Paternité de Dali : l'ADN va parler
Fine et dressée sur le visage "à dix heures dix", elle n’a pas bougé d’un poil. Salvador Dali est mort en 1989, mais sa célèbre moustache a été préservée selon le médecin légiste Narcis Bardalet, qui s’occupait de l’exhumation du corps de l’artiste. "J'étais absolument ébahi, comme si c'était un miracle quand est apparue la moustache."
Le repos du peintre a été troublé à la demande de la justice espagnole, satisfaisant la demande d’une femme de 61 ans, Pilar Abel, qui affirme être le fruit de l’union éphémère de sa mère et de Dali. En devenant la seule héritière de l’artiste catalan, elle pourrait recevoir un quart de son héritage. L’avocat de Dali l’avait à l'époque de sa mort évalué à 136 millions de dollars. Pilar Abel n'aurait droit qu'à une part de l'héritage tel qu'il était à l'époque, et pas aux revenus qu'il a générés selon l’avocat de la Fondation.
L’exhumation a duré quatre heures, dans le Théâtre-Musée Dali, où le peintre surréaliste est enterré. Embaumé à sa mort, "momifié" selon le secrétaire général de la Fondation Dali, le corps était encore très bien conservé. Les experts ont donc eu la possibilité de prélever des échantillons de cheveu, d’ongle et de deux os longs.
L’état de conservation du corps primordial pour la fiabilité du test
Une aubaine, tant la fiabilité des résultats de ces tests dépend de la conservation du corps. "L’ADN est une très grande molécule, elle peut être dégradée, coupée en petits morceaux ce qui rend difficile voire impossible l’analyse", détaille Marie-Gaëlle Le Pajolec, directrice de l’Institut génétique de Nantes-Atlantique. En 1998, son laboratoire avait conduit les tests devant déterminer si Yves Montand était ou non le père d’Aurore Drossart. L’analyse avait finalement exclu tout lien de parenté entre le comédien et celle qui prétendait être sa fille.
Le test consiste d’abord à extraire l’ADN des cellules contenues dans les fragments prélevés. "Les chercheurs vont chercher des régions de l’ADN discriminantes, polymorphiques (variables) d’une personne à l’autre", poursuit Marie-Gaëlle Le Pajolec. Même chose chez l’enfant supposée de Dali.
Il faut ensuite comparer les deux ADN pour déterminer s’ils présentent les mêmes variabilités, les mêmes marqueurs, pour établir la paternité. Posséder des fragments d’ADN de la mère de Pilar Abel permet de réduire les facteurs de probabilités, puisque le test est un calcul, et d’assurer une meilleure fiabilité de la décision.
L’Institut toxicologique de Madrid a annoncé prendre "plusieurs semaines" avant d’annoncer le résultat. "La dégradation de l’ADN peut retarder ces tests, mais ils peuvent très rapides, de l’ordre de quelques jours", explique Marie-Gaëlle Le Pajolec. Conservé au point d’avoir gardé sa moustache intacte, le corps de Salvador Dali devrait bientôt livrer son secret.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.