Vrai-faux bio : Bruxelles veille au grain
Vrai-faux bio, Bruxelles veille au
grain ! Il ne s'agit pas d'inventer une nouvelle norme pour imposer une
courbure idéale aux bananes issues de l'agriculture biologique, mais de lutter
contre les dérapages et les abus en tous genres face à une demande de plus en
plus forte. Au cours des 15 dernières années en Europe, les ventes de produits
bio ont été multipliées par quatre, alors que la production n'a fait que
doubler, et les surfaces cultivables n'ont augmenté que de 10%. Le chiffre
d'affaires du secteur, au niveau européen, est aujourd'hui estimé à 20
milliards d'euros. C'est, grosso modo, l'équivalent d'un point de croissance du
PIB français sur un an. Nous ne sommes sur une niche mais pratiquement sur de
la consommation de masse.
Les abus en question... de quoi
s'agit-il ?
C'est d'abord la concurrence
déloyale de pays tiers. Lorsqu'on importe des produits bio de pays lointains,
la législation se limite à une "équivalence" des normes. Ce qui
laisse la porte ouverte à de gros écarts dans les cahiers des charges, voire du
bidouillage et de la fraude de la part des pays exportateurs.
Et puis nous-mêmes devons balayer
devant notre porte : le système européen de labellisation manque de lisibilité.
Chacun des 28 pays membres à ses propres normes, il existe une foultitude de
dérogations, notamment pour la nourriture des animaux destinés à la
consommation. Des vins que l'on achète en grande surface – qui arborent pourtant
le label "AB" avec un beau col en carton vert autour du goulot – contiennent
un certain taux de sulfites. Bref, Bruxelles veut clarifier la situation.
C'est le Commissaire européen à
l'Agriculture qui pilote ce dossier. Que propose-t-il ?
Dacian Ciolos veut que le label ne
soit plus un vil estampillage, plus dicté par des impératifs commerciaux que
par la réelle qualité des produits. Il veut empêcher les importations n'ayant
de bio que le nom en travaillant sur un standard commun.
Parvenir à du 100% naturel, ce
serait aussi, par exemple, interdire les exploitations mixtes qui combinent
production bio et conventionnelle (les agriculteurs devront faire un choix). Le
niveau autorisé des pesticides serait réduit, et puis finis les poulets bio qui
ne sortent jamais des hangars pour respirer l'air frais.
N'y a-t-il pas un risque de voir les
prix remonter ?
Certains producteurs ou
distributeurs n'hésiteront pas à utiliser cet argument pour relever les
étiquettes. Ce qui serait une erreur car l'agriculture biologique répond
aujourd'hui, on le sait, à une problématique de santé publique et
environnementale.
Pourquoi un label plus sécurisant
serait plus cher à assumer par des producteurs et des intermédiaires qui se
réservent déjà des marges très confortables ? Là est le vrai problème.
Quant au consommateur, c'est une
question de répartition de budget : mieux se nourrir plutôt que de truffer
son foyer en matériels derniers cris technologiques. Chacun voit midi à sa
porte. C'est le choix qu'ont fait des familles aux revenus pourtant modestes.
S'il arrive à son terme, le projet législatif du Commissaire Dacian Ciolos peut
contribuer à faire avancer le débat.
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