"Des collègues s'en vont parce qu'ils n'ont plus les conditions nécessaires pour travailler" : l'Ifremer fête ses 40 ans dans une ambiance morose

L'institut public de la recherche océanographique est confronté à un manque historique de moyens alloués par l'État.
Article rédigé par Guillaume Farriol
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des scientifiques de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) déchargent des coraux du navire "Thalassa" amarré au port de Brest (Finistère), le 31 août 2022. (SEBASTIEN SALOM-GOMIS / AFP)

Flotte vieillissante, locaux vétustes, salaires parmi les plus bas de la recherche, conditions de travail qui se détériorent : l'Institut français de recherche entièrement dédié à la connaissance de l'océan (Ifremer) prend l'eau, à tel point que les salariés sont de plus en plus nombreux à claquer la porte.

C'est le cas de cet ingénieur qui préfère rester anonyme. Il a quitté l'Ifremer excédé par le manque chronique de moyens : "J'ai commencé à être confronté à la recherche de financements, à devoir répondre à des appels à projets, à des financements européens ou autres. Moi, j'avais été embauché pour répondre techniquement aux besoins des scientifiques, pas pour aller chercher des sous pour pouvoir réaliser mes missions, dit-il. Maintenant, je suis parti dans une société privée. Je me trouve à faire les développements que je cherchais à faire quand j'étais arrivé".

Cet ingénieur décrit aussi des locaux très vétustes. "Il y avait du lierre qui était en train de pousser dans mon bureau, c'est assez hallucinant". Le tout pour environ 2 000 euros net par mois, ce qui pousse de plus en plus de salariés à quitter l'Institut. Une vingtaine est partie en 2022 sur les 1 400 employés de l'Ifremer. Un chiffre de Franck Jacqueline, représentant de la CGT. "On est informé régulièrement de collègues qui s'en vont, tout bêtement parce qu'ils estiment qu'ils n'ont plus les conditions nécessaires pour travailler. Donc ils jettent l'éponge. L'établissement en train de craquer".

Un manque de 10 millions d'euros par an

Avec une menace sur la qualité de la recherche et la capacité à mener les missions confiées à l'Ifremer, de plus en plus nombreuses. "Ils nous attendent sur un tas de conditions de dégradation de l'environnement, comme du microplastique, des polluants, des stocks de poissons. Faire des efforts en termes de suivi environnemental en Polynésie, dans le Pacifique, énumère-t-il. On peut toujours faire plus avec moins, mais jusqu'à une certaine limite. Ce n’est pas possible."

La CGT réclame donc plus d'argent tout de suite, en particulier pour rénover les navires laboratoires de l'Ifremer très vieillissants. Charge au PDG de décrocher une rallonge. Il faudrait une dizaine de millions d'euros de plus par an, explique le patron de l'Ifremer, François Houllier, en pleine négociation avec les représentants de l'État : "Ce sont eux qui ont décidé que cette année, ce serait une année de la mer, que l'année prochaine on aurait une conférence des Nations unies à Nice sur l'océan. Donc je pense qu'il y a une parfaite conscience de l'importance de l'océan et du rôle de l'Ifremer. Là, on a un certain nombre de discussions avec l'État et j'espère que ce processus va nous permettre d'avoir des signaux positifs dans les mois qui viennent".

En attendant, l'Ifremer puise dans ses réserves avec le risque d'un défaut de paiement dès 2026. C'est inscrit noir sur blanc dans un document interne présenté en conseil d'administration.

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