Reportage "On est épuisées" : à partir du 1er janvier, les femmes victimes d'une fausse couche auront un arrêt maladie sans jour de carence

Jusqu'à maintenant, un arrêt maladie suite à une fausse couche était semblable à un arrêt classique, c'est-à-dire avec des jours de carence. Ce ne sera plus le cas en 2024 puisque ce délai est supprimé dans ce cas précis.
Article rédigé par franceinfo
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Chaque année, en France, 200 000 femmes sont victimes de fausse couche (photo d'illustration). (PEAKSTOCK / SCIENCE PHOTO LIBRAR / LDA)

À partir du 1er janvier, les femmes victimes de fausse couche pourront bénéficier d'un arrêt maladie sans délai de carence, c'est-à-dire qu'elles n'auront pas trois jours de retenue sur salaire, comme c'est le cas habituellement lors d'un arrêt maladie. Pour les 200 000 femmes concernées chaque année en France par une fausse couche, ce changement engage une meilleure considération du drame qu'elles vivent. 

Julie a fait une fausse couche alors qu'elle était à près de neuf semaines. Elle a vécu cette véritable épreuve il y a trois semaines et a dû se rendre à l'hôpital, en plein milieu de la nuit, avec son mari et sa fille. Auprès des urgences, elle a difficilement obtenu un jour d'arrêt de travail. Cet arrêt a ensuite été renouvelé par son médecin pour trois semaines. 

"Ce qui est assez traumatisant, c'est qu'on perd énormément de sang, décrit-elle. On est épuisé. Ça peut durer jusqu'à 15 jours, voire plus. Ça, c'est le côté physique. Il y a aussi le côté psychologique et émotionnel. Il y a une grosse tristesse, un sentiment de vide".

"Pour la première fois de ma vie, j'ai pris des anxiolytiques, justement pour gérer ça".

Julie

à franceinfo

Réceptionniste dans un hôtel-restaurant, il était inenvisageable pour elle de retourner accueillir du public comme si de rien n'était. "C'est difficile pour moi de me dire 'il faut que je m'arrête'. Là, je n'ai pas eu le choix. Si je ne l'avais pas fait, j'aurais dû le faire après parce que mon corps m'aurait sûrement lâchée après", explique-t-elle. 

Considéré comme un arrêt maladie classique, elle a eu trois jours de carence pour lesquels elle n'a donc pas été payée. "Pour le nombre de femmes qui vivent ça, c'est un peu abusé, on ne va pas se mentir. Je n'ai pas de mal à me nourrir, je n'ai pas de mal à me loger mais je pense à ces femmes qui n'ont pas cette chance-là", poursuit-elle.

Un premier pas pour une meilleure considération

Sandra Lorenzo est journaliste et co-fondatrice du collectif "Fausse couche, vrai vécu", et dans son entreprise, il n'y a pas de délai de carence. Après sa fausse couche en 2020, tous ses jours d'arrêt ont donc été indemnisés : "Ça m'a semblé normal. Vivre un arrêt de grossesse et en plus, avoir une perte financière, ça me semble totalement inhumain". Pour elle, cette nouvelle mesure est un premier petit pas pour que le corps médical prenne mieux en considération le drame qui se joue pour ces femmes. 

"J'espère que cette levée des jours de carence va aussi faire que les médecins vont, peut-être, plus avoir en tête qu'une fausse couche, un arrêt naturel de grossesse, ça entraîne un arrêt de travail. Une femme qui n'est pas arrêtée, c'est une femme qui peut traîner le traumatisme de cet arrêt de grossesse pendant longtemps", estime-t-elle. C'est donc un premier pas mais bien insuffisant car, selon elle, trop de femmes se retrouvent isolées après une fausse couche. Sandra Lorenzo appelle à mieux les entourer, ainsi que leur famille.

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