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En Afrique du Sud, le discours annuel du président se tient dans un climat tendu

C'est le grand événement politique annuel dans le pays : le discours sur l’état de la nation. Le contexte est très particulier après une année marquée par des émeutes et l’incendie du Parlement.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le président sud-africain Cyril Ramaphosa lors de discours sur l'état de la Nation, au Cap le 11 février 2021.  (ESA ALEXANDER / POOL)

En Afrique du Sud, tout le monde appelle ce discours par son acronyme, SONA, pour "State of the Nation address". C’est le discours de politique générale annuelle devant les deux chambres parlementaires, l’équivalent du discours de la Reine au Royaume-Uni, ou du discours de l’État de l’Union aux États-Unis. Pour la première fois, ce 10 février au soir, l’événement n’aura pas lieu au Parlement, mais à la mairie du Cap. Et pour cause : début janvier, le Parlement a brûlé, détruit par un incendie volontaire.

Le maintien du discours du président Ramaphosa témoigne d’une forme de résilience démocratique face à l’adversité. Mais le climat est tout de même très particulier. Les mesures de sécurité ont été drastiquement renforcées dans toute la ville. La presse affirme que certains députés pourraient chercher à perturber le discours. Et tout ça se déroule à la veille d’une nouvelle comparution devant la justice de l’incendiaire présumé du Parlement, Zandile Mafe, un homme de 49 ans inculpé de terrorisme.  

Incendie du Parlement, émeutes et corruption

Le pays sort d’une année éprouvante, marquée par des émeutes et une réelle instabilité politique. Le géant sud-africain et ses presque 60 millions d’habitants, est en pleine zone de turbulences depuis des mois. L’été dernier, de violentes émeutes ont fait 350 morts et ont vraiment secoué le pays : routes bloquées, magasins pillés, en particulier à Johannesburg et à Durban.

Un rapport officiel publié lundi 7 février fait le lien entre ces émeutes et les tensions internes à l’ANC, le parti au pouvoir. En fait, l’un des éléments déclencheurs de cette violence, avait été la condamnation de l’ancien président Jacob Zuma, artisan d’un vaste système de corruption : détournement de marchés publics, attribution de postes à ses proches dans les sociétés privées et la haute administration. Après la condamnation de Zuma à un an de prison ferme, ses partisans avaient été les premiers à descendre dans la rue. L’un des objectifs de Cyril Ramaphosa, c’est donc aussi de reprendre la main sur son parti et d’en éradiquer la corruption. Pas facile après neuf années de gouvernance Zuma, de 2009 à 2018.  

Un taux de chômage à 35%

De plus, la situation économique et sociale globale est très mauvaise. L'Afrique du Sud n’arrive pas à se relever de la pandémie, qui a fait presque 100 000 morts dans le pays, un bilan comparable à celui de la France quand on le rapporte au nombre d’habitants. Mais ce n’est que le bilan officiel, sans doute sous-évalué. Et il y a surtout l’impact économique. Le taux de chômage atteint 35%, soit 13 millions de personnes sans emploi. Chez les jeunes, il atteint même 50%.

La croissance stagne, à moins de 2%. Les coupures d’électricité sont fréquentes, la gestion de la compagnie nationale Eskom laisse à désirer depuis belle lurette. Les ingénieurs fuient le pays. Et la pauvreté engendre mécaniquement plus de délinquance et d’insécurité. Cyril Ramaphosa envisage d’annoncer une prolongation de l’allocation d’urgence de 350 rands – à peu près 20 euros – mise en place pendant la pandémie. Mais ça ne va pas suffire à calmer le pays.  

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