Le foie "naturellement gras", une alternative au foie gras ?
Des chercheurs toulousains ont travaillé sur des oies qui se gavent elles-mêmes, en prévision de longs trajets migratoires.
Existerait-il une voie médiane, entre les adversaires résolus du foie gras, qui dénoncent le gavage comme étant une atteinte au bien-être animal, et ceux qui en raffolent ? Des chercheurs toulousains travaillent sur un foie d'oie naturellement gras, s'appuyant sur un instinct naturel de stockage alimentaire en vue de la migration.
Tout est parti d'un laboratoire de l'Inserm à Toulouse, qui a étudié la flore intestinale des animaux et de l'homme, ce que les scientifiques appellent le "microbiote". Dans le cadre de ces recherches, un vétérinaire et deux spécialistes de ce microbiote ont décidé de découvrir comment certains oiseaux migrateurs fonctionnaient, et notamment l'oie sauvage.
Les oiseaux migrateurs doivent échapper à leurs prédateurs qui arrivent l'hiver et donc se suralimentent.
Rémi Burgelin, de l'Insermà franceinfo
"Les oies se gavent toutes seules en mangeant les produits de l'été qu'elles trouvent à l'automne par terre en grande quantité, explique Rémi Burgelin, directeur de recherche à l'Inserm de Toulouse. Grâce à ces très fortes réserves énergétiques, elles peuvent alors voler pendant très longtemps."
"Aucune manipulation génétique"
Le chercheur explique la façon dont son équipe a travaillé : "Il n'y a aucune manipulation génétique, ni sur les bactéries et encore moins sur les oies. Nous avons simplement, un peu comme les semenciers, isolé, trié et retrouvé des semences, c'est-à-dire des ferments bactériens, qui sont associés et qui sont maintenant causalement impliqués dans le stockage de l'énergie alimentaire, dans le foie sous forme de gras."
Tout cela produit des foies naturellement gras, qui ne peuvent pas s'appeler foies gras, car ils font parfois moins de 400 grammes. "On propose un foie naturellement gras, c'est-à-dire un produit issu d'un mode de production sans avoir recours à l'étape de gavage. C'est une alternative au foie gras", met en avant Élodie Luche, directrice générale d'Aviwell, l'entreprise qui commercialise cette découverte.
On va s'adresser à une clientèle qui est internationale et qui va être en quête d'un produit haut de gamme d'une très grande qualité.
Élodie Lucheà franceinfo
Pour l'instant, cette technique ne concerne que les oies, pas les canards. "Les oies ont gardé cette capacité à migrer, en tout cas les oies d'élevage, qui sont utilisées aujourd'hui, ont gardé cette capacité à migrer. Donc le procédé fonctionne chez ces oies", explique Élodie Luche. "C'est très important pour nous de pouvoir relancer cette filière oie, qui est en forte difficulté en France et qui est même en disparition. Je serais ravie que les éleveurs aujourd'hui envisagent de relancer ces élevages dans leurs fermes", poursuit-elle.
Reste la question du prix. A 990 euros le kilo, cela reste un produit de niche, qui ne sera pas demain sur toutes les tables. Le prochain défi scientifique est de transposer cette technique aux canards.
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