Hôpitaux labellisés pour développer une technique contre les cancers du sang : "Un traitement enthousiasmant sur le plan de sa technologie et de son efficacité"
"L'idée est de redonner la main au système immunitaire des patients pour qu'il puisse s'attaquer aux cellules cancéreuses et éradiquer la tumeur", explique le professeur Nicolas Boissel, responsable de l'unité d'hématologie adolescents et jeunes adultes de l'hôpital Saint-Louis à Paris.
"On modifie génétiquement les cellules du malade pour leur donner des facultés qu'elles n'ont pas naturellement", a réagi, vendredi 10 août sur franceinfo, le professeur Nicolas Boissel, responsable de l'unité d'hématologie adolescents et jeunes adultes de l'hôpital Saint-Louis à Paris, après que Le Parisien a révélé que deux hôpitaux ont reçu un label pour développer les CAR-T cells. "Plus d'une vingtaine de patients ont été réinjectés" dans le cadre d'essais thérapeutiques, explique sur franceinfo celui qui a été l'un des premiers en France à utiliser ces CAR-T cells.
franceinfo : En quoi consistent ces CAR-T cells ?
Professeur Nicolas Boissel : L'idée est de redonner la main au système immunitaire des patients pour qu'il puisse s'attaquer aux cellules cancéreuses et éradiquer la tumeur. Pour cela, on va prélever chez les patients certaines cellules du système immunitaire, les lymphocytes T, qui ont naturellement l'habitude de s'attaquer aux cellules malades, qu'elles soient infectées ou cancéreuses. On va les armer par génie génétique pour qu'elles puissent reconnaître directement ces cellules et, dans un second temps, on les réinjectera au patient.
On modifie génétiquement les cellules du malade pour leur donner des facultés qu'elles n'ont pas naturellement.
Nicolas Boisselà franceinfo
C'est un outil qui existe et qui est en développement depuis plusieurs années. Le concept date du début des années 90 mais il a fallu tout ce temps pour améliorer et développer ce concept afin que les cellules soient in fine réinjectables à l'Homme.
Combien de patients ont bénéficié de ce procédé en France ?
Il y a maintenant plus d'une vingtaine de patients qui ont été réinjectés en France, soit pour une leucémie aiguë, soit pour un lymphome, dans le cadre d'essais thérapeutiques pour l'instant. L'Agence du médicament a, depuis quelques semaines, ouvert un accès beaucoup plus large à ce médicament. Il y a eu une autorisation de commercialisation aux États-Unis l'année dernière et il va probablement y en avoir une en Europe, donc on s'attend dans les semaines et les mois qui viennent à avoir une hausse du nombre de patients qui bénéficient de cette thérapie.
Quels sont les résultats ? Est-ce qu'il y a des différences selon l'âge du patient ?
Oui, ce traitement, comme beaucoup de nouveaux traitements qui sont développés, s'adresse à des patients qui en sont à des stades évolués de la maladie et qui sont résistants à des traitements conventionnels, notamment les chimiothérapies. Chez ces patients très résistants, dans le domaine des leucémies aiguës, on a observé 80% de rémissions complètes dans les semaines qui suivent l'administration et on espère qu'on va pouvoir contrôler la maladie chez la moitié de ces patients au long cours.
Actuellement, pour ce qui est du champ des leucémies aiguës, les développements sont surtout avancés chez les enfants et chez les jeunes adultes, essentiellement pour des raisons de tolérance.
Nicolas Boissel
Quand ce produit est réinjecté et que les cellules injectées vont reconnaître les cellules malades, elles vont libérer des tas de petites molécules dans l'organisme, qui vont donner comme un syndrome grippal, avec une fièvre très forte. Si le système s'emballe, ce syndrome peut aussi toucher les organes vitaux comme le cœur, le poumon, ou les reins. La prise en charge est donc complexe et se fait dans des centres experts avec des collaborations étroites entre les services de cancérologie, d'hématologie et de réanimation médicale.
Est-ce que ce traitement redonne espoir ?
Oui, c'est clairement un traitement qui est enthousiasmant à la fois sur le plan de sa technologie et de son efficacité. Il y a fort à parier que ce traitement va se développer dans d'autres formes de cancer et qu'on va pouvoir l'utiliser à des stades de plus en plus précoces de la maladie.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.