Suède : les ultras riches concentrent 70% des richesses, l’égalité sociale n’a plus la côte

La Suède a longtemps été considérée comme un modèle en termes de politique sociale, mais tout cela fait partie du passé. Le pays scandinave érige désormais en exemple la réussite de ses entrepreneurs, une population d’ultra-riches qui a été multipliée par 20 en 20 ans.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Stockholm la capitale de la Suède en novembre 2020. (PHILIPPE TURPIN / PHOTONONSTOP / AFP)

En 2021, on comptait 542 millionnaires suédois contre 28 en 1996. Ces ultra-riches concentrent 70% des richesses de la Suède, l’un des pays affichant également l’un des taux les plus élevés au monde de milliardaires par habitant. La Suède, c’est le paradis des start-ups licornes, les projets d’innovations technologiques lancés au début des années 2000 et dont la valeur a dépassé aujourd’hui le milliard d’euros. La Suède en a vu naître plus d’une quarantaine depuis 20 ans.

Cela explique notamment les succès fulgurants de Skype ou Spotify. Deux géants de la tech mondiale construits sur un modèle financier très compétitif et très agressif. Même le rappeur, homme d’affaires américain, Snoop Dogg semble choqué par le profit et les marges réalisés par l’un des fleurons de l’économie suédoise. "Y a pas longtemps, j’ai reçu un truc de Spotify où j’ai plus d’un milliard d’écoutes. Mon manager m’a appelé et m’a dit : 'devine combien tu vas gagner ?' Ce bordel va me rapporter 45 000 dollars, c’est délirant", a-t-il déclaré récemment. Il est l’un des artistes les plus écoutés sur Spotify.

Une réussite encouragée et accompagnée par les pouvoirs publics suédois : suppression de l’impôt sur la fortune, réduction de 10% de l’impôt sur les sociétés et de l’imposition sur les plus-values d’actionnaires. On peut ajouter à cela une décennie de politique monétaire aux taux d’intérêt très bas. À droite comme à gauche, les gouvernements suédois ont franchement tout fait pour galvaniser cet esprit d’entreprise et cette culture du profit.

Une culture du profit au détriment des politiques sociales

La logique libérale a supplanté l’idéal d’une société suédoise égalitaire. C’est le constat que fait le journaliste Andreas Cervenka, après avoir enquêté pendant près de 10 ans sur l’émergence des ultra-riches en Suède. "Nous avons adopté une vision de marché pour tout dans nos vies", explique-t-il. "C'est-à-dire qu'il n'y a pas une seule activité qui ne réponde pas à un objectif de marge ou qui n'exige pas un profit en retour. Aujourd'hui, certains fonds d’investissement en capital-risque possèdent des écoles suédoises, qui représentent les fondations de notre société et de son évolution. Comment cela a-t-il pu se produire ?", s'interroge Andreas Cervenka.

Les comptes publics des communes et des régions suédoises sont aujourd’hui dans le rouge. Licenciements, coupes budgétaires massives dans la santé et l’éducation, en Suède, près d’un enseignant sur deux en maternelle ou en primaire souffre aujourd’hui d’un problème de santé lié à ces conditions de travail.

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