On vous explique la polémique autour de Sniffy, la poudre "énergisante" rappelant la cocaïne et bientôt interdite
Sniffy est-il un simple produit aux effets stimulants, ou une substance qui banalise la consommation de drogue ? Le gouvernement a tranché pour le second : la ministre de la Santé Catherine Vautrin a annoncé que le gouvernement publiera dans les prochains jours un arrêté pour interdire la vente de cette poudre blanche disponible sur internet et chez certains buralistes, lors d'un déplacement mercredi 24 juillet.
Le gouvernement avait déjà annoncé fin mai son intention d'interdire cette poudre à inhaler par le nez et présentée comme énergisante. La mesure sera prise "d'ici ce week-end", a précisé sur franceinfo le ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, Frédéric Valletoux. On vous explique ce qu'il faut savoir sur cette affaire.
Une poudre présentée comme énergisante et pouvant être inhalée
Produite par la société Power Factory, Sniffy est une poudre aromatisée. Officiellement composée de plusieurs substances légales comme la L-arginine (un acide aminé), de la caféine, de la créatinine ou encore de la taurine, elle promet, sur son site, au consommateur de "booste[r] [s]on énergie quasi instantanément" et pendant "quelques dizaines de minutes".
La société recommandait initialement de consommer cette poudre "énergisante" en la respirant par le nez, à la manière de substances illégales comme la cocaïne (d'où le nom proche du verbe "sniffer"). L'entreprise jouait ouvertement sur cette allusion : "Une poudre blanche qu'on inhale par le nez ? Bien que cela puisse évoquer le plaisir interdit, c'est totalement conforme à la loi", écrivait-elle sur son site.
Un produit accusé de banaliser la consommation de drogue
Le gouvernement et de nombreux professionnels de santé ont rapidement estimé que le parallèle avec la drogue était trop évident. "C’est rageant de voir ce genre de produits proposés à la jeunesse", dénonçait dès le 25 mai le ministre délégué en charge de la Santé et de la Prévention, Frédéric Valletoux. "Ma crainte, c'est celle d'une très mauvaise habitude, parce qu'une poudre blanche que vous commencez à sniffer c'est parfaitement addictif et le lien avec des produits illicites est évident", a commenté Catherine Vautrin mercredi depuis l'hôpital Necker à Paris, où elle rencontrait les équipes du Samu de Paris.
"C'est la symbolique de la cocaïne qui est vendue là-dedans", résumait sur BFMTV Amine Benyamina, psychiatre-addictologue. "Il n'y a pas que le geste, c'est le geste et tout le pensif inconscient autour du produit qui est sous forme de poudre, avec une pipette qui est l'équivalent de la gestuelle et du rituel de la cocaïne, c'est encore plus pernicieux qu'on ne peut l'imaginer", a-t-il ajouté, dénonçant "un produit qui n'est pas toxique au sens de ses composants, mais qui l'est par le message qu'il véhicule".
Face à ce premier tollé, l'entreprise Power Factory promet sur son site n'avoir "jamais cherché à provoquer dans l’esprit du consommateur" "une prétendue incitation à la consommation de cocaïne". Le choix de l'administration par inhalation n'aurait été pensé que "pour accentuer la rapidité de l’effet énergisant du produit", et est abandonné au profit d'une absorption par voie orale. Sur son site, la phrase évoqaunt "le plaisir interdit" a été changée en juin en "pas d'amalgame, Sniffy est légale", souligne 20 Minutes.
Une interdiction prochaine (aux fondements légaux encore flous)
Dès le mois de mai, le gouvernement avait annoncé travailler pour interdire la vente de Sniffy. Auprès de franceinfo, le cabinet de Catherine Vautrin assure que la ministre a signé l'arrêté mercredi 24 juillet, avant de le transmettre au secrétariat général du gouvernement pour publication prochaine.
Parmi les étapes nécessaires avant la publication de ce texte, la France a notamment dû notifier la Commission européenne de son projet d'interdire un produit en urgence. Après une première demande en juin (retirée volontairement par la France), les autorités ont déposé une deuxième demande légèrement différente le 2 juillet.
Elle réclame de pouvoir interdire pendant un an la vente de produits sous forme de poudre contenant des substances stimulantes, qui demandent ou suggèrent d'être inhalées, et qui "entretiennent une confusion avec la consommation de stupéfiants". Tout en excluant de ce périmètre "les médicaments, les dispositifs médicaux et les produits de tabac".
La formulation paraît donc taillée pour Sniffy, d'autant plus que la deuxième demande inclut également les produits qui présentent une "similarité (...) masquée avec l'usage de stupéfiants", permettant ainsi de s'adapter au discours de l'entreprise qui rejette toute comparaison (même humoristique) avec la cocaïne.
Après une demande de précisions de la Commission et des réponses de la France, Bruxelles a accepté l'adoption urgente d'une mesure d'interdiction. Mais elle précise que cette décision ne dit rien de la validité de l'interdiction au regard du droit européen.
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