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EADS : Une affaire d’Etat ?

Dans l’affaire EADS, on devrait en savoir plus cette semaine sur le rôle de l’Etat. Le ministère de l’Economie publiera jeudi le rapport sur la manière dont ses services ont géré le dossier. Quant aux dirigeants de la Caisse des dépôts, ils seront entendus cette semaine à l’Assemblée nationale et au Sénat. Que reproche-t-on exactement à l’Etat dans cette affaire ?
Article rédigé par franceinfo
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Deux choses. La première, c’est de ne pas s’être opposée à la cession d’actions d’EADS par le groupe Lagardère alors même qu’il en avait été prévenu. La seconde, ce serait d’avoir laissé la Caisse des dépôts racheter 2 et demi % du capital du groupe aéronautique, vendus par Lagardère, ce qui se solderait déjà par une perte de 120 millions d’euros pour cette institution publique.
L’Etat aurait ainsi couvert un possible délit d’initiés des dirigeants d’EADS, c’est-à-dire une opération destinée à tirer profit de la vente d’actions avant une baisse inéluctable, grâce à la détention d’une information encore non révélée au reste du marché, en l’occurrence les retards de l’A 380. Tout cela mérite le conditionnel, non seulement parce que l’enquête est en cours ou que le ministre de l’époque, Thierry Breton, affirme que l’Etat a été irréprochable, mais parce que la règle du jeu négociée entre les dirigeants français et allemands lors de la constitution du groupe en 2000 est très contraignante : l’Etat est actionnaire à 15% d’EADS mais n’a pas son mot à dire dans la gestion. De même, un strict équilibre entre Français et Allemands doit être respecté dans le capital comme dans le management. Dès lors qu’un actionnaire français se retirait du groupe, il fallait lui trouver un successeur français et compte tenu de son rôle d’investisseur institutionnel, on ne peut pas s’étonner que le nom de la Caisse des dépôts soit apparu. Son équivalent outre-rhin a d’ailleurs pris une part dans EADS, en lieu et place de l’Allemand Daimler, sans que là bas personne n’y trouve apparemment rien à redire.

Mais certains accusent la Caisse des Dépôts d’être aux ordres de l’Etat. Est-ce le cas ?

Théoriquement, c’est tout le contraire. Cette institution créée il y a bientôt deux siècles est là pour gérer tous les fonds qui sont réglementés par la loi : cela va des dépôts des notaires aux 100 milliards versés par les Français sur leur livret A. Justement, pour que l’Etat n’ait pas la tentation de puiser dans cette caisse, elle est totalement indépendante dans son fonctionnement, et notamment dans le choix de ses placements. Sa puissance de feu lui permet d’être présente dans toutes les sociétés du CAC 40, souvent d’ailleurs comme principal actionnaire. Elle est contrôlée non pas par le gouvernement, mais par le Parlement. Il reste qu’il y a une porosité - et c’est ce qui explique les polémiques d’aujourd’hui – entre la Caisse et le pouvoir exécutif. Son directeur général est nommé par le Président de la République. Il est rare qu’il ne soit pas passé par les plus hauts postes du ministère des Finances. C’est sans doute tout cela qu’il faudra clarifier dans l’avenir : la trop grande proximité entre monde politique, haute administration et les dirigeants des grandes entreprises expliquent largement les soupçons qui se développent actuellement.

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