Vasectomie : le nombre de "jeunes dès 18 ans qui ne souhaitent pas avoir d'enfant augmente énormément", constate un urologue
Le nombre de "jeunes adultes dès 18 ans" qui souhaitent avoir recours à la vasectomie "augmente énormément", a rapporté mardi 13 février sur franceinfo Anthony Giwerc, urulogue. Selon une étude de l'Assurance maladie et l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), le nombre de vasectomies a augmenté de 1 940 en 2010 à 30 288 en 2022, soit quinze fois plus. Pendant des années, la vasectomie était réservée à une classe d'hommes, 35-40 ans, a-t-il expliqué. Mais aujourd'hui les jeunes sont de plus en plus enclins à franchir le pas. Le réchauffement climatique et la surpopulation de la planète sont souvent évoqués par les jeunes patients. "Ce qui pèche, c'est qu'aujourd'hui, pour les hommes, on a peu de contraceptifs", explique Anthony Giwerc. Les jeunes prennent la vasectomie comme un moyen de contraception. Or, c'est un moyen de stérilisation", a-t-il rappelé.
franceinfo : Observez-vous de plus en plus de demandes en consultation ?
Anthony Giwerc : Depuis plusieurs années, on a un boom de la vasectomie à prendre avec des pincettes puisque ce n’est pas un boom par rapport aux pays anglo-saxons, mais on a vu le nombre de vasectomies augmenter considérablement et surtout le type de personnes venant consulter.
"Pendant des années, la vasectomie était réservée à une classe d'hommes de 35 ans, 40 ans, qui étaient désireux de ne plus avoir d'enfant dans la famille, qui voulait prendre en charge la contraception du couple."
Anthony Giwerc, urulogueà franceinfo
De plus en plus, on voit arriver à notre consultation de jeunes adultes dès 18 ans, qui ne souhaitent pas du tout avoir d'enfant et voyant le peu de méthodes de contraception disponibles chez l'homme souhaitent avoir recours à une vasectomie. Ça augmente énormément.
Vous essayez de les en dissuader ?
Il y a un cadre légal qui régit la vasectomie depuis juillet 2001. C'est une méthode de stérilisation à visée contraceptive, c'est-à-dire une technique qui est irréversible. Pour valider une vasectomie, il faut un délai de réflexion de quatre mois. Donc la première consultation consiste à exposer toutes les alternatives à la vasectomie c'est-à-dire l'ensemble des contraceptifs disponibles sur le marché. Une fois qu'on leur a expliqué toutes les alternatives, on rentre dans les explications de la vasectomie. Dès l'instant où ils ont signé le consentement et qu'ils ont réfléchi pendant quatre mois, ils sont libres d'avoir recours à cette technique chirurgicale. C’est une opération qui est de plus en plus facile, qui a été révolutionnée par des techniques dites "sans bistouri". Elle peut même être sous anesthésie locale pour une durée opératoire de 15 et 20 minutes et qui se fait en ambulatoire avec peu de complications.
Le changement climatique est-il une raison évoquée par les jeunes qui veulent une vasectomie ?
Tout à fait. Ce qu’on entend souvent, c’est "la planète est trop peuplée. Il y a beaucoup d'enfants qui sont en attente d'adoption. Pour l'instant, je n'ai pas de projet de parentalité, mais je souhaite être maître de ma propre fertilité. Je veux une vasectomie". Je l'entends de plus en plus.
Est-ce vraiment irréversible ?
Il y a toujours des méthodes de réparation. On s'est donné du mal pour pouvoir occlure ces petits canaux éjaculateurs pour éviter la sécrétion de spermatozoïdes dans le sperme. On peut réparer, mais le souci, c'est que la réparation n'est pas efficace et constante. L’efficacité de la réparation oscille entre 20 et 60% des cas. Je dis à tous les patients, "il faut y aller bille en tête en se disant c'est une méthode de stérilisation irréversible". En revanche, je conseille toujours systématiquement aux patients une solution alternative, c'est de conserver du sperme en banque au cas où. Si jamais il change d'avis, ils peuvent toujours avoir des enfants nés par fécondation in vitro.
Selon le président de la République, la baisse de la démographie est due à la baisse de la fertilité. Il a raison ?
Bien sûr. La baisse de la fertilité est connue depuis plusieurs années. La concentration en spermatozoïdes a énormément diminué en raison de plein de facteurs, notamment l'exposition aux perturbateurs endocriniens. Effectivement, l'altération de la qualité du sperme fait que la baisse de la fécondité est observée.
Avez-vous, avec les jeunes qui viennent vous voir, le même discours qu’Emmanuel Macron sur le réarmement démographique de la France ?
Oui. C’est pour ça que j'insiste à leur donner toutes les alternatives de contraception. Les jeunes prennent la vasectomie comme un moyen de contraception. Or, c'est un moyen de stérilisation. Et ce qui pèche, c'est qu'aujourd'hui, pour les hommes, on a peu de contraceptifs. Il reste le préservatif qui a l'avantage de ses inconvénients. Il protège contre les maladies sexuellement transmissibles, mais s'interpose entre le partenaire et sa compagne. Une surface de contact qui altère la qualité des rapports sexuels. Il reste la méthode dite du retrait. Pour l'instant, on est en attente des méthodes de contraception thermiques et hormonales, mais qui ne sont pas encore validées par l'Association française d'urologie.
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