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La vente de cigarettes électroniques réservée aux buralistes, selon la justice

Le tribunal de commerce de Toulouse a ordonné à un vendeur spécialisé de cesser de vendre des e-cigarettes, au motif qu'il violait "le monopole d'Etat sur la vente du tabac".

Article rédigé par franceinfo avec AFP et Reuters
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Le gérant du magasin d'e-cigarettes Esmokeclean, devant sa boutique de Plaisance-du-Touch, en banlieue toulousaine, le 7 octobre 2013. (MAXPPP)

La vente de cigarettes électroniques hors du réseau des buralistes et la publicité pour ces produits constituent "un acte illicite""viol[ant] le monopole d'Etat sur la vente du tabac", et "une concurrence déloyale". Tel est le jugement rendu, lundi 9 décembre, par le tribunal de commerce de Toulouse (Haute-Garonne). Francetv info vous explique les enjeux de cette décision.

Une première en France

Un buraliste de Plaisance-du-Touch, près de Toulouse, avait déposé plainte contre la boutique Esmokeclean qui vendait des cigarettes électroniques, depuis juin, à une dizaine de mètres de son bureau de tabac.

Il accusait les responsables de la boutique de violer la réglementation du Code de la santé publique en faisant de la publicité en faveur des e-cigarettes dans leur magasin, sur leur page Facebook et leur site internet.

Le tribunal lui a donné raison. Il a ordonné à Esmokeclean de cesser de vendre des cigarettes électroniques et d'en faire la publicité. Le commerçant est aussi condamné à 3 500 euros d'amende et un euro symbolique de dommages et intérêts.

Une possible jurisprudence

Le tribunal a estimé que les produits de substitution au tabac relevaient de la législation sur le tabac et que leur vente était soumise au monopole des buralistes.

Par conséquent, ce jugement "crée une jurisprudence", estime Bertrand Desarnauts, l'avocat du buraliste qui avait porté plainte. Car, selon lui, la justice "affirme que la vente de tous les produits pour fumer est réservée au réseau des buralistes". "Ce qui implique, ajoute-t-il, que les autres vendeurs de cigarettes électroniques devront cesser la vente de la cigarette électronique en magasin et sur Internet."

L'avocat de la boutique mise en cause soutient, lui, que la cigarette électronique ne fait l'objet d'aucune réglementation et ne tombe donc sous le coup d'aucun monopole. Benjamin Echalier parle de "vide juridique" tant que "le législateur n'a pas pris ses responsabilités". En attendant, selon lui, la e-cigarette est un "produit de consommation courante". Il a signifié qu'il allait faire appel. Et a assuré que, cet appel étant suspensif, le vendeur spécialisé continuerait donc à vendre et à faire la promotion de ses produits. 

Une victoire pour les buralistes 

Le président de la Confédération des buralistes, Pascal Montredon, a applaudi cette "excellente nouvelle". Sa confédération avait prévenu qu'en cas de décision favorable, elle encouragerait les 27 000 débitants de tabac de France à suivre l'exemple du buraliste toulousain. Elle a déjà poussé ses adhérents à vendre eux-mêmes des cigarettes électroniques, ce que 70% font déjà, selon elle. 

Les buralistes entendent bien profiter de la croissance fulgurante du marché de la cigarette électronique au moment où les ventes de tabac chutent. Un récent sondage réalisé par Ipsos pour Clopinette, leader du marché en France, a révélé qu'environ dix millions de Français l'avaient déjà testée. Soit près d'un Français sur cinq. Or, pour l'Office français de lutte contre le tabagisme et l'association indépendante d'usagers de la cigarette électronique Aiduce, le recours à ces produits explique au moins pour partie la baisse des ventes de tabac en France depuis près de deux ans. Sur l'ensemble de l'année 2012, le marché du tabac a baissé de 4,9% en volume.

Les buralistes guettent aussi les décisions en provenance de Bruxelles. L'Europe se penche sur une nouvelle législation antitabac plus contraignante, qui concernerait aussi les e-cigarettes. Le 8 octobre, le Parlement européen a refusé qu'elles soient considérées comme un médicament et vendues exclusivement en pharmacie. Il s'est donc montré moins sévère que ne le demandait la Commission européenne.

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