La dette mondiale dans tous ses Etats
C'est la BRI, la Banque des Règlements Internationaux,
qui s'est livré à ce petit calcul dans son rapport trimestriel sur l'économie
mondiale. 100.000 milliards de dollars (72.000 milliards d'euros), ce sont quatre
fois – voire un peu plus – la richesse produite par les Etats-Unis et la Chine
réunis. Cette dette s'est littéralement envolée avec la crise. En 2000, elle
s'élevait à 29.000 milliards d'euros. Cela veut dire qu'en dix ans, elle a plus
que doublé. Il s'agit de la dette des pays, des entreprises cotées et des sociétés
financières, pas de l'endettement des ménages.
Comment s'explique cette dette colossale ?
Par deux facteurs conjugués : d'un côté, le
ralentissement de l'économie dû à la crise (moins de croissance, donc moins
d'activité, donc moins de rentrées fiscales). Le phénomène s'est justement
accéléré à partir de 2007 au début de la crise financière internationale. De
l'autre côté : les immenses liquidités injectées par la Réserve Fédérale
Américaine dans l'économie outre-Atlantique pour la soutenir (une planche à
billets qui délivre chaque mois 55 milliards d'euros... au bout de quelques
années, ça fait une rondelette somme). Quant aux entreprises cotées : leur
dette a augmenté par emprunts sur les marchés faute d'avoir pu se financer auprès
des banques qui avaient sérieusement réduit le débit du robinet à crédit.
Tous les pays sont touchés ?
Oui, sans exception, mais dans des proportions
différentes bien sûr. Le pays peut-être le plus représentatif est le Japon dont
la dette atteint 230% du PIB (230% de la richesse que son économie produit
chaque année. Par comparaison : le ratio français est de 96/97%... ce qui
reste énorme). Le Japon souffre d'une population vieillisante qui lui coûte cher. Mais l'archipel est moins dépendant des marchés financiers que
les autres pays car sa dette est détenue à 95% par les japonais eux-mêmes, à
travers l'épargne nationale.
Revenons au montant global de la dette mondiale... est-il
réellement soutenable ?
Au risque de surprendre, je dirai que la dette n'est pas
une maladie honteuse. Car, finalement, on peut la considérer comme un
investissement pour les générations futures. Mais on est allé beaucoup trop
loin.
Et puis il faut ajouter un autre phénomène en
parallèle : les chute des prêts internationaux, ce que l'on appelle les
crédits transfrontaliers : les prêts accordés par des banques d'un pays à
l'économie d'un Etat voisin ou partenaire commercial. Le phénomène est
particulièrement notable au sein de la zone euro où les seuls prêts entre
banques ont reculé de 30% depuis 2008.
Quelles conclusions en tirez-vous ?
Cela montre que la confiance dont on a tant besoin pour
redémarrer n'est toujours pas au rendez-vous chez les principaux acteurs du
financement de l'économie réelle. C'est également le signe que les banques
n'ont pas retrouvé non plus la confiance entre elles. Dès lors, comment
insuffler le moindre optimisme ?
Cette super, cette supra-dette internationale, est donc
un sérieux frein à la croissance sur laquelle elle va peser de tout son poids.
Une dette peut-être utile, mais qui est devenue en l'espace de 10 ans une
maladie quasi incurable, sauf à recourir à un puissant antidote : la relance.
On y revient. Rendre nos entreprises compétitives, faire de sérieux efforts
budgétaires et des économies, orienter l'épargne vers l'investissement utile
avec une politique monétaire et donc des taux d'intérêts adaptés. Non, la dette
n'est pas une maladie honteuse, à condition de savoir prendre les bons remèdes
au bon moment. Facile à dire, moins facile à faire.
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