"Ils vont facturer l'équivalent d'une prothèse, alors qu'un simple détartrage a été réalisé", alerte jeudi 9 mars sur franceinfo le directeur général de la Caisse nationale d'Assurance maladie, Thomas Fatôme. Alors qu'en 2022, l'essentiel de la fraude provient des professionnels de santé, en particulier des centres dentaires et ophtalmologiques, un nouveau record de 315 millions d'euros a été atteint. "C'est la traduction de la mobilisation des équipes dans la détection, le contrôle et les sanctions", estime Thomas Fatôme. >>> Tarifs des consultations médicales : pourquoi les négociations sont tombées à l'eau Le directeur général de la Caisse nationale d'Assurance maladie relativise cependant ce record, si on le compare aux "230 milliards d'euros de budget" du dispositif de santé. Ces 315 millions d'euros de fraude "restent une somme limitée" et "l'immense majorité des assurés et des professionnels respectent les règles du jeu."franceinfo : Comment expliquez-vous cette fraude record, notamment dans les centres dentaires et ophtalmologiques ?Thomas Fatôme : C'est un chiffre en effet record, et c'est la traduction de la mobilisation des équipes dans la détection, les contrôles et les sanctions. On a en face de nous, malheureusement, un certain nombre de centres dentaires ou ophtalmologiques qui ne respectent pas les règles de ce qu'on appelle la nomenclature des actes. Ils vont coter l'équivalent d'une prothèse, alors que c'est un simple détartrage qui a été fait. "On a malheureusement une palette de fraudes assez diversifiées dans un certain nombre de centres ophtalmologiques et dentaires."Thomas Fatôme, directeur général de la Caisse nationale d'Assurance maladiesur franceinfoOn a actuellement une cinquantaine de centres dentaires et plus d'une trentaine de centres ophtalmologiques qui font l'objet d'un contrôle. Nos enquêteurs vont aller regarder chacun des dossiers, pour voir précisément ce qu'il se passe. Aussi, durant la crise sanitaire, un certain nombre d'acteurs, notamment des pharmaciens, sont allés loin dans la fraude durant la période de lutte contre le Covid. On estime ce préjudice à près de 60 millions d'euros. Plus d'une soixantaine de pharmacies ont été poursuivies. On peut saluer la forte mobilisation des médecins et pharmaciens sur les tests et la vaccination durant la crise sanitaire, mais malheureusement, un certain nombre d'entre eux ont fait de fausses factures à l'Assurance maladie.Lorsqu'il y a un abus d'un centre, le patient peut-il s'en rendre compte ?En premier lieu, ces abus sont détectés par le travail à partir des données de l'Assurance maladie, grâce à l'analyse de nos équipes. On fait des travaux importants de big data pour identifier les lieux à contrôler. Dans un certain nombre de cas, ce sont aussi des patients qui nous signalent que les relevés de soins ne correspondent pas avec ce qu'ils ont reçu. "On invite les patients à ne pas hésiter à nous solliciter, s'ils voient des choses étranges. Certains nous contactent via le numéro de téléphone de la Caisse, le 36 46, ou alors par mail."Thomas Fatôme, directeur général de la Caisse nationale d'Assurance maladiesur franceinfoEn réaction, nous venons de déconventionner, par exemple, deux centres de santé en Ile-de-France, d'autres procédures sont en cours dans certains départements. Il pourrait y en avoir plus. En déconventionnant, on arrête le plus vite possible des remboursements et des dépenses quand nous avons des fraudes avérées. Dans les 9 000 procédures en 2022, il y en a à peu près un tiers qui passe par la voie pénale. Nous n'hésitons pas à mobiliser cette voie. Nous pouvons aussi mobiliser des pénalités financières. Nous pouvons aussi saisir les ordres professionnels quand ça révèle de leur responsabilité. Ces 315 millions d'euros de fraude ont-ils un impact sur le budget de l'Assurance maladie ? Si on met en lien ces 315 millions d'euros détectés avec les plus de 230 milliards d'euros de budget de l'Assurance maladie, ça reste une somme limitée. L'immense majorité des assurés et des professionnels respectent les règles du jeu. On a aujourd'hui plus de 1 600 agents qui sont spécialisés dans cette lutte contre la fraude. Nous avons aussi investi dans les systèmes d'information pour récupérer les données.