Otan : derrière l'adhésion de la Finlande et de la Suède, le grand enjeu de l'Arctique
La Finlande s’apprête à adhérer à l’Otan : son président l’a confirmé ce jeudi. La Suède va sans doute annoncer la même décision rapidement. C’est la confirmation d’un nouveau "rideau de fer" Est-Ouest avec la Russie. Mais la confrontation peut également se jouer au Nord, dans l’océan Arctique.
L’Arctique, c’est un peu le "non-dit" du bras de fer en cours entre la Russie et les Occidentaux. Mais l’effet de bord de la guerre en Ukraine peut y être considérable. Sur le plan militaire d’abord, il suffit de regarder une carte pour comprendre. Au Nord de la Finlande et de la Russie, l’Arctique est une potentielle ligne de front, surtout avec la fonte progressive des glaces due au réchauffement climatique.
Chaque bloc se sent vulnérable
Des deux côtés, la présence militaire ne cesse d’être renforcée. La Russie a créé une marine arctique et envisage de déployer des missiles hypersoniques et des armes nucléaires dans la zone. Depuis cinq ans, elle a multiplié les exercices militaires dans la région. En face l’Otan fait la même chose. L’Alliance du traité de l'Atlantique nord a organisé des manœuvres fin mars, nom de code "Cold Response", réponse froide.
Et la fonte des glaces accroit les risques. Tout simplement parce que chacun, de chaque côté de l’Océan, se sent soudain plus vulnérable aux attaques de l’ennemi. Rappelons que d’ici 20 ans, il est possible que la glace fonde totalement pendant l’été en zone arctique. L’entrée de la Finlande dans l’Otan va donc signifier mécaniquement un renforcement de la présence de l’Alliance atlantique dans le Grand Nord. Et l’article 5 de l’Otan pourra donc être déclenché en cas d’attaque russe dans la zone Arctique de la mer de Barents. Il embarquerait tous les membres de l’Alliance dans le conflit en cas d’agression au Nord de la Finlande.
Manœuvres militaires et projets d'exploitation énergétique et minière
Ensuite il y a l’enjeu économique et il est colossal. Le sous-sol de l’Arctique contient environ 25% des ressources mondiales en énergies fossiles. Beaucoup de gaz, du pétrole et aussi des minerais : de l’or, de l’uranium, du nickel, des métaux rares. Moscou a initié une centaine de projets dans la région. Il faut ajouter la ressource en poissons, pour la pêche et bien sûr le commerce, avec l’ouverture du chemin maritime de la Route du Nord, qui va devenir, et de loin, le trajet le plus rapide entre l’Europe et l’Asie.
Mais tout ça ne fonctionne que si entente il y a entre les pays riverains : soit pour se répartir les ressources, soit justement pour ne pas exploiter ces ressources au nom des impératifs climatiques. La tension croissante entre l’Est et l’Ouest vient donc percuter cet équilibre potentiel. Cette tension peut aussi limiter les ambitions russes. Pourquoi ? Parce que plusieurs de ces projets dépendent de financements et de technologies occidentales. C’est le cas, par exemple de la base Arctic LNG2, destinée à exploiter des millions de tonnes de gaz liquéfié.
Le Conseil de l'Arctique en panne
Il existe pourtant une instance de négociation pour éviter ces tensions : c’est le Conseil de l’Arctique. Il regroupe les pays riverains : la Russie (qui possède à elle seule la moitié du littoral arctique) et sept pays occidentaux : le Canada, les États-Unis, la Finlande, le Danemark, l’Islande, la Norvège, la Suède. Ces dernières années, le Conseil avait plutôt bien fonctionné, justement au nom du bien commun de l’Humanité, de la prise de conscience que l’Arctique est une zone fragile. Mais aujourd’hui, tous ses travaux sont suspendus, au moins jusqu’à l’an prochain. Décision des Occidentaux "en raison de la violation flagrante de la souveraineté de l’Ukraine". Preuve que la guerre en Ukraine et la tension Otan- Russie se répercutent directement en Arctique.
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