Lactalis : l'association des victimes du lait contaminé dénonce "une trahison de l'Etat vis-à-vis des familles"
Quentin Guillemain, président de l'association de victimes du lait contaminé aux salmonelles, évoque mercredi sur franceinfo une "trahison des services de l'Etat vis-à-vis des familles". Lactalis a été autorisé à commercialiser la poudre de lait infantile produite dans l'usine touchée par les contaminations.
"Si les laits sont dans les supermarchés, nous mènerons des actions", annonce mercredi 19 septembre sur franceinfo, Quentin Guillemain, président de l'association de victimes du lait contaminé aux salmonelles, qui représente 800 familles. Un peu plus de neuf mois après cette contamination dans l'usine de Craon (Mayenne), le groupe Lactalis a été de nouveau autorisé à commercialiser la poudre de lait infantile produite dans cette usine.
franceinfo : Vous aviez été informé de ce feu vert de l'Etat ?
J'ai appris cela par voie de presse, pas un mot de l'entreprise ou du préfet. Nous avons rendez-vous la semaine prochaine avec le préfet de Mayenne. J'ai eu le directeur de cabinet du préfet il y a quelques jours au téléphone et jamais il n'avait évoqué cela. C'est une trahison. Trahison des services de l'Etat vis-à-vis des familles. Nous sommes des victimes. On a l'impression dans ce pays que les victimes n'ont pas de droits. On a l'impression de se battre contre un Etat sous influence, contre un blockhaus qui est le lobby Lactalis. Au bout de 9 mois, chaque fois que Lactalis demande quelque chose, l'Etat répond présent.
Selon vous, on essaie de passer cette affaire sous silence ?
On peut se poser des questions. Le rendez-vous de la semaine prochaine avec le préfet, c'est le premier depuis que nous avons rencontré les ministres au mois de janvier ! Ils avaient fait de grandes déclarations à cette occasion, mais depuis, dans les faits, il ne s'est rien passé, aucune conséquence, personne n'a été puni et on a une enquête judiciaire qui patine. Nous attendons la nomination d'un juge d'instruction. Une enquête préliminaire est en cours. Habituellement, cela dure six mois, là on est à huit mois et nous n'avons toujours aucune information. Nous n'avons aucun élément sur les conditions exigées pour cette remise en service de l'usine, pour cette vente, à nouveau, de produits. On parle de ventes à l'étranger. Pourquoi à l'étranger ? Est-ce encore une manipulation ? On vend à l'étranger parce que l'on sait que cela fera moins de bruit qu'en France ? Parce qu'ici, nous n'avons plus la confiance des consommateurs ? Je vous le dit, les parents n'achèteront pas ces laits.
Le ministère de l'Agriculture annonce des contrôles surprises réguliers de l'administration. Cela ne vous rassure pas ?
Moi j'appelle cela des contrôles au doigt mouillé. On a parlé pendant des mois d'auto-contrôle. Et on s'est aperçu que pendant dix ans, dans cette entreprise, malgré des contrôles et des auto-contrôles, des laits avaient été contaminés, déjà en 2005 ! Des bébés ont été contaminés pendant plus de dix ans. Les experts que nous interrogeons nous disent qu'il aurait fallu démonter la chaîne de fabrication pièce par pièce pour vérifier qu'aucune n'ait été contaminée...
Un ordinateur qui contenait des documents sensibles a été volé à la répression des fraudes au mois de mai. Vous en êtes où sur cette affaire ?
On va déposer plainte cette semaine pour dissimulation de preuve. Au fur et à mesure des mois qui passent, des éléments disparaissent. Cette entreprise, dans laquelle il y a eu cette contamination, reprend son activité : comment allons-nous mener une enquête de manière fiable dans une entreprise qui a repris une activité ? C'est impossible ! On est fatigués de tout cela. On continue d'être obligés d'activer la justice, qui d'ailleurs n'avance pas beaucoup, pour essayer à la fin d'avoir des informations.
Comment comptez-vous réagir désormais ?
Si les laits sont dans les supermarchés, nous mènerons des actions. Nous ne nous laisserons pas faire, nous sommes encore plus déterminés qu'avant. Il est hors de question que l'on passe un coup de balai sur toute cette histoire et qu'on découvre dans quelques mois ou année que des bébés sont à nouveau contaminés. On parle quand même d'une affaire qui, pour la deuxième fois, a contaminé une centaine de bébés !
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