Canicule : le cri d'alarme de l'urgentiste Patrick Pelloux
"La fréquentation des services d'urgences suit exactement la courbe des températures : autant dire que la situation deviendra intenable dans les prochains jours", alerte le Dr Patrick Pelloux, président de l'Association des médecins urgentistes de France. L'urgentiste qui a donné l'alerte en 2003 sur les effets dramatiques de la canicule est extrêmement inquiet. Selon lui, depuis le début de l'été, les urgences sont déjà proches de la saturation : "On est à flux tendu, explique-t-il. 80% de nos services ont des problèmes d'effectifs et la canicule aggrave une situation catastrophique".
Des urgences en surchauffe face à la canicule
Ces derniers jours avec la montée du mercure, l'affluence ne cesse d'augmenter dans les services d'urgences : patients âgés, atteints de maladies chroniques, personnes sans domicile fixe, mais aussi des sportifs ou travailleurs de force... "Pour eux, l'attente est interminable et souvent sans climatisation, ni ventilateur", dénonce le Dr Pelloux, qui exerce au SAMU de Paris.
Une attente qui peut se prolonger même après l'examen par un médecin faute de pouvoir être transféré dans un service approprié. "75% des plus de 75 ans qui se présentent aux urgences nécessitent une hospitalisation", précise le Dr Pelloux. "C'est concrètement incompatible avec la baisse du nombre de lits, conséquence des économies demandées par le gouvernement".
Aux urgences de l'hôpital Lariboisière au nord de Paris, le délai de prise en charge peut atteindre certains jours jusqu'à dix heures selon les témoignages recueillis par le journal Le Monde. Un patient aurait ainsi failli succomber à un infarctus en salle d'attente.
La canicule de 2003 dans toutes les mémoires
Les équipes qui étaient déjà là en 2003 restent marquées par cette canicule qui avait entraîné la mort de près de 20.000 personnes en France. Elles ont peur qu'un tel drame se reproduise quinze ans plus tard. Car depuis, selon le Dr Pelloux, la situation s'est beaucoup dégradée. "À titre de comparaison, en 2003, les urgences avaient reçu 12 à 13 millions de personnes en une année. Aujourd'hui, on recense entre 21 et 22 millions de passages par an, alors que les moyens ne cessent de diminuer", explique le Dr Pelloux.
Pour lui, les "plans blancs" qui peuvent être déclenchés par le gouvernement dans les hôpitaux pour faire face à l'afflux massif de personnes en situation d'urgence sanitaire, seront en réalité difficilement applicables. "Le personnel est épuisé, démotivé. Il sera très difficile de les faire revenir de vacances pour travailler, avertit l'urgentiste. On n'a plus aucune ressource, on est littéralement abandonné par le gouvernement", explique l'urgentiste.
Les urgences de la Timone à Marseille en saturation
Un sentiment partagé par de nombreux collègues qui l'appellent à l'aide ces jours-ci. "Je suis très inquiet, une infirmière de Marseille m'a raconté par exemple ce matin à quel point elle et son équipe sont épuisées et en souffrance", s'alarme le Dr Pelloux. "Ils ne demandent pas d'argent, juste des moyens humains pour soigner dignement et sans dangers pour les patients".
Sa collègue lui a aussi fait part des nombreux non remplacements d'une partie du personnel. Il y aurait par exemple aux urgences de la Timone cinq aides-soignantes au lieu de douze selon un autre témoignage recueilli par La Provence. Faute de se sentir écoutées par leur direction, les équipes ont lancé une pétition ouverte à tous pour obtenir des renforts.
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