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Macron "président du vin", partenariat avec les banques alimentaires, étiquetage... L'association Addictions France dénonce les pratiques des lobbies de l'alcool

Dans son rapport annuel publié mardi, l'association s'en prend notamment au chef de l'Etat, qu'elle accuse de soutenir le secteur du vin, au détriment des enjeux de santé publique.
Article rédigé par franceinfo
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Une personne consomme de l'alcool sur une terrasse à Strasbourg (Bas-Rhin), en septembre 2020. (Photo d'illustration) (JEAN-MARC LOOS / MAXPPP)

L'image a fait réagir, parfois sourire. Mais elle a surtout fait bondir l'association Addictions France. A l'issue de la finale du Top 14, samedi 17 juin, Emmanuel Macron a été filmé face caméra en train de boire une bière cul-sec. Cette séquence "illustre la manière dont les lobbies de l'alcool, grâce au soutien politique, sapent le travail des organisations de santé", dénonce l'association sur son site internet, mardi 20 juin.

La bière engloutie d'une traite par le président n'est pas le seul exemple de sa proximité avec le secteur de l'alcool, regrette Addictions France. Dans son rapport annuel sur les pratiques des lobbies de l'alcool, publié le même jour, l'association s'en prend plus largement à Emmanuel Macron, qu'elle décrit en "président du vin".

Addictions France rappelle notamment que le 7 janvier 2022, quelques mois avant sa réélection, Emmanuel Macron avait été nommé "personnalité de l'année" par La Revue du vin de France. "Vous défendez le vin systématiquement et l'associez très souvent à l'idée même que vous vous faites de la France, quand vos prédécesseurs paraissaient avoir abandonné ce fleuron de notre pays", l'avait félicité le directeur de la rédaction du magazine, Denis Saverot, lors de la cérémonie de remise du prix.

A cette occasion, Denis Saverot avait également remercié Emmanuel Macron d'avoir déclaré, quelques années plus tôt, qu'il buvait du vin "tous les jours, midi et soir". "Pour nous, c'est le meuilleur slogan", s'était-il félicité, alors que cette habitude dépasse les recommandations des autorités sanitaires, qui fixent le seuil de consommation d'alcool à "deux verres par jour maximum et pas tous les jours"

Un partenariat entre le lobby de l'alcool et les banques alimentaires

Chaque année, rappelle d'ailleurs Santé publique France, 41 000 décès sont attribuables à l'alcool, sa consommation, "même à faible dose", multipliant "les risques de cancers, d'accidents vasculaires cérébraux hémorragiques (AVC) et de troubles du rythme cardiaque".

Addictions France épingle aussi un partenariat signé en septembre 2021 entre l'association Prévention et modération et la fédération française des banques alimentaires, pour "promouvoir auprès des bénéficiaires de l'aide alimentaire une consommation responsable à travers la formation des bénévoles". Cette association regroupe des industriels de la bière, des spiritueux et des vins d'apéritifs. Autrement dit, "un lobby alcoolier, sans lien avec les professionnels et les associations de santé", déplore Addictions France. 

Cette "immersion des alcooliers dans le domaine de la prévention" est vue comme une "valorisation d'un secteur dont les produits nuisent à la santé des populations", selon Addictions France, qui dénonce du healthwashing, une pratique consistant à "promouvoir des arguments ou actions liées à la santé pour faire oublier l'impact de son activité sur la santé des populations". L'association dit redouter les conséquences de la "transmission d'informations biaisées sur les dommages de l'alcool auprès des publics précaires", qui sont les plus à risque de consommer de l'alcool.

Un manque de transparence sur les étiquettes

Dans son rapport annuel, Addictions France s'attaque aussi au manque de transparence sur l'étiquetage des alcools. L'association regrette qu'il ne soit pas possible de choisir une bouteille en tenant compte de sa composition et de sa teneur en calories en un coup d’œil, comme pour n’importe quelle boisson sans alcool. "Ce retard est révélateur de l'influence des industriels sur le processus de décision publique : depuis plus de cinq ans que le sujet est à l'agenda, les lobbies de l'alcool usent de tous les artifices et de la complexité de la procédure législative européenne pour éviter la mise en place d'une information légitime, et attendue, des consommateurs", dénonce Addictions France.

Selon l'association, les lobbies de l'alcool sont particulièrement actifs à Bruxelles, alors que 77% des Européens se sont prononcés, lors d'une consultation publique sur le sujet, "en faveur d'un étiquetage complet des ingrédients et des informations nutritionnelles directement sur les contenants, pour tous les types d'alcool". 

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