Retraites : Faites des bébés !
Tout ça pour ça… Le paradoxe de cette réforme des régimes spéciaux c’est qu’elle peut être socialement explosive et en même temps elle ne va avoir qu'un effet très limité sur l’équilibre financier des retraites. Tous réunis, les régimes spéciaux de la SNCF, de la RATP, d’EDF, de l’Opéra de Paris et autres accusent un déficit de 5 milliards, financé par l’Etat. Soit une facture annuelle de 80 euros par Français. S’il s’agit vraiment de la réduire, on se dit que ça vaut le coup de passer en force. Mais en réalité la part essentielle du déficit provient non pas de la générosité du système – la durée de cotisation de 37 ans et demi, les départs à la retraite à 55, voire 50 ans – mais de la démographie. Ce sont les actifs qui paient les pensions des retraités et il se trouve que dans ces entreprises, on a beaucoup réduit les effectifs du fait de des progrès techniques, c’est vrai pour le train comme pour la production d’électricité. Du coup, le nombre de cotisants s’est effondré : on ne compte plus qu’un actif pour deux retraités. C’est surtout ça qui pose problème. Ajoutons le fait que la réforme ne concernera évidemment pas ceux qui sont déjà à la retraite. Pour les autres, elle ne va s’appliquer que progressivement. Au total, la première année, l’alignement des régimes spéciaux ne fera gagner que 200 millions à l’Etat.
Mais alors pourquoi ce gouvernement a-t-il fait de cette réforme une priorité absolue ?
D’abord parce qu’elle va quand même permettre d’économiser de plus en plus d’argent au fil des années, au fur et à mesure que la génération des retraités va se renouveler. Ensuite parce qu’elle va mettra tout le monde sur le même pied face à la retraite : c’est un enjeu d’équité. Et comme un nouvelle étape s’annonce en 2008, cette fois pour tous, avec la perspective de passer à 41 ans de cotisation, la pilule sera plus facile à avaler s’il n’y a plus d’inégalités trop criantes face à la retraite : l’effort est partagé par tous. Enfin Bruxelles regarde de très près la manière dont l’Etat intervient dans le financement des retraites des entreprises publiques pour voir s’il n’y a pas des aides qui faussent la concurrence. La commission a ouvert une enquête sur la RATP. La réforme est donc inévitable, nécessaire mais pas suffisante. Elle a surtout une vertu symbolique : si on va au bout, un abcès de fixation aura été surmonté. Mais pour assurer l’avenir des retraites, la meilleure solution reste la plus naturelle : faites des bébés !
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