Hongrie : après un scandale d'État sur fond de pédocriminalité, Viktor Orban voit les nuages s'amonceler au-dessus de sa tête

En l'espace de quelques jours, une série de revers est venue perturber le sommet de l'État hongrois. Démissions en série, scandales et mauvaises nouvelles se succèdent, fragilisant comme jamais le pouvoir de son principal dirigeant.
Article rédigé par Nathanaël Charbonnier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Viktor Orban au Conseil européen extraordinaire du 1er février 2024, à Bruxelles. (OLIVIER HOSLET / EPA / MAXPPP)

Tout est parti d'une grâce présidentielle. La ministre de la Justice et la présidente de la République, deux proches de Viktor Orban, ont gracié un ancien directeur adjoint d'un foyer pour enfants. Celui-ci avait été condamné en 2022 pour avoir couvert les agissements pédocriminels de son supérieur.

C'est la presse étrangère qui a révélé l'existence de cette grâce accordée en 2023 au moment de la venue du Pape. L'affaire s'est immédiatement transformée en scandale. Les conséquences ont été immédiates, avec notamment les démissions de la ministre de la Justice et de la présidente, samedi 10 février 2024. Elles ont ainsi fait amende honorable en reconnaissant avoir commis une erreur, mais c'était trop tard. L'affaire touche maintenant les plus hautes sphères du pouvoir hongrois et notamment le Premier ministre Viktor Orban.

Une vidéo dénonçant une corruption au plus haut degré

Depuis, un nouveau rebondissement a eu lieu. L'ex-mari de la ministre de la Justice a également démissionné. L'homme connaît parfaitement les arcanes du pouvoir hongrois et ne supporte pas de voir son ex-épouse servir de bouc émissaire. Coup sur coup, il a annoncé ne plus vouloir faire partie d'un système dans lequel les vrais responsables se cachent derrière les jupes des femmes, puis a démissionné de deux entreprises publiques dans lesquelles il détenait des postes à responsabilités.

Il a ensuite accordé une interview sur la chaîne YouTube Partizàn, l'un des rares médias indépendants du pays, dans laquelle il pointe la corruption endémique de la Hongrie et notamment le grand conseiller de Viktor Orban. La vidéo a été un succès. Elle a été vue plus de 1,5 million de fois dans un pays de moins de 10 millions d'habitants.

Aujourd'hui, l'affaire n'est toujours pas terminée car l'opposition s'en est emparée. Viktor Orban pensait l'affaire close avec la démission de ses proches, mais c'était sans compter l'appel à manifester, de l'opposition avec des influenceurs du pays. Ils appellent à un nouveau rassemblement vendredi prochain, en solidarité avec les victimes trahies par la grâce présidentielle.

Une mauvaise passe après de nombreux déboires

Cette mauvaise passe arrive après sa déconvenue lors du dernier conseil européen, où il a dû se coucher face aux 26 autres États sur le dossier Ukrainien. Certains eurodéputés accusaient la Commission de céder au "chantage" du dirigeant hongrois, face au blocage de la Hongrie pour accorder une nouvelle aide à l'Ukraine. Le pays continue de pâtir du gel d'une partie de l'aide européenne.

La disgrâce est aussi appesantie après l'ouverture par l’Europe d'une procédure d'infraction suite à une loi controversée, une législation instaurant une autorité de surveillance censée prévenir "les interférences étrangères" dans le processus électoral et "protéger la souveraineté" du pays. L'UE s'inquiète d'une loi qui met en cause le principe de démocratie et le respect de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Comme si cela ne suffisait pas, on apprend que la Hongrie était en récession en 2023 et que ses prévisions de croissance de plus de 4% pour 2024 sont jugées irréalistes. Bref, les nuages s'amoncellent sur la Hongrie, et plus particulièrement sur la Hongrie de Viktor Orban.

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