si au cours de la chasse on attrape un lièvre qui nous paraît douteux, on le laisse sur place, on nettoie les chiens, et on téléphone à la fédération", explique Thierry Galichet, de la Fédération départementale des chasseurs de la Marne. Le cadavre d'animal est ensuite acheminé jusqu'à un laboratoire spécialisé en faune sauvage.
En cas de tularémie, le niveau d'alerte local est renforcé. La bactérie est contenue dans les déjections d'animaux contaminés et peut survivre des mois sur une feuille. Il faut aussi redoubler de vigilance face aux tiques qui peuvent la transmettre. L'homme et les chiens sont alors en première ligne.
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